60 kilos en trop

valerievisconti

Sandra, jeune femme obèse est complexée par son poids. Elle travaille dans une boîte d'événementiel mais une nouvelle personne va apparaître dans sa vie et devenir son assistante ...

Chapitre 1

60...70 ... 80 ... 90 ... 100 ... 110 ... 120 kilos. 

Tel est le poids qu'affiche ma balance. Comme tous les matins avant depetit-déjeuner, je me pèse. Je connais cette épreuve par cœur, surtout lorsque cela se passe chez un médecin. J'espère sûrement chaque début de journée que ce poids, peut-être, descendra ? Ou peut-être que les jours précédents n'étaient qu'un rêve et qu'au moment de se peser la réalité fera de nouveau surface ? Peut-être que ces années n'étaient qu'un songe et que ce cauchemar finira par se terminer ? Et si je ne mettais qu'un seul pied, peut-être que je serais heureuse ? Il faut essayer de rigoler un peu de son malheur.

Je m'appelle Sandra. Jeune femme fraichement diplômée, je travaille dans le domaine de la communication. Mon problème quotidien ? Je suis obèse et dans mon secteur d'activité cela n'a jamais été simple. Je me rappelle encore des refus reçus suite à des entretiens et après on dit « il n'y a pas de discrimination à l'embauche ». Mais, cela ne m'étonne pas. Durant ma scolarité, les blagues sur ma personne était régulière par exemple m'appeler Sandy pour "Sandy kilos".  Autant vous dire que cela ne m'a pas fait rire. J'avais aussi le droit à de jolis surnoms « la grosse », «gros cul » ou encore « grosse truie ». Oui, cela mettait de la poésie dans mon quotidien et me permettait  d'acquérir une pleine confiance en moi.

Notre société nous impose une image. La femme doit être une femelle aux mensurations de idylliques. A la fois mère de famille (reproduction de l'espèce oblige), carriériste (faire évoluer un pays est important), séduisante (il est bon de plaire à la gente masculine) et fidèle (attention on ne veut pas de trainée). Or, pour mon cas, depuis mon enfance, mon physique n'a jamais été un avantage, plus une malédiction qu'autre chose.

Résignée par ce chiffre, je descends de la balance et vais petit-déjeuner. Je suis une "bonne vivante" comme on a pris l'habitude de dire. J'aime cuisiner et surtout ... manger. Les "bonnes"choses sont mon principal souci. Entre des haricots verts et des chips, qui choisirez des chips d'après vous ? Pas grand monde. A part si on essaie de se dire "allez je vais faire un effort".

Notre chère et tendre société ne nous aide pas dans cette démarche là avec des industriels prenant un malin plaisir à proposer à ce cher (con)sommateur des produits néfastes pour sa santé, la malbouffe étant en priorité. Bien sûr, les sandwichs nous permettent un gain du temps mais, dans de nombreux cas, leurs composants sontnuisibles. Mais chut, c'est un secret.

"Se retrouver autour d'un bon repas" fait parti de notre culture mais ... est-ce que notre culture approuve l'obésité et les problèmes de santé réels qui en découlent ? Les vidéos sur internet de personnes faisant des concours de nourriture, ou préparant des plats hyper caloriques et commentées par une floppée de personnes disant "Il va falloir absolument que je fasse cette recette, c'est tellement appétissant"... A croire que tout cela est fait exprès pour détruire notre santé et pour nous attirer à aller droit dans le mur. Pourquoi nous éduque t-on ainsi ? 

Viennoiseries et pain blanc composent généralement mon repas matinal (tradition française oblige, ah la fameuse baguette française qui croustille en la coupant !). Mon plus grand plaisir réside dans l'étalage du beurre de cacahuète avec de la confiture sur mes tartines, ah quel régal ! Des fois même j'ose m'acheter des gâteaux industriels dans les supermarchés. Oui je sais, ces biens de consommation ne sont absolument pas une référence mais ... une fois qu'on les a sous le nez, il est difficile de ne pas craquer à moins ... d'avoir une réelle volonté.

Malheureuse du chiffre affiché par la balance, je me prépare une tartine à côté de mon café sucré et latté. Comme à chaque fois que j'ai un coup de déprime, je me réfugie dans la nourriture et commence à manger. Les moments où mes nombreux "régimes" se sont soldés par un échec me reviennent en mémoire. Je suis allée voir plusieurs professionnels de santé : nutritionniste, diététicienne... Mon mauvais comportement face à la nourriture se produit lorsque je me sens "abandonnée" ou que je me sens triste. Dans ces moments là je n'arrive pas forcément à garder les bons conseilsque l'on m'a donné.

La tartine finie, je prends un croissant et commence à le mordiller. Mon estomac s'étant élargi à cause de la quantité importante de nourriture, j'ai du mal à ressentir le sentiment de satiété. A cela s'ajoute le fait que je ne prends pas forcément le temps de mastiquer ... Or mastiquer est un impératif pour notre cerveau, cela permet à notre corps de savoir la quantité que nous avons mangé. Et notre estomac est ainsi pas saturé" de nourriture et donc pas de maux d'estomac.

L'obésité est une maladie, peu de gens le savent. Beaucoup trop de personnes s'empressent de « rire » quand un obèse ou une personne en surpoids essaie de courir en face d'eux. Plutôt que de l'encourager ou de la soutenir, se moquer est apparemment la solution de facilité. Je n'ai jamais compris d'où venait cette mentalité de ne pas avoir de cœur, de rire du malheur des autres. Je ne dis pas que rire n'est pas bien mais ... des fois un peu de compassion cela peut aussi réchauffer les cœurs. Surtout que, si ces personnes là se retrouver dans le besoin, ils seraient bien contents que quelqu'un leur tende la main.

Je pense personnellement qu'il y a un mal-être dans notre société, qu'on nous demande beaucoup et surtout aux femmes. De base, on part directement avec un « handicap » tout ça parce que c'est nous qui sommes faites pour procréer. Pourquoi les employeurs ne font pas de salaire égaux ? Pourquoi on est toujours sous payées et qu'on nous en demande tellement ? Je pense que cela explique pourquoi nous sommes beaucoup à être en surpoids ... Que la nourriture est quelque part notre réconfort, notre « nourriture doudou ».

La tartine finie, je prends un croissant et commence à le manger. A cause de mon alimentation importante, mon estomac s'est élargi et... le sentiment de satiété a du mal à apparaître. A cela s'ajoute le fait que je ne prends pas forcément le temps demastiquer or c'est une des clés pour manger moins et surtout ...pour que la satiété arrive le plus vite possible.

Je termine mon encas et vais me préparer pour ma journée de travail. L'étape cruciale du jour arrive : pouvoir mettre ses fesses et son ventre dans des habits. Ironie à cela : j'adore les vêtements et surtout ceux qui sont "originaux"mais ... la mode a pour habitude de créer des vêtements pour des personnes ayant une autre silhouette que la mienne. Alors, dépitée, je suis obligée de mettre des habits qui me correspondent moins. Le pire moment est là : se regarder dans la glace pour observer ce que cela donne. Et ... apercevoir les malheureux bourrelets qui, bien que dissimulés sous le tissu, tentent vainement de sortir de leurs prisons.

"Ah que les personnes minces et pouvant manger tout ce qu'elles veulent sont bien chanceuses" me dis-je une fois de plus à moi-même. L'injustice de mère nature, le sadisme du métabolisme humain différent pour chaque personne. Je tente de mettre un legging en taille 48 où je loge - apparemment - encore mes fesses et mes cuisses dedans (halleilua) et j'arrive à mettre un chemisier noir et blanc à carreaux. Ce look un peu "masculin" m'a toujours plu car selon moi la femme n'a pas qu'une étiquette de "ménagère"de coller sur elle : ménage, repassage, cuisine ... Mais la femme est aussi cet être humain qui porte autre chose que des jupes roses bonbons et du vernis à ongles aux doigts. On a tendance à penser dans notre société que la femme est de telle manière et l'homme de tel façon alors que finalement chaque personne a son style et chaque personne (même traitée du "sexe faible") peut s'habiller comme elle le souhaite.

Fin du moment de philosophie sur notre monde. Le maquillage fait parti des choses que j'apprécie, surtout la fantaisie qui peut se faire avec : essayer de nouvelles couleurs pour mon ombre à paupières ou encore tenter de nouvelles choses au niveau de mes yeux : eye liner, khôl ... J'aime la fantaisie jusqu'à même"craquer" pour des coupes assez "dingues" ou "folles". A ce sujet déjà eu des remarques sur cela "mais qu'est-ce que tu as fait à tes cheveux ?" m'a-t-on déjà dit dans un de mes emplois. La fantaisie a malheureusement tout de même ses limites : je sais très bien qu'il faut quand même faire attention à son cuir chevelu et ne pas trop le "malmener" pour ne pas ... devenir chauve !

Je n'ai pas de petit-copain et ... n'ai jamais eu beaucoup de chances en amour à cause de mon physique. On me rebat assez souvent les oreilles à ce sujet "alors les amours ?", "euh ...comment dire ? rien !"  est ma réponse la plupart du temps. Je trouve ces histoires de couples assez envahissantes comme sujet de conversation dans ma vie. Mon ambition ne réside pas vraiment dans le fait de me marier ou d'avoir des enfants mais dans le fait de faire ce que je veux de ma vie. 

Une fois maquillée et prête, je prends mes clés de voiture et monte dans le véhicule. J'ai toujours eu du mal avec ce moyen de transport car il faut toujours que je prévois un emplacement où j'aurais suffisamment de place pour sortir de la voiture. Conduisant jusqu'à mon lieu de travail, je trouve non sans grande difficulté un emplacement avec assez de place pour que je puisse m'extraire dema prison momentanée.

- Hey salut Sandra ! s'exclame une voix féminine.

- Salut Lolita ! Répondis-je en m'avançant vers elle pour lui fairedeux bisous sur la joue.

Lolita,c'est ma collègue préférée. Je la connais depuis peu mais dès mon arrivée, nous avons eu de suite un bon contact.

- Alors prête pour une journée de travail intensive ? plaisante t-elle.

- Il faut bien et puis ... avec toi c'est bien plus amusant !

Nous rentrons toutes les deux dans le bâtiment. Cette collègue est le genre de fille à toujours blaguer et c'est ce qu'apprécie énormément. Mon moral est souvent au plus bas et elle est là pour me faire retrouver la joie en quelques secondes.

- C'est réunion bureau aujourd'hui ... il parait qu'une nouveauté seprépare, m'explique t-elle dans l'ascenseur.

- Une réunion bureau ? Il y a un problème ? dis-je tout d'un coupnerveuse.

- Non je ne pense pas ... Je crois qu'une nouvelle personne va êtreembauchée, c'est les rumeurs qui circulent.

L'ascenseur est arrivé au bon étage, nous en sortons.

A peine entrées dans la salle d'accueil Angela, l'employée chargée du secrétariat, vient à notre rencontre pour nous saluer.

- Bonjour les filles, vous allez bien ? On va aller en salle de réunion, une nouvelle arrive dès aujourd'hui.

- Ah, tu vois, j'avais raison ! s'exclame Lolita en me donnant un coupde coude amical.

- Pourquoi une nouvelle ? demandais-je à Angela.

- Je ne sais pas, c'est la directrice qui me l'a annoncé en arrivantce matin, à ce sujet nous devons aller dans la salle de réunion.

Nous nous dirigeons donc vers cette pièce tout en discutant. Et le fameux café matinal est bien vite pris autour de la table. Nous continuons à discuter.

- Bonjour à toutes, j'espère que vous avez passé un bon week-end et que vous êtes bien en forme car nous allons commencer la semaine avec une nouvelle recrue, nous interpelle la directrice de l'agence.

Nous tournons ensemble la tête vers la voix qui a coupé notre conversation animée. Une "nouvelle tête" se trouve à côté d'elle, celle d'une très jeune femme brune avec les yeux verts qui baisse les yeux tout en tripotant un cahier.

- Bien, donc je vous présente Wendie, elle sera au niveau de la communication. Sandra, j'ai entendu tes remarques dernièrement sur ton tas conséquent de travail et donc je t'ai trouvé une assistante. Elle sera parmi nous pour valider son diplôme avant tout et peut-être pour un peu plus longtemps si cela se passe bien. Avez-vous des questions ? nous demande notre directrice.

- Pourquoi juste une personne au niveau de la communication ? Et pas au niveau du standard aussi ?

- Malheureusement Angela, mon budget ne me permet pas de payer une personne de plus pour te soulager. Mais si effectivement je peux prendre une assistante pour valider son diplôme également, cela peut être envisageable. Bon, je vous laisse reprendre vos postes, Wendie, je te laisse aller avec Sandra. Lolita, j'ai besoin de te voir au sujet d'une facture, peux-tu venir dans mon bureau s'il te plait ?

Lolita rejoint la directrice et toutes deux quittent la pièce. Angela, déçue, retourne à son bureau pour s'occuper du courrier et autres rendez-vous. Wendie s'approche de moi. 

- Bonjour ... vous vous appelez Sandra, c'est cela ? tente Wendie timidement dans ma direction.

Je continue à observer Wendie. Elle a un chemisier vert émeraude qui fait ressortir ses yeux et un pantalon marron, le tout accompagné de ballerine noires. De vue elle doit faire environ du S voire du M mais pas plus. 

- Bonjour, oui et toi tu t'appelles Wendie.

- Oui, c'est cela ... C'est la première fois que je fais un stage dans une agence, c'est assez intimidant.

- Que fais-tu comme études ?

- Je vais valider un D.U.T Information Communication mais nous n'avons pas eu beaucoup de stages, plutôt des cours théoriques.

Elle dit cela tout en triturant nerveusement son cahier, elle n'est pas à l'aise et cela se voit. 

- D'accord. On va aller dans mon bureau pour que je puisse te montrer sur quels projets nous allons travailler.

Nous marchons jusqu'à arriver à mon bureau, une fois fait, je tends une chaise vers Wendie qui me remercie.

- Bon, ce que je te propose dans un premier temps c'est de me classer tous les dossiers de clients que nous avons. Comme cela ça te familiarisera avec nos projets. Je te préviens, c'est un peu le bazar car notre clientèle est nombreuse et que je suis toute seule à gérer cela.

Je lui sors une grosse pile du placard et je la met sur mon bureau.

- Voilà, voici toutes nos demandes. Elles sont classées par ordre alphabétique. Si cela te va comme première mission, tu peux commencer les ranger dans un classeur. Tu dois pouvoir en trouver dans le placard où nous stockons le matériel. Tiens, je te donne la clé.

J'avance le trousseau vers Wendie et nos doigts s'entrechoquent. Je me sens troublée. Un silence suit et Wendie part, la tête basse, chercher ce dont elle a besoin puis se met au travail.

J'allume mon ordinateur et étudie de nouveau la demande client sur laquelle je travaille depuis quelques jours. Je me concentre dessus et y passe ma matinée, ne me souciant guère de Wendie. 

- J'ai fini ... , annonce Wendie en fin de matinée.

Ne l'ayant pas entendue, je reste concentrée sur mon ordinateur. C'est alors que je sens une main me toucher l'épaule, je sursaute.

- Ne me refais pas cela, j'ai eu vraiment très peur.

- Sandra, excusez moi de vous déranger mais j'ai fini, insiste Wendie.

- Quelle ... quelle heure est-il ? lui demandais-je.

- Presque midi, indique t-elle en regardant sa montre.

- Bien, nous allons prendre notre pause déjeuner, as-tu amené à manger ?

- Oui, je l'ai mis dans le frigo en arrivant.

Prenant nos gamelles dans le meuble et nous nous installons dans la salle de réunion.

- Lolita ne mange pas ici ? demande Wendie.

- Non, elle n'aime pas rester enfermée sur place. C'est une personne dynamique alors, rester dans un bureau pour manger ... ce n'est pas trop dans ses habitudes.

- Et Angela ? Et la directrice ? demande Wendie.

- La directrice a toujours des rendez-vous professionnels pendant les heures de repas, elle mange avec bon nombre de ses collaborateurs. Quand à Angela, sa maison est toute proche, elle préfère y manger tranquillement.

- Oh ... Mais, vous ne mangez pas beaucoup ...

Wendie a les yeux baissé sur ma gamelle composé d'un peu de tomates et de quelques feuilles de salades. Que pouvais-je lui dire ? Que je faisais un régime ? Est-ce qu'elle n'avait pas encore remarqué mon surpoids ? C'était impossible voyons !

- J'ai des problèmes de poids, comme tu as sûrement pu le remarquer ...

- Je vous trouve pourtant très bien comme vous êtes, me sourit Wendie.

Cette remarque me rend mal à l'aise. Je baisse immédiatement les yeux. Une main me touche le bras.

- Vous savez, je connais une personne proche qui a aussi des problèmes de poids et ... Je sais ce que c'est, dit amicalement Wendie.

- Merci, c'est gentil mais ... je n'ai pas trop envie d'en parler maintenant, répondis-je en laissant ma fourchette dans ma gamelle.  

Le poids, le poids, j'ai entendu cela toute ma vie. La fixation de la société sur ce malheureux chiffre et tout ces dérivés : les vêtements, la nourriture, le sport ... Comment rester belle tout au long de sa vie et lutter contre la dégradation du corps et surtout comment éviter que des malheureux bourrelets n'apparaissent.

Enervée et triste, je me lève et part de la salle laissant ainsi ma nouvelle assistante toute seule. J'ai besoin de prendre l'air. Je descends les escaliers et sors du bâtiment. Il fait beau, j'en profite donc pour aller marcher un peu. Le soleil, sa chaleur et ... le chant des oiseaux qui ont apparemment décidé de manifester leurs bonheurs de cet éclaircie contrairement à mon moral qui est au temps pluvieux.

Au beau milieu de mon parcours, j'entend quelqu'un arriver à grand pas.

- Sandra ! Sandra ! Sandraaaa ! appelle la voix.

Ayant reconnu son émetteur je ne répond pas et, comme une gamine boudeuse, je continue à marcher.

- S'il vous plait Sandra, je suis désolée ... Je suis désolée d'avoir abordé un sujet apparemment très sensible pour vous, ajoute Wendie.

J'ai toujours les yeux baissés et ne répond pas. Wendie s'approche de moi, elle est gênée, elle ne sait pas quoi faire pour rattraper sa maladresse. Alors elle sort son portable et me le tend. 

- Vous savez j'ai vu une vidéo assez drôle ce matin, vous voulez que je vous la montre ?

Elle appuie sur « play ». On y voit des scènes assez grotesques, attirée par ses rires, je regarde le petit écran. Je commence également à rire moi aussi. Une fois la lecture finie, je me tourne vers mon assistante.

- Excuse moi d'avoir fait ma tête de mule ... Ce n'est pas facile d'être obèse. Tout le monde pense que c'est uniquement de notre faute alors que c'est juste un comportement différent que celui de fumer ou de boire mais ... au final ça revient au même. Le pire c'est que nous ne pouvons pas vivre sans manger donc ... c'est assez difficile à gérer comme situation.

- Je le comprends ... Je n'ai pas de problème à ce niveau là et j'ai conscience de ma chance. Je connais une personne proche qui a eu des problèmes comme je vous ai dit. Je me suis beaucoup renseignée sur l'obésité et le mal être lié à cela.

- Hey ho les filles ! s'exclame gaiement Lolita en approchant.

Je tourne la tête vers ma collègue et lui fait un petit signe de la main.

- Vous avez décidez d'aller dehors et de profiter du soleil ? Dit-elle en enlevant ses lunettes solaires. Vous avez tellement raison ...C'est si agréable. Ah, il faudrait vraiment que soumettre une proposition pour travailler dehors. Ce serait super !

- Je vais aller me faire un thé à l'agence, est-ce que vous voulez quelque chose ?

- Oh que c'est gentil ! Oui un café s'il te plait Wendie. Et toi Sandra tu veux quelque chose ?

- Je vais en prendre un aussi. Merci. 

La brune s'éloigne de nous, Lolita en profite pour se rapprocher de moi.

- Tu sais j'ai peut-être quelque chose à te proposer ...

- Laisse moi réfléchir, ça concerne mon problème de poids, non ?

- Oh je t'en prie, arrête de toujours être sarcastique ! En fait ma mère a repris contact avec une de ses cousines et elles ont été amenées à parler d'obésité. La fille de cette cousine en souffrait et ... on lui a parlé de se faire opérer de l'estomac tu sais. Tu devrais peut-être en parler à ton médecin.

- De l'estomac ?

- Oui apparemment ça se fait quand on est en grande obésité, tu perds très vite du poids après.

Je reste dubitative à cette pensée. J'ai déjà vu des émissions sur l'obésité et toutes les techniques qui ont pu être réalisées : soudure des dents par un fil aux Etats-Unis, les fameux régimes en pagaille plus ou moins efficace ...

- Tu aurais le numéro de cette personne ? 

- Attends je vais te le chercher.

Les deux cafés nous sont apportés par Wendie. Elle a pris un petit plateau comme les serveurs dans les bar/restaurant, cela lui va plutôt bien, on dirait qu'elle a fait cela toute sa vie.

- Merci Madame la serveuse, tu as déjà travaillé dans larestauration ?

- Oh ... oui à vrai dire mon papa tient un bar, je l'ai souvent aidé à servir les clients, s'empourpre Wendie.

Elle a le rouge qui lui monte aux joues et elle fuit le regard de la comptable. Elle semble dans ses pensées tout en replaçant une mèche de cheveux inexistante. 

-Tu as déjà eu des pourboires ?

- Oui ... ça m'est arrivé.

- Et des numéros ... ?

J'avale le café de travers en m'étouffant à moitié.

- Eh bien alors Sandra ? Qu'est-ce qu'il t'arrive ?

- Je ... j'ai avalé de travers !

- C'est Wendie qui te met dans cet état là ? Il faut avouer qu'elle n'est pas moche cette petite.

L'intéressée rougit tout en baissant les yeux.

- Mais non voyons Lolita, j'ai du être dans mes pensées tout simplement.

- L'appel à projet que tu voulais absolument avoir ?

- Oui ... C'est un si beau projet.

La stagiaire s'éloigne pour apprécier son thé à la menthe.

- Je vois que vous profitez bien du soleil ! s'exclame soudain la voix de la directrice.

- Ah oui tout à fait ! D'ailleurs est-ce qu'il serait possible de ...travailler dehors ? C'est tellement agréable cette météo ! s'enthousiasme Lolita.

- Désolée les filles mais ... nous ne pouvons pas amener les ordinateurs dehors et, au cas où il se mettrait soudainement à pleuvoir, je ne peux prendre le risque de ruiner mon matériel, répond la directrice.

Chapitre 2 

Avec Wendie, nous retournons dans notre bureau sans un mot. J'allume mon ordinateur et un petit message apparaît sur mon compte Facebook. Je n'y prête pas plus d'attention et j'ai soudain une envie présente.

- Je vais aux toilettes Wendie, tu n'as qu'à regarder sur mon ordinateur le projet sur lequel je travaille.

Lorsque je reviens du petit coin, Wendie m'interpelle.

- Votre téléphone portable a sonné durant votre absence. 

Intriguée par cela, je la remercie et déverrouille mon portable. C'est un appel de mon endocrinologue. Je m'absente quelques instants dans le couloir et me rend sur le balcon de l'agence. 

- Bonjour, c'est Madame Paoli au téléphone, vous avez essayé de me contacter.

- Oui bonjour Madame, c'était à propos de votre rendez-vous avec le Docteur Warin, elle est absente la semaine prochaine malheureusement, pouvez-vous le décaler ? 

- Que proposez-vous ? 

- Huuum ... Est-ce que ce soir vous irez ? Elle a une annulation à 18h30 si cela vous convient.

- Oui, d'accord, justement je dois lui parler de quelque chose. 

Je raccroche, pensive de ce changement de programme. Moi qui voulais tranquillement regarder une série en rentrant avec mon traditionnel grignotage devant la télé ... Ca ne m'arrange vraiment pas. Bon enfin, je vais pouvoir parler de l'opération de l'estomac. Il faudrait d'ailleurs que je me renseigne à ce sujet. Tout en étant dans mes réflexions, je retourne machinalement à mon bureau.

- C'est vraiment sympa ce concept de festival !

Je sursaute à la voix de mon assistante, je l'avais presque oublié l'espace d'un instant. Tellement absorbée par mon histoire de rendez-vous. Je suis le docteur Warin depuis quelques années déjà. Je n'ai jamais eu mes règles et ma mère s'est longuement inquiétée à ce sujet. On m'a découvert une maladie : celle des ovaires polykystiques. Apparemment mes ovaires sont ... trop fainéants et cela serait du à mon poids. Mon médecin spécialiste m'a ... conseillé de maigrir (plus facile à dire qu'à faire me direz-vous) car c'est sûrement dû à cela. Ah les problèmes hormonaux !

- Sandra, est-ce que vous m'écoutez ? Il y a un souci ? 

- Je dois noter un rendez-vous pour ce soir.

Je prends mon agenda et note ma nouvelle entrevue je prévois aussi une alarme sur mon téléphone au cas où j'oublierai. J'ai absolument besoin des deux médicaments que me prescrit ce médecin, ce serait vraiment dommage d'oublier ! 

- Je disais que le projet FestOyez est très novateur, mélanger à la fois l'écologie tout en ayant une programmation aussi impressionnante !

- Oui, je suis d'accord avec toi. Veux-tu me proposer ton plan de communication ? Au moins comme cela on comparera nos idées et on avancera ensemble.

- Bonne idée ! 

Plus tard dans l'après-midi ...

- Alors toi tu ferais venir la télévision locale ? Tu as des contacts au niveau de la presse pour faire une interview de la tête d'affiche ? demandais-je à Wendie.

- Dans ma promo il y a le fils du directeur de cette chaine de télévision.

- Oh mais c'est génial ça ! Tu crois que tu pourrais le contacter ? On est une équipe de choc Wendie !

- J'ai déjà son numéro Sandra ... Il a essayé de me draguer pendant l'année scolaire ...

- Oh ... Et tu n'as pas répondu à ses avances ?

- Non ... seules les filles m'intéressent ... Je trouve les garçons tellement peu distingués ...

- Qui est-ce qui n'est peu distingué ? demande une voix en ouvrant notre porte.

- Lolita ! Mais qu'est-ce que tu fais ici ? C'est mon bureau je te rappelle ! On frappe avant d'entrer tu sais ...

- Oh pardon Madame Sandra la bien élevée mais tu sais cest l'heure de débaucher maintenant ! Alors si tu veux continuer à travailler jusqu'à minuit, c'est toi qui vois.

- Ah, mince ! C'est déjà l'heure ... Bon eh bien merci Lolita de nous en avoir fait part. Tu voulais quelque chose ?

- Simplement t'attendre pour t'accompagner à ta voiture si Madame Sandra la bien élevée veut bien de moi comme compagnie.

Wendie rigole et Lolita la rejoint dans son fou rire. 

- Oui, bon ... ok Lolita, excuse moi mais je ne débarque jamais dans ton bureau sans frapper ! Surtout que tu serais capable de me reprocher de t'avoir perturbée dans ton calcul de facture, lui lançais-je de but en blanc.

Wendie rigole encore plus.

- Ce serait effectivement un peu la catastrophe ... répond Lolita.

- Qu'est-ce qui serait la catastrophe ? demande la directrice.

- RIEN, répondons nous toutes en chœur.

- Ah, je vois que c'est l'heure de la débauche ça se sent directement, dit jovialement la directrice.

Prenant nos affaires, nous nous dirigeons devant l'ascenseur.

- Je prends les escaliers les filles, je suis en train d'essayer une nouvelle méthode pour faire du cardio, annonce Lolita.  

Wendie et moi rentrons dans l'ascenseur. Wendie appuya sur le numéro 0 pour nous rendre au rez-de-chaussée. Une fois les portes fermée, mon téléphone sonne, m'annonçant mon rendez-vous. 

- Ah ouf heureusement qu'il est là celui là, j'avais presque oublié ! 

- Oublié quoi ? 

- Mon rendez-vous ... 

Le "ding" de l'ascenseur vient nous signaler que nous sommes arrivées à destination, les portes s'ouvrent. 

- Vous avez un rendez-vous ?

- Quel rendez-vous ? 

La voix de Lolita sonne comme un sous-entendu ... Je ne veux pas en parler à Wendie, pas pour le moment. Ce n'est que mon assistante alors ... Déjà qu'elle est au courant de mon problème de poids je ne vais pas aussi lui dire que j'ai des problèmes hormonaux ! Ca ne la regarde pas voyons ... 

- Un rendez-vous en tête à tête avec ... ma télévision ! 

- Très drôle Sandra, je crois que j'ai une bonne influence sur toi en vrai. Tu deviens de plus en plus rigolotte. 

Nous nous dirigeons vers la sortie, Wendie reste assez silencieuse. Lolita continue à papoter, un vrai moulin à parole. 

- Bonne soirée ... A demain. 

- Tu t'en vas Wendie ? Tu veux que je te ramène ? Où habites-tu ? 

- Non je vais prendre le bus ne vous inquiètez pas, je dois rejoindre ma mère pour faire des courses. Elle m'attend à côté de l'arrêt.

- Ok comme tu voudras, peut-être que demain je te ramènerai, lance Lolita à Wendie avec un clin d'œil.

- Oui peut-être. Bonne soirée. 

Wendie s'en va, avec Lolita nous nous rendons à mon véhicule tout en discutant.

- Bon sinon, entre nous, tu la trouves comment Wendie ? me demande Lolita.

- On a plutôt bien travaillé, je trouve qu'elle a du potentiel et elle va me permettre d'avoir un regard extérieur à nos projets.

- Tu as vu comment elle te regarde ?

- Euh ... non je ne vois pas de quoi tu parles ?

- Oh arrêtes Sandra, elle ne te lâche pas depuis qu'elle est arrivée.

- Mais c'est normal voyons, c'est mon assistante ! 

- Mouais ... bon entre nous moi aussi j'aimerais bien avoir une assistante ou plutôt ... un assistant, sourit Lolita l'air ailleurs.

- N'oublies pas que tu es en couple Lolita, Corentin ne serait pas vraiment ravi de l'apprendre.

Lolita fait la grimace puis elle s'approche de moi pour me faire la bise et me disant à demain.

- A demain Lolita, bonne soirée à toi. 

Sur ce, je rentre dans ma voiture et ferme la porte. Je pose mon sac sur la place passager, je mets ma ceinture et démarre mon véhicule. Je me dirige vers le cabinet de mon endocrinologue, j'espère pouvoir trouver une place. D'habitude c'est toujours difficile pour se garer car c'est en centre ville et je n'habite pas vraiment à côté. Il faudrait que je songe à y aller en bus un jour. 

Au détour d'une rue, un véhicule sort de son emplacement et je mets vite mon clignotant pour me stationner. J'arrive à faire mon créneau et heureusement pour moi j'ai la place pour sortir. J'enclenche le frein à mains, coupe le contact et prends mon sac. Le cabinet médical n'est pas très loin, j'aperçois la plaque dorée "Docteur Warin - endocrinologue". Sonnant, je m'engouffre dans le bâtiment. 

Le secrétariat est juste en face, je m'y rends, m'annonce et m'assois. Quelques minutes plus tard, des voix se font entendre et je vois mon médecin dans l'entrebâillement de la porte. Grande, élancée, cheveux courts bruns dans sa blouse blanche. Elle a la quarantaine mais paraît bien dix ans de moins. Elle s'approche soudain de la salle d'attente. 

- Madame Paoli ? 

- Oui, bonjour docteur. 

Nous nous serrons la main et je la suis dans son bureau. Une fois assises, elle commence à fouiller son ordinateur pour chercher mon dossier et me jette un coup d'œil. 

- Bien, je vous écoute. 

- Voilà, je devais venir vous voir pour le renouvellement de mes médicaments mais j'ai appris aujourd'hui autre chose qui pourrait peut-être m'aider dans ma perte de poids. 

- Oui effectivement, il est urgent d'agir, 120 kilos ... Vous êtes en obésité morbide Madame. Il faudrait vraiment vous prendre en mains. 

- Ma collègue m'a parlé d'une opération que l'on fait au niveau de l'estomac ...

- La chirurgie bariatrique ? 

- Oui ... J'avoue être assez dubitative. 

- Ici, elle est exercée par le docteur Tatzky, je vais vous expliquer comment cela marche. 

Elle me guide vers son divan examen et me demande de me déshabiller. Je m'exécute. Une fois en sous-vêtement, je m'allonge sur son lit médical. 

- Alors, il existe deux types d'intervention médicales pour ce problème de surpoids, une qui consiste en la sleeve et qui est une ablation pure et dure d'une partie de l'estomac. 

Tout en expliquant, elle me touche l'organe concerné. 

- Mais il existe une autre technique qui est le bypass et dans ce cas là on modifie le parcours des aliments par un autre chemin. Dans tous les cas il ne faut absolument pas s'évader dans la nature si vraiment vous voulez vous faire opérer. Vous devez être suivie à vie avec des complétements alimentaires et me visiter chaque mois pour voir l'évolution. Je vous préviens ça coûte une cinquantaine d'euros tous les mois. Je vais écrire une lettre pour le chirurgien. 

- D'accord. Merci. 

- On se reverra d'ici là de toute façon, vous n'allez pas être opérée demain.  

La doctoresse écrit sa lettre et me fait régler la consultation. 

- Bonne soirée et à bientôt. 

Quittant son cabinet, je me dirige vers ma voiture et rentre chez moi avec. Il va falloir que je prévois d'aller voir ce docteur, il faudrait que j'appelle dans la semaine. Tout en étant dans mes pensées, j'ouvre machinalement la porte d'entrée de mon appartement et me débarrasse de mes affaires. J'allume mon ordinateur portable et commence à m'allonger sur mon canapé. 

A peine le temps de flâner sur internet que ma sonnerie retentit. A 19h15 ? Qui est-ce que cela peut être ? Je n'attends pourtant pas de visite. Ouvrant la porte d'entrée je tombe nez à nez avec ... . 

- Salut Sandra 

Je reste scotchée devant la personne qui se trouve devant moi. Grand, élancé, blond, toujours aussi canon. Il a mis un beau pantalon et une veste centré qui souligne sa taille de mannequin. Ses petites lunettes de soleil rondes lui donne des airs de modèle publicitaire pour une grande marque de cosmétiques. Il l'air parfaitement à l'aise, contrairement à moi qui suis tout d'un coup assez tendue ... En chaussettes devant lui, je donne un air plus que négligée. 

- Eh bien alors tu as perdu ta langue ? Pourtant je m'en souviens très bien lors de nos soirées assez chaudes ... 

Je me sens rougir tout d'un coup et en même temps je trouve la remarque assez provocatrice. Le fusillant du regard, j'ose enfin prendre la parole. 

- Tu as un sacré culot de venir te pointer devant ma porte Nathan ! 

La fin de ma phrase a sonné comme une claque virtuelle destinée à la personne qui se trouve devant moi. Mon ex. Oui mon ex, celui qui m'a plaqué pour une fille qui lui avait fait tourner la tête. Autant vous dire que je m'y attendais un peu vu mon physique et surtout ... le sien. 

- Je suis désolée de t'avoir fait du mal ... 

- Comment m'as-tu retrouvé ? Je crois avoir été assez claire lors de notre dernière entrevue. Je ne souhaitais plus de contact avec toi ... 

- Nelly, ta bonne vieille amie ... Je l'ai trouvé sur Facebook. Après avoir longuement insisté, elle a fini par me donner ton adresse. Elle pensait que peut-être cela pourrait t'aider ... 

- Aider à quoi faire ? A me dire que finalement tu n'étais pas si inaccessible pour moi ? Alors que dès que j'ai le dos tourné tu oses coucher avec cette Julia ? 

- Julia et moi c'est terminé tu sais. 

- Bah voyons, elle t'a plaqué alors tu viens te consoler vers la bonne vieille Sandra ... Ah c'est sûr que moi j'ai bien moins de succès avec mon physique ! 

- Ne dis pas cela, je t'ai toujours trouver attirante tu sais ...

- Eh bien il fallait y penser avant. 

Sur ce, je lui claque la porte au nez. Non mais je rêve, parce qu'on a un corps de rêve et un certain pouvoir de séduction on se permet de revenir voir les vieux mouchoirs utilisés en se disant que la personne va l'accueillir avec un grand sourire ? Non mais il m'a pris pour qui ? Pour un trou dans lequel il peut se vider ? Ah non il faudra qu'il fasse un peu plus que cela. Furieuse, j'éteinds mon ordinateur et mon téléphone, je me démaquille en vitesse et enfile rapidement un pyjama et pars me coucher. 

J'arrive avec ma voiture comme tous les matins au pied de l'immeuble de mon agence. Je me trouve assez rapidement une place de parking et jen'aperçois pas Lolita. Perplexe, je me dis qu'elle doit simplement être en retard et me rejoindra directement au bureau. Je marche donc jusqu'à arrivée à l'ascenseur et appuie sur le bouton.

Lorsque la porte s'ouvre, une main me tire à l'intérieur et les portes se referment rapidement. On me presse contre le mur. Intriguée, je tourne la tête vers mon « agresseur ». Wendie me sourit grandement en se rapprochant de moi pour m'embrasser avec passion. L'ascenseur ne semble plus vouloir s'arrêter et elle commence à me caresser le corps. Débutant par le haut, elle ouvre mon chemisier tout en me touchant les épaules puis le décolleté. Je sens mon corps réagir à cet attouchement, mais Wendie ne semble pas vouloir s'en arrêter là. Elle continue son exploration corporelle en me déboutonnant entièrement mon habit. Je me retrouve ainsi en soutien gorge et mon assistante en profite pour me caresser la peau plus franchement et sensuellement. Elle arrive enfin à mon legging et va pour mettre la main dedans .... 

DRIIIIING

Mon réveil sonne, il est 7h30. Je me réveille difficilement de ce rêve ... Rêve ? C'était un ... rêve ? Pourtant j'étais persuadée d'avoir réellement tout senti et ... me sentais clairement excitée par ce que mon inconscient avait imaginé. Mais qu'est-ce qui m'arrive ? Pourquoi ce rêve ? Est-ce que je dois en parler à Wendie ? Est-ce que je vais pouvoir la regarder en face après avoir rêvé tout cela ? 

Je prends directement une douche, les images du songe toujours présentes à l'esprit ... Elles semblent comme partir avec le savon et l'eau. Une fois douchée, je m'empresse de me sécher ma peau et mes cheveux rapidement. L'avantage avec les cheveux courts. Je me fais mon soin de peau quotidien et choisi mes habits. Enfin, je me précipite dans la cuisine mourant de faim presque de mon jeun de la veille. Tout en préparant mon café, je sors les croissants et me fais des tartines avec du beurre et de la confiture. J'avale le tout en vitesse et repars me maquiller. Je file dans ma voiture avec mes affaires et conduis pour aller au travail.

Au moment de me garer, j'aperçois Angela. Je sors du véhicule et lui fais un petit signe de la main, elle s'approche de moi et me fait la bise.

- Bonjour Sandra, comment vas-tu ce matin ? Alors ça se passe bien avec ton assistante ?

Déjà de bon matin, ça me rappelle mon imagination nocturne et je sens le rouge me monter aux joues.

- Bonjour Angela, je vais bien merci. Oui ça se passe plutôt bien pour le moment.

- Ah tant mieux alors ! Tu as bien de la chance tu sais. Moi je rêverais d'avoir quelqu'un sur qui je puisse compter pour me soulager. 

Est-ce que j'ai l'esprit mal tourné ou sa phrase a un double sens ? Je reste muette. 

- Eh bien oui voyons !  Tu as de la chance qu'elle t'aide pour ton travail.

Je la suis à l'intérieur du bâtiment et nous nous retrouvons face à l'ascenseur.

- Je... je vais prendre les escaliers Angela, ça ne me fera pas de mal.

- D'accord Sandra ...

Je prends la porte et commence à monter. Honnêtement je ne me voyais pas reprendre l'ascenseur tout de suite. Vu ce rêve - assez spécial - je suis suffisamment tendue pour ce matin. Je grimpe jusqu'au premier étage et je commence à être essoufflée. Je fais une petite pause. A force de ne pas beaucoup faire d'exercice, mon corps me lâche dès qu'il faut se dépenser un peu. 

- Bonjour Sandra !

Je reconnais la voix et me fige. Je ne sais pas quoi faire ... Affronter la situation ou la fuir ? Telle est la question. 

- Bonjour ... Wendie. 

- Quelque chose ne va pas ? 

- Je ... j'ai fait un rêve assez étrange cette nuit ... 

- Les filles ! Je ne vous paye pas pour papoter dans les escaliers, je vous prierai de monter sur le champs et je ne rigole pas ! 

La voix cinglante de la directrice, comme un eletrochoc, me fait sursauter. Elle était très fâchée. Faisant un signe de tête à mon assistante, nous démarrons l'ascension des différents étages. Durant notre grimpée, je remarque qu'il y a des miroirs sur le mur, je me surprends à les regarder et ...m'aperçoit. Toute cette graisse, je vois Wendie juste à côté de moi et ... la différence est bien notable ! Je me sens mal tout d'un coup ... je me sens ignoble. J'ai envie de pleurer. Wendie, me regarde, inquiète.

- Quelque chose ne va pas Sandra ? 

Les larmes me montent aux yeux. Une main chaude dans mon dos vient me réconforter, je continue à pleurer, épuisée de ce corps qui me complique tant la vie.

- On devrait continuer à monter Sandra, la directrice va vraiment nous tuer, me chuchote Wendie à l'oreille. 

- Oui ... tu as raison, lui répondis-je.

Enfin, l'étage de notre agence apparaît. Wendie passe devant, je lui emboîte le pas. Lolita fait les cents pas dans le couloir, visiblement très nerveuse. Entendant le bruit de la porte, elle se retourne et son visage s'éclaire. 

- Sandra tu es là ! S'exclame t-elle. Tu m'as vraiment fichu la frousse ! Je t'ai cherché partout en arrivant ... Je me suis vraiment demandée ce qui t'arrivais, j'ai essayé de t'appeler et ... je tombe sur la messagerie à chaque fois !

Elle s'avance vers moi et son visage change de nouveau en de l'inquiétude.

- Oh mais qu'est-ce qui t'arrives ma belle ? Tu as pleuré ? Que se passe t-il ? 

- Bon maintenant ça suffit, je vous veux toutes dans votre bureau ou sinon je vous colle des heures supplémentaires, c'est clair ? siffle la directrice. 

Sur son ton menaçant nous nous dispersons pour aller dans nos bureaux respectifs. 


Chapitre 3

- Est-ce que ça va mieux ?

A peine la porte fermée, j'entends cette voix. Entre les informations que mon docteur m'a données hier, le retour de monex et surtout le fait que je me sens tellement grosse ... J'ail'impression que rien ne s'arrangera jamais. Que puis-je répondre àmon assistante ? 

- J'ai l'impression que je vais exploser tu sais ...

- Qu'est-ce qu'il vous arrive ?

- Oh, beaucoup de choses ...

- Est-ce que vous voulez en parler ? Je pourrais peut-être vous donner mon avis.

- Je te remercie mais ... là il faut vraiment que l'on travaille et ça me permettra peut-être de me changer les idées.

Plus tard dans la matinée  ... 

Le discours du docteur Warin me revient en mémoire. Cette femme n'a jamais connu l'obésité ou du moins on ne le dirait pas. On est complexé par sa taille, notre rapport aux autres est toujours délicat car on n'ose pas forcément approcher les gens à cause de notre corpulence. On sait que notre "superficie" est plus grande que la normale et on a peur d'être rejeté. On connait très bien les difficultés à s'asseoir suivant la place dont nous disposons, à se mouvoir ... La position des meubles autour de nous fait que cela devient des fois compliqués et la pire situation réside dans le fait de devoir demander à quelqu'un de se décaler. Oui, nous devons demander aux autres pour se faufiler ensuite telle un poisson cherchant à sortir des mailles du filet. La pire des expériences c'était quand j'étais plus jeune à l'école.  Je mangeais souvent au self et il m'arrivait très régulièrement de devoir demander aux personnes de s'avancer de manière à pouvoir passer derrière leurs chaises ou même déclarer forfait suivant la grandeur du passage. 

- Sandra ? 

Mon assistante me tire de mes pensées. Je crois que je me suis un peu assoupie ...

- Est-ce que vous repensiez à ce rêve un peu spécial ? 

La réalité me claque à la figure et je me sens tout d'un coup gênée ... Je sais que l'on rêve souvent des actions faites durant la journée. Des fois cela porte sur d'autres thèmes, nos peurs, nos fantasmes, nos réflexions face à des situations passées ou ... cela peut être aussi une influence par rapport à l'environnement et les bruits nous entourant lors de notre endormissement. 

- Non pas du tout ...

- Est-ce que ... je peux savoir en quoi il consistait ?

Tout d'un coup on entend quelqu'un frappait à la porte. Lolita entre et se dirige vers moi. Elle me tend un petit papier. 

- Tiens c'est pour toi.

- Qu'est-ce que c'est ? 

- Tu verras bien ... Je file la directrice m'a passé un sacré savon, à plus. 

Je reste intriguée par ce papier ... Un message secret ? Est-ce que Lolita a décidé de prendre un tournant dans sa vie ? Je me tourne vers Wendie et la vois aussi assez interrogative et pensive face à ce présent qui m'est destiné. Je la surprends même à froncer les sourcils, comme si elle était ... jalouse ?

- C'était un rêve sur toi et moi.

La brune tourne le visage vers moi, elle me sourit timidement.

- Et que faisions nous ?

- On allait ... travailler. Très original non ? Plaisanté-je.

Elle rit de ma plaisanterie.

- J'aurais bien voulu savoir en quoi il était si spécial ce rêve alors ...

Elle a un air malicieux et un sourire en coin.

- Et toi de quoi as-tu rêvé ?

Elle détourne le regard, semblant gênée et s'exclame tout d'un coup.

- C'est l'heure de la pause déjeuner !

Ma nouvelle collègue se lève et part en direction du frigo de notre agence. J'en profite pour ouvrir le papier laissé par Lolita. Un numéro de téléphone est griffonné sur le papier, plus bas est écrit « tente ta chance ma belle ». La voix de Wendie résonne, ne comprenant pas ce qu'elle dit, je vais à sa rencontre. 

- Je vous ai apporté un petit livre sur comment mieux s'alimenter ... Je sais que c'est un sujet compliqué à aborder pour vous mais ... Je me suis dit que cela pourrait vous faire tout de même plaisir. 

Je reste à contempler le livre et le feuillette. Il contient des recettes mais aussi des témoignages de personnes ayant été face au surpoids. Des plats ont l'air vraiment appétissants et ... assez simples à faire. Au final cela n'a pas l'air si compliqué ... Je tombe sur une phrase "Le plus dur c'est de changer ses habitudes et ... se tenir à son nouveau mode de vie sans oublier de se faire plaisir de temps en temps". J'entends un petit "ding" indiquant que le repas de Wendie est chaud. Elle s'assoit et ouvre son tuperware. 

- Est-ce que vous en voulez ? C'est une des recettes qui se trouvent dans le livre. 

- Qu'est-ce que c'est ? 

- Riz aux légumes du soleil avec du poulet. J'ai aussi pris des crudités pour l'entrée. Il ne faut pas oublier d'en manger. 

J'accepte la proposition de ma stagiaire et suis assez étonnée du goût. Cela est vraiment agréable en bouche. 

- Tu cuisine vraiment bien tu sais ... 

- Oh vous savez j'ai grandi dans la restauration alors je suis habituée. 

- Est-ce que tu cuisinais aussi dans le bar/restaurant de ton père ? 

- Oui cela m'arrivait, je l'aidais dès qu'il avait besoin et en haute saison la main d'œuvre supplémentaire était souvent nécessaire. 

- Alors draguer avec les clients n'était pas ta seule occupation ... 

La brune me regarde bizarrement. Elle est à la fois contente mais aussi vexée de la remarque. Elle détourne très vite son regard émeraude et baisse les yeux. 

- Excuse moi Wendie, je plaisantais évidemment ... 

- Non vous avez raison j'ai aussi eu des avances. 

- Tu avais beaucoup de succès ? 

- Oui, assez ... 

- C'est normal, une jolie fille comme toi tape forcément dans l'œil. 

Elle me sourit timidement, nous finissons nos assiettes en silence. Je me demande quelle type de personne draguait Wendie, est-ce que c'était des vieux clients pervers ou si c'était des jeunes adultes tout à fait respectables. Et ... si des femmes lui avaient déjà fait du rentre dedans. Je me demande tout à coup combien de personnes ont pu rentrer dans la vie de mon assistante. Est-ce qu'elle est du genre à avoir des relations sérieuses ou ... des coups d'un soir ? Est-ce qu'elle accepte les numéros et les collectionne presque ou détourne t-elle les invitations ? 

- Voulez-vous que l'on aille dehors comme hier ? 

Elle me sort de mes pensées. J'avais presque oublié où j'étais. Je regarde sa gamelle vide qu'elle est en train de laver tranquillement. 

- Oui pourquoi pas. Veux-tu que je te fasse un thé ? Je vais me prendre un café. 

- Oui, merci Sandra. 

Elle fini sa vaisselle et va ranger ses affaires dans mon bureau. Je fais son thé et prépare mon café. En posant les deux gobelets sur la table, je lève les yeux et vois sa silhouette. Je lui souris gentiment, elle tient quelque chose entre ses mains. 

- A vous aussi on laisse des numéros de téléphone ? 

Surprise puis intriguée par cette question, je regarde mieux et ... vois le papier de Lolita. Elle fouille dans mes affaires maintenant ? Je ne sais pas comment je dois réagir : la disputer ou bien être flattée de son intérêt ? Mais si elle se met à regarder tous les papiers qui trainent cela peut être vite gênant ... 

Voyant mon air soucieux et mon absence de réponse, Wendie s'approche de moi et me redonne le papier. 

- Je suis désolée ... Il trainait sur vos bureau ... J'ai été un peu curieuse de savoir ce que cela contenait ... 

- Dorénavant Wendie je voudrais que tu me demande la permission avant de toucher à mes affaires s'il te plaît. 

Cela laisse un froid entre nous. La même ambiance tendue que la veille. Je me dis simplement que si je ne lui met pas un "STOP" elle va commencer à regarder mon ordinateur et ... C'est ma collègue de travail, pas mon amie ni quelqu'un d'intime. On ne mélange pas travail et vie privée ... Et encore même si c'était quelqu'un de proche, fouiller dans les affaires des autres ce n'est pas très correct. 

- On va dehors ? 

Je fourre le mot de Lolita dans ma poche et emmène avec moi le café ainsi que son cadeau dans mon bureau. Je me tourne vers elle et lui fait un petit signe d'approbation. Nous marchons jusqu'à l'ascenseur et j'appuie sur le bouton d'appel. Je suis tout d'un coup assez nerveuse ... Les images de mon rêve me reviennent en mémoire. 

L'ascenseur arrive et Wendie monte dedans. 

- Vous venez ? 

- Je ... Oui, j'arrive. 

Je la suis dedans. Le doigt posé sur la touche "0" elle exerce une pression dessus. Je la regarde, elle se tourne vers moi. Elle sent que je suis tendue alors elle m'interroge du regard mais je le détourne. Nous arrivons vite au rez-de-chaussée et sortons de l'immeuble. 

- Savez-vous que j'ai réussi à avoir un rendez-vous avec le directeur de la télévision ? 

Buvant d'un trait le café qui me restait, je la regarde interloquée. 

- Comment as-tu fait ? 

- J'ai contacté Guillaume, vous savez le garçon de ma promo ... 

- Celui des avances ? dis-je avec un sourcil levé plein de sous entendu. 

Elle me sourit et acquiesce. Son téléphone portable sonne, elle me fait une grimace en guise de pardon et s'éloigne. Je la regarde, pensive, elle s'est attachée les cheveux avec un bandana aujourd'hui cela lui donne un air plus stricte que hier. Elle a mis une jupe, cela souligne ses jambes fines et féminines avec un haut dos nu bleuté. Il faut dire qu'il fait chaud aujourd'hui. Si j'avais sa corpulence, je suppose que je me lâcherais plus vestimentairement parlant. C'est bien le cliché ça : les femmes et les habits une vraie histoire d'amour. 

Mon téléphone sonne également, décidément c'est la journée aujourd'hui. Approchant mon portable de mon visage, je vois marquer "appel inconnu" et je ne sais que faire : répondre ou laisser sonner ? J'opte pour la première solution. 

- Allo ? 

- Bonjour Sandra, comment vas-tu depuis hier ? 

Cette voix ... Mais comment a t-il pu avoir mon numéro de téléphone ? Ne me dites pas que c'est encore Nelly qui lui a donné ! Je commence sérieusement à m'énerver. 

- Sandra ? Tu es trop heureuse de me reparler pour manifester ta joie ? 

- Nathan je t'en prie ! Je n'étais pas suffisamment claire hier ? 

- Je sais que tu es simplement trop orgueilleuse pour avouer que tu es contente de me retrouver. Je t'ai fait du mal et tu attends de moi un gros effort. Mais, au fond de toi, je sais que je te manquais. 

- Est-ce que cela fait si longtemps que tu n'as pas couché ? 

- Pourquoi cette question ? Tu es intéressée ? 

- Parce que tu dois être sérieusement en manque ! 

Sur ce je lui raccroche au nez. Bon je vais tout de même essayer d'enregistrer ce numéro au cas où il me rappelle ... Ah mince ce n'est pas possible avec les numéros inconnus ! Comment est-ce que je vais bien pouvoir faire ?

 - Un problème ? 

La voix de Wendie me ramène à la réalité. Je remarque qu'elle a fini son coup de fil, elle semble inquiète. 

- Je me demandais ... ça vous dit de me raccompagner chez moi ce soir ? 

- Pour ... Pourquoi est-ce que tu me demande cela ? 

- Ne faites pas cette tête voyons ! Ma mère ne peut pas venir me chercher à l'arrêt de bus. Elle doit travailler plus tard. Est-ce que vous pouvez me ramener ... s'il vous plaît ? Je n'ai pas d'autres alternatives, à part appeler un taxi ... 

- Je te conduirai jusqu'à chez toi. 

Sur ce, je m'éloigne et rentre dans l'immeuble. Lolita est au niveau de l'ascenseur. Elle me fait un petit coucou de la main. 

- J'ai eu ton mot, merci pour le contact, je vais essayer d'appeler ce soir. 

- Je t'en prie ma belle, j'espère que cela répondra à tes questions. Tu as l'air soucieuse, est-ce que ça va ? 

- Mon ex a débarqué dans ma vie depuis hier ! 

Tout en discutant, nous rentrons dans l'ascenseur. 

- Comment cela ? 

- Figures toi que l'une de mes meilleures amies lui a donné mon adresse et ... mon numéro de portable, dis-je en lui montrant mon téléphone. 

- Appel inconnu ... Il est sur une ligne privé ? 

- Il faut croire oui ou du moins je n'arrive pas à connaître la ligne ... Et évidemment je ne peux pas bloquer l'émetteur tant que je suis dans cette ignorance. 

- Il est si horrible que cela ton ex ? Tu ne m'avais pas parlé de lui jusqu'à présent. 

- Il m'a laissé tomber comme une vieille chaussette quand il a rencontré sa JULIA. 

J'ai presque hurlé le nom. Il est vrai que la manière dont nous nous sommes séparés m'a laissé très froide. Je l'avais pris en flagrant d'élit dans notre "chez nous" alors que je rentrais plus tôt de mes cours. J'avais entendu des gémissements. Au début je pensais que c'était un film mais plus je me rapprochais de la chambre et plus ces bruits devenaient audibles. J'avais fini par ouvrir la porte et ... tombai sur un Nathan allongé sur notre lit avec une fille rousse à califourchon sur lui, elle ne me voyait pas mais ... moi je la voyais très bien. 

Nathan était très excité et il fermait à moitié les yeux face aux pressions de la jeune demoiselle. Je décidai d'abréger la scène par un raclement de gorge. 

- Je suppose que ça veut dire que c'est fini entre nous ? 

Je n'ai pas attendu de réponse et j'ai claqué la porte aussi fort que possible, quittant par la suite l'appartement qui n'avait plus aucune importance pour moi puisque que mon cœur était détruit. La suite c'était fait par un rendez-vous pris pour récupérer mes affaires et vendre les différents cadeaux que Nathan m'avait offert. J'avais trouvé par la suite mon appartement actuel, bien moins spacieux certes, mais qui n'avait pas fait l'objet de tromperie. Je m'étais aussi réfugier dans la nourriture ... comme bien des personnes lors d'une rupture amoureuse. 

Mes parents m'avaient bien sûr aidé en se portant caution. La bonne chose c'était que j'étais sur le point de valider mes études et donc cela n'a pas mis très longtemps pour que je trouve un travail et finisse par pouvoir payer mon loyer sans gros souci et devenir totalement autonome. 

- Bon on va peut-être éviter le sujet. On se retrouve ce soir ça te va ? 

- Je ramène Wendie ce soir ... 

- Oh, mais ça ne nous empêche pas de parler, si ? 

- Non, bien sûr que non. 

- Allez je file, à tout à l'heure. 

Je rentre dans mon bureau et m'écroule sur mon fauteuil. Je repense tout à coup au livre offert plus tôt, je le sors de mon sac à main. 

"A Sandra, en espérant que cela vous aide. Amicalement, Wendie"

Souriant à cette lecture, je remarque des chiffres écrits en bas de la page.C'est un numéro de téléphone ... Mon assistante m'avait laissé son numéro. 

-Quelque chose vous fait sourire ?

- Oui, je viens de voir que tu m'as laissé ton numéro de téléphone.

- Je me suis dit que ce serait plus simple si on voulait se joindre, non ?

- Parce que tu compte m'appeler la nuit ?

Wendie rigole.

- Non pas vraiment, mais prenez l'exemple de ce soir, si j'ai un problème pour retourner chez moi, au moins je sais que quelqu'un peut me ramener.

- Oui, en espérant que cela ne devienne pas non plus une habitude ou sinon ... ce sera du covoiturage.

Tout en rigolant, nous nous remettons au travail. L'après-midi défile à une allure vertigineuse. Nous avons réussi à contacter le directeur de la chaîne audiovisuelle et il a accepté de nous rencontrer. Je vais pouvoir donner suite à mon client. 

- Veux tu rédiger le courriel ? Après tout il faut que notre client sache que tu es aussi sur le projet.

- Oui, volontiers. Je dois signer de mon nom ?

- Bien sûr. Je te laisse écrire, je dois juste passer un coup de fil. 

Je m'éclipse et compose le numéro indiqué par Lolita. Je tombe finalement sur la messagerie. 

- Oui bonjour, excusez moi de vous déranger, je m'appelle Sandra, Sandra Paolie. Je travaille avec Lolita, votre cousine. Voilà, elle m'a donné votre numéro car j'ai des gros problèmes de surpoids. Je souhaiterais avoir un témoignage par rapport à l'opération, pouvez-vous me rappeler au 06 00 00 00 00 ? Je vous en remercie beaucoup. Au revoir. 

Je raccroche et retourne auprès de mon assistante. Elle vient juste de signer le mail "Wendie Stellia, Assistante chargée communication". Cela me rappelle les différents stages que j'ai effectué lors de ma formation, mais malheureusement on me laissait pas vraiment signer en mon nom. Je trouve cela vraiment dommage car ... ça permet au stagiaire de se responsabiliser et de lui donner de la valeur surtout. Rares sont les boîtes qui font cela. 


Chapitre 4 


Sur la route avec ma collègue, j'enchaîne les feux tricolores. Cela fait dix minutes que nous avons quitté le parking de l'immeuble et ... le trafic est vraiment dense.

-  Est-ce que ton université est aussi loin par rapport à chez toi ?

-  Non, je n'ai pas trouvé d'entreprises intéressées par une stagiaire sur une zone géographique plus réduite. Je n'ai pas l'argent pour m'acheter une voiture et ... encore moins pour passerle permis. C'est difficle d'être autonome vous savez.

- Ne m'en parle pas, moi j'avais un copain à l'époque ...

- Un copain ? Est-ce que c'est Nathan ?

- Comment sais-tu son prénom ?

- Je vous ai entendu tout à l'heure l'hurler ... Je me suis doutée que c'était soit votre ex soit votre actuel copain ... Ou alors quelqu'un de proche. 

Rougissant tout d'un coup, je ne savais pas quoi répondre. Savoir que Wendie avait entendu une conversation privée me mettait un peu mal à l'aise. Il est cependant vrai que je n'avais pas ménagé ma voix et ... sûrement beaucoup de personnes m'avait entendu crier. 

- Ce n'est pas grave vous savez ...

- Est-ce que tu as une copine toi ?

- Je ... non

- Oh c'est un sujet délicat ?

Wendie ne répond pas, je continue ma route à travers les voitures. Je la vois tourner la tête du côté de sa fenêtre et aperçoit de l'humidité sur son visage. Je rêve ou elle pleure ? Mince ! J'ai dû entamer le sujet qu'il ne fallait pas. Me mordant la lèvre, je prends la première rue à droite et réussi à me stationner dans un parking.

- Wendie, regarde moi s'il te plait.

Le visage en larmes, elle tourne la tête vers moi. Je me sens mal, très mal. Je tend une main vers elle et lui caresse tendrement la joue. 

Elle ne bouge pas et semble anéantie. Je détache ma ceinture et tend les bras vers elle. Elle vient se blottir contre moi. Bon, j'avoue que je me sens assez coupable de l'avoir faite pleurer même si c'est une relation de travail. Je n'ai pas envie de la ramener chez sa mère en sanglot. Je la berce tendrement et j'entends sa respiration s'apaiser. Elle se met à bouger un peu, je lâche alors la pression de mes bras sur son corps.

- Est-ce que ça va mieux ?

- Je ... Oui, merci.

Elle ne sait pas où regarder. On se sent toujours un peu bête quand onpleure, on ne sait pas si on doit regarder la personne, l'éviter duregard et puis c'est toujours gênant de pleurer ... Mais, les nerfs craquent et on ne peut pas lutter contre le chagrin. 

- Je vais reprendre la route. 

Je remets ma ceinture de sécurité, enlève le frein à main, passe ma vitesse et ... continue mon trajet. Je récupère l'axe initial et me retrouve en plein bouchon. Ah les fameuses heures de débauche et d'embauche ... Toujours la même galère. A croire qu'on fait tous "tut tut" au même moment et qu'on se croise toujours pour faire également "tut tut" sur la route des vacances ! Je me souviens que quand j'étais plus petite, pour ne pas être embêtée, mon père conduisait de nuit. J'appréciais vraiment le paysage, les étoiles, le coucher de soleil et puis cette agréable "bruit" de la nuit. Vous savez, quand rien ne se produit, que c'est le silence totale car ... tout le monde dort. J'adorais ces moments là. 

- Elle est morte. 

Retour à la réalité. Je suis pétrifiée de ce que je viens d'apprendre. Est-ce que je dois dire quelque chose ? Je ne sais pas ... Morte ? Sa petite amie est ... morte ? Mais comment ? Pourquoi ? Je comprends d'autant plus son chagrin et ... me sens très bête d'avoir abordé le sujet. Quelle cruche franchement ! Quelle situation horrible se doit être ... Et moi qui parle de mon ex qui m'a trompé alors que finalement c'est quand même moins terrible, bien que ce soit quand même brutal. 

- Ne vous forcez pas à répondre vous savez ... C'est toujours la même chose quand on dit aux personnes que quelqu'un est mort. On vous dit directement "je suis désolé" ou bien "toutes mes condoléances" alors que au final ... personne ne connaissait l'être décédé. 

- C'est une manière gentille de manifester son empathie pour la personne qui subit ce fait tu sais ... 

- Oui je sais mais ... jamais quelqu'un sera réellement qui était cet être humain. Si c'était une bonne ou une mauvaise personne. 

Stupéfaite de la maturité de mon assistante, je reste songeuse. Je n'avais jamais réellement réfléchi à cela au fond de moi. Bon comment puis-je changer la conversation ? En parlant d'autre chose peut-être ? Oui, cela semble assez logique. Note à moi-même : essayer d'être intelligente des fois. En attendant cela ne me dit pas comment faire pour détendre l'atmosphère. 

- On s'attache aux personnes, on ne pense jamais qu'elles vont partir et ... quand elles ne sont plus là, c'est juste à ce moment qu'on les pleure. On ne dit jamais assez souvent des mots doux aux êtres aimés. On pense être invisibles, que le temps ne nous fera rien mais ... nous allons tous mourir un jour. La pire des choses c'est de savoir que la personne morte s'en est allée sans être apaisée de sa tristesse ... 

Les minutes défilent, je n'ai toujours pas répondu au monologue très réfléchi de Wendie. Je comprends mieux certaines choses à son sujet. Je la trouve courageuse de continuer sa vie après avoir vécu un tel drame. Cela doit être très dur ... 

- On y est. 

Une petite maison aux volets verts apparait dans mon champ de vision. Il y a un petit jardin bordé de buissons et de fleurs. Apparemment sa maman doit avoir la main verte ... Je me gare à proximité. Elle détache sa ceinture et se tourne vers moi. 

- Merci Sandra, c'est très gentil à vous de m'avoir raccompagné. Je vous dis à demain. 

Je la vois commencer à ouvrir la porte et sortir sa jambe. 

- Attends, est-ce que ça va ? 

Elle fait un arrêt dans son action, me regarde et se force à sourire. 

- Ne vous en faites pas, cela passera sûrement un jour. 

Sur ce, elle finit de s'extraire du véhicule, claque la porte et marche jusqu'à son perron. Elle farfouille son sac, un sourire s'affiche sur mon visage en pensant que les hommes osent nous dire "un sac de femme c'est tellement un four tout" mais au final ... ils sont toujours bien contents quand on a des "affaires en trop" suivant les situations. Elle en sort un objet métallique, cela semble être une clé et l'insère dans la serrure.  Je l'observe jusqu'à ce qu'elle ouvre la porte et rentre chez elle. 

Restant pensive, je reprends ma route et rentre chez moi. Le flux du trafic s'est calmé et j'allume la radio pour me changer les idées. Les tubes s'enchainent au fur et à mesure de mon trajet. J'en chantonne certains, j'avais déjà rêvé à une époque de devenir chanteuse. Je connaissais d'ailleurs des amies qui s'intéressaient fortement à la musique. Un bruit de mon portable me sort de mes pensées. J'attends de pouvoir me stationner et regarde l'objet. 

Nelly Bourc : "Salut Sandra, as-tu eu mon message Facebook ? Nathan cherche à te contacter" 

Ah cette chère Nelly, je l'avais presque oublié. Depuis ma séparation avec Nathan on s'était assez éloignées. Elle était venue quelques fois dans mon appartement mais notre lien a vite coupé court. Je lui en voulais de prendre souvent la défense de Nathan. Son discours résidait dans le fait que j'étais trop obnubilée par mon poids et que, par conséquence, mon ex avait cherché à assouvir ses besoins naturels ailleurs. D'après elle ce n'était que ma faute. Autant vous dire que cela ne m'a pas trop plu et donc ... je me suis un peu éloignée d'elle. 

Je m'empresse de l'appeler directement. 

- Allo Nelly ? C'est Sandra. Je me suis dis que t'appeler directement serait plus simple. 

- Sandra ! Je me suis inquiétée ... Est-ce que tout va bien ? Je sais qu'on est en froid depuis quelques temps déjà mais ... Nathan m'a recontacté. 

- Oui, je suis au courant, tu lui as d'ailleurs bien donné mon numéro de téléphone et ... mon adresse postale ! 

- Arrête de faire ta rabats joie Sandra, j'ai pensé à toi avant tout. Tu étais tellement déprimée après ta rupture ... Je me suis dit que ce serait peut-être le moment pour vous deux de mettre les choses à plat. 

- Tu aurais quand même pu me demander mon avis ... 

- Toujours aussi caractérielle, tu n'as pas changé. 

- Bon ok Nelly, peut-être que effectivement je dois m'expliquer avec lui mais franchement je n'en ai pas envie. 

- C'est toi Sandra qui est partie sans le laisser argumenté je te rappelle et tu te plains toujours d'être la victime. Tu penses que ton problème de poids est le centre du monde et que personne ne peut s'intéresser à toi. Ouvre les yeux voyons ! 

Cette réalité m'éclate à la figure. Je reste assez choquée de la répartie de mon amie. Il est vrai que je ramène souvent les choses à mon poids mais ... elle ne peut pas savoir ce que c'est que d'être obèse. Nelly c'est la copine qui n'a pas de problème pour se trouver un copain au moindre claquement de doigts. Elle dégage un charme naturelle qui fait que tout lui sourit, pas étonnant qu'elle se soit mise à son compte et surtout qu'elle y arrive bien. Elle sait user de ses charmes. 

- On reprendra cette conversation une autre fois s'il te plaît. Je rentre chez moi, j'ai besoin de calme, cette journée a été assez mouvementée. 

- D'accord, cela m'a quand même fait plaisir de te reparler. 

- A moi aussi. Bonne soirée. 

Raccrochant le téléphone, je reprends la route et arrive dans mon parking privé. Mes affaires prises, je ferme la voiture et rejoins les escaliers. Arrivée à l'étage je rentre dans mon studio, dépose mes affaires et m'allonge sur mon canapé. Je finis par m'assoupir. 

Je sens des mains me caresser le visage, je me décale pensant qu'il s'agit d'une illusion mais le toucher reprend et une palpation commence à se faire au niveau de mon décolleté. Malgré le fait que j'ignore si je suis en plein rêve ou si cela a vraiment lieu, mon corps commence à réagir. Je crois qu'au final je me fous un peu de savoir si mon esprit est encore en train de délirer ou si cela se passe vraiment. Je me laisse aller à cet attouchement. Jusqu'à ce que la main descende plus franchement sur mon entre jambe et je me mets à gémir "Wendie". 

C'est alors qu'un raclement de gorge me fait ouvrir les yeux. Nathan est devant moi, la main dans mon pantalon et je suis un peu choquée de la situation. J'ai envie de protester mais il me caresse plus intensément. Sa bouche se colle à mon oreille et il me murmure "laisse toi aller". Je lâche alors prise et le laisse me mener au plaisir. 

Me remettant de mes émotions, il vient m'embrasser et me chuchote à l'oreille : 

- Cela m'avait manqué tu sais. 

- De quoi ? 

- Te voir prendre du plaisir. 

Notre baiser s'intensifie et il se colle à moi. Je ne sais plus trop où j'en suis. Je suppose que j'ai toujours gardé une attirance pour Nathan, il est vrai que - au vu de son physique - il n'a rien de repoussant. Puis il s'écarte de moi et me regarde gravement. 

- Qui est Wendie ? 

- Je ... 

- Laisse moi au moins savoir qui est l'heureuse élue de tes fantasmes. J'ignorais que tu étais lesbienne ou alors ... bisexuelle peut-être ? 

- Ecoutes, je ne sais pas, cela ne me l'avait jamais fait avant. 

- Ou peut-être que tu le refoulais tout simplement par ... peur d'être rejetée à cause de ton physique ? 

Je reste silencieuse face à son interprétation. Il est vrai que mon physique a toujours été mon pire cauchemar. Et je suppose aussi que mon ex ou plutôt, au vue de la situation, mon amant avait raison. Comment peut-on savoir si on a des vues sur une fille ? Parce qu'on la trouve jolie ? Mais alors si on trouve une fille jolie, on voudrait secrètement coucher avec elle ? 

Voyant que je suis perdue, Nathan se rapproche de moi et me pose un baiser sur la bouche. 

- Tu ne me satisfaisais pas assez. 

- Quoi ? 

- On ne faisait pas assez l'amour tous les deux, c'est pour cela que j'ai couché avec Julia. 

Je le regarde avec de grands yeux ahuris. Les mecs ont toujours la réputation de ne penser qu'à ce qui se trouve entre leurs jambes, du moins la plupart mais j'ignorais que Nathan avait un si grand appétit de ce côté là. Je réfléchis aux différentes fois où nous avions couché ensemble. Au début de notre relation j'étais assez réfractaire à cela car - à cause de mon corps - j'avais peur qu'il ne me désire pas. Il avait essayé de me mettre en confiance petit à petit. Mais il est vrai que mes vieux démons persistaient encore et toujours. La date de notre dernier ébat ne me venait même plus en mémoire ... 

- Il va falloir que tu te mettes dans le crâne que si tu sors avec quelqu'un, par définition la personne te désire. 

- C'est bien joli de dire cela quand ... on a un corps comme le tien et tu t'en joue bien. 

- C'est vrai que Julia n'a pas été difficile à convaincre mais ... elle était un peu trop parfaite à vrai dire. Trop mannequin tu vois ? 

- Oh je vois très bien ... tu préfère sortir avec les gros thons c'est ça ? 

Il rigole et me met une petite tape sur la joue. 

- Arrête de dire des sottises. J'aime tes formes même si je sais que tu es en trop grand surpoids. Que dirais-tu de faire du sport de chambre avec moi ? 

Nathan tout crachait ! Quand il devient un peu trop romantique, il en profite pour partir sur la provocation histoire de montrer que c'est lui le mâle. Ah je vous jure ces hommes des fois ... 

- La proposition est vraiment alléchante ... mais là tout de suite j'ai besoin de manger quelque chose. 

- Viens donc me manger moi. 

Je sors sa main de mon legging et me lève du canapé, filant à la cuisine le plus vite possible. Il se lève et s'interpose devant moi. 

- Dis moi qui est Wendie. 

- Je n'ai pas envie d'en parler maintenant Nathan. 

- Ah bon ? Tu ne veux pas faire un plan à trois ? Mais pourtant ce serait génial tu aurais les deux personnes que tu désires. 

- Nathan arrêtes s'il te plait. 

- Ose me dire que tu n'as pas pris du plaisir il y a quelques minutes ... 

- Je ... Oui je l'avoue ... Merci pour cela. 

- Tout le plaisir est pour moi ma belle. 

Je sors le livre de recette donné par Wendie et commence à énumérer les ingrédients nécessaires. 

- Tu fais un régime ? 

- Un rééquilibrage alimentaire. 

- Oh ... C'est nouveau ? 

- Je vais aller voir un chirurgien dans quelques temps. 

- Un chirurgien ? Réfléchis bien avant de te lancer là dedans. 

- Justement je veux me renseigner avant de subir. 

Son téléphone se met soudain à sonner, il décroche et se met en retrait. Quelques minutes plus tard, alors que je m'atèle à préparer mon repas du soir, il revient vers moi. 

- Je dois y aller, ma mère veut absolument me voir. 

- Comment es-tu rentré ? 

- La porte était non verrouillée, tu devrais faire attention à ce sujet. Histoire de ... ne pas te retrouver avec beaucoup d'hommes dans ton lit ! 

- Je préfère les femmes. 

Choqué de la réplique, il me lance un regard qui résume parfaitement son émotion. Il prend ses affaires et s'en va. 


Chapitre 5

Je laisse les ténèbres m'envahir et la douleur être de plus en plus présente. Mon cœur me fait de plus en plus mal et mon regard se fixe vers un point imaginaire. Mon âme semble comme sortir de moi-même. Je ne dirai rien parce que je pense que cette souffrance m'est destinée et que, apparemment, je la mérite. Parce que je dois aimer me faire du mal, parce que je dois fantasmer sur ...

DRIIIING

Décidemment ce réveil est toujours aussi violent chaque matin. Quand à mes songes ... toujours aussi étranges. Appuyant sur l'alarme assourdissant, je me lève. La soirée dehier c'était fini par un repas assez savoureux je dois l'avouer. Mégane, la cousine opérée de Lolita, m'avait rappelé. Nous avions longuement discuté ensemble de son témoignage, elle m'a vivement conseillé de prendre un premier rendez-vous avec le chirurgien car «cela ne vous engage à rien» m'avait-elle certifié.

Le livre sur le rééquilibrage alimentaire a de nouveau suscité mon intérêt hier. Il était écrit que le matin nous devons manger essentiellement des féculents et des matières grasses et étonnamment le bon vieux beurre bien gras est vivement conseillé à l'instar de la margarine. Eviter le sucre autant que possible, à part si on veut se faire plaisir une fois de temps en temps évidemment. J'ai utilisé un petit cahier pour noter ces recommandations. Après tout, si je peux perdre du poids d'ici marencontre avec le chirurgien ce sera toujours ça de pris !

Je déjeune rapidement avec mes nouvelles habitudes et file me préparer. Je plante un petit miroir portatif devant moi et ... observe mon reflet sur celui fixe de ma salle de bains. C'est vraiment étrange comme sensation, on ne se verra jamais en "vrai" de toute notre vie. On sera toujours "prisonnier" de notre corps et on ne sera jamais quel effet cela produit de se "rencontrer". Jamais nous ne pourrons nous admirer autrement qu'à travers un objet réfléchissant qui en plus nous renvoie une image ... inversée de nous-même. A part se filmer bien évidemment nous serons toujours "prisonnier de notre corps". 

Sur cet avis philosophique, mes vêtements du jour sont choisis à la hâte et je sors à grands pas de mon appartement, n'oubliant pas de bien fermer la porte cette fois-ci. Rejoignant ma voitures, j'arrive en quelques minutes au parking et me gare. 

Une voiture s'approche, je distingue la silhouette de Wendie en sortir. Elle fait un geste de salutations de la main. M'avançant vers elle, elle se retourne et me voit. 

- Bonjour Sandra, dit-elle avec un petit sourire timide. 

- Bonjour, est-ce que ça va aujourd'hui ?

Elle se mordille la lèvre et fait un signe d'acquiescement.

- Je m'étais inquiétée pour toi hier.

- C'est gentil, merci. 

C'est dans une ambiance un peu tendue et embarrassée que nous rejoignons notre agence. 

- Bonjour les filles. 

- Bonjour Angela, dit-on de concert. 

- La directrice est malade aujourd'hui, elle m'a donc chargé de "prendre la relève". Bien, étant en sous-effectif ou du moins pas totale, je vais avoir plus de tâches à faire aujourd'hui. Wendie, est-ce que tu peux exceptionnellement venir m'aider ? 

- C'est-à-dire que normalement je dois m'occuper de la communication ... 

- Mais tu répondras au téléphone, tu écriras des lettres, tu trieras le courrier, cela aussi fait parti des tâches de ton métier. Tu n'auras pas forcément quelqu'un qui s'en occupera. 

- D'accord ... 

Je laisse mon assistante entre les mains de ma collègue. Cela me permettra peut-être de réfléchir et de prendre du recul. Rentrant dans mon bureau, j'allume mon ordinateur et me met rapidement au travail. 

Plus tard dans la matinée ... 

J'entends qu'on frappe à ma porte. N'étant pas sûr que cela venait de ma porte, je me lève et l'ouvre. 

- Excusez moi de vous déranger, nous venons de recevoir un appel de notre client. Seriez-vous disponible demain après-midi ? 

- Tu sais Wendie, tu peux utiliser le téléphone fixe pour me demander cela. 

Elle baisse les yeux, je l'ai vexée je crois. 

- Oui je sais mais ... je voulais vous parler. 

- Entre alors. 

Franchissant la porte, je la laisse s'engouffrer dans mon bureau et ferme derrière elle. Elle se triture les doigts, elle est nerveuse et cela se voit. Elle a un joli collier autour du cou, une sorte de chaine, je n'arrive pas à voir le pendentif, il est à l'intérieur de son décolleté. 

- Est-ce que cela vous dirait de venir prendre un verre avec moi ce soir ? dit-elle en regardant le sol. 

Surprise de la demande, je reste la bouche ouverte devant elle. Je me ressaisis rapidement et essaie de réfléchir à mon programme de ce soir. 

- Huum ... oui si tu veux, je n'ai rien de spécial à faire. 

- Je me disais que ça pouvait être sympa et puis ... on pourrait peut-être apprendre à mieux se connaître. 

- Tu sais, on ne fait que travailler ensemble ... 

- Oui, je le sais mais ... j'ai l'impression que souvent nous avons des accrochages alors ce serait peut-être l'occasion de mettre les choses à plat. 

Tout d'un coup la porte s'ouvre assez brutalement, Angela apparaît dans son entrebâillement. 

- Wendie s'il te plait ! C'est déjà assez difficile aujourd'hui. Je suis inondée de coups de téléphone pour reporter des rendez-vous. Viens tout de suite à l'accueil. 

Elle est furieuse et stressée. Il est vrai que n'étant pas une grosse entreprise, il suffit que l'une d'entre nous soit malheureusement malade et ... c'est la panique ! La création de la boîte date de quelques années. Son concept était de prouver que les femmes pouvaient très bien réussir sans les hommes et surtout de ne pas pratiquer le fameux écart de salaire entre homme et femme. Ma directrice en faisait un point d'honneur : pourquoi une femme gagnerait-elle moins qu'un homme alors qu'elle fait exactement le même travail voire même dans des conditions plus difficiles ? A ce que l'on sache les hommes n'ont pas encore leurs règles et donc des conditions de travail plus dures. Cette conception de l'infériorité du sexe m'a été toujours été insupportable. Nous avons prouvé notre efficacité et notre compétence. Mais nous sommes malheureusement encore relié à cette vieille idée que la femme est "la ménagère". 

- Je ... J'arrive ... 

- Non maintenant Wendie, pas dans cinq minutes. Si tu veux parler à Sandra aujourd'hui il faudra attendre la pause déjeuner.

- Angela, c'est bon, laisse la. Elle n'est là que depuis deux jours, ne va pas la stresser. Prends une pause, va changer d'air, je vais venir prendre la relève avec Wendie. 

La standardiste baisse les yeux et s'en va. 

- Viens, on va aller au pôle accueil. 

Reconnaissante, Wendie me sourit et m'emboîte le pas. Je m'installe sur le fauteuil d'Angela et remarque que c'est le bazar complet sur son bureau. Le téléphone sonne. Je décroche. 

- Fem'Events bonjour, Sandra à votre écoute. 

- Sandra ? Qu'est-ce que tu fais au standard ? 

- Salut Lolita, Angela commençait à craquer, je l'ai envoyé se prendre un pause avant qu'elle ne stresse tout le monde. 

Elle rit au téléphone. 

- Tu vas bien ? Je ne peux pas me rendre à l'agence pour le moment, je vais à la banque vu que la directrice est absente. 

- Oui ça va merci. Je suis avec Wendie, elle change de poste un peu aujourd'hui. 

- Ok ma belle, je voulais m'assurer que tout aille bien. J'arrive dans l'après-midi. On va essayer de gérer cette situation le mieux possible. 

- Ne t'inquiète pas, on y arrivera très bien. 

Sur ce, je raccroche le téléphone. Le clignotant rouge indiquant des messages vocaux enregistrés s'affiche. 

- Wendie, je te propose qu'on se répartisse les tâches, tu écoutes les messages vocaux en notant la date, l'heure, les coordonnées et l'objet du message et moi j'essaie de ranger tout ce tas. 

Je dis cela en désignant la masse de papiers qui se trouve sur le bureau d'Angela. Je montre à mon assistante la manipulation pour écouter les messages et lui tend un petit carnet. 

Des lettres, essentiellement des factures ou des demandes de prises de contact avec la directrice se trouvent sur le meuble. Je les trie par catégorie et m'attaque par la suite aux courriels et y réponds rapidement. 

- Nous avons quatre messages vocaux de différents collaborateurs. Leurs rendez-vous étaient planifiés pour aujourd'hui avec la directrice. 

- Tu as noté les numéros de téléphone ? 

- Oui bien sûr. 

- Bien, rappelles les. L'emploi du temps de la directrice se trouve dans ce carnet noir. 

Je lui montre l'objet et elle contacte les différentes personnes. Elle se débrouille vraiment très bien pour cela. Je suis assez impressionnée de voir l'aisance avec laquelle elle fait cela. 

- Quelle fluidité ! Comment fais -tu cela ? 

- J'ai l'habitude vous savez. Je faisais très souvent cela quand je travaillais avec mon père. Nous avions beaucoup de clients qui commandaient à la dernière minute. Il faut savoir être réactif. 

En dix minutes elle a réussi à déplacer tous les rendez-vous annulés. Angela, plus détendue, nous rejoint avec sa tasse de café. 

- Vous vous en sortez les filles ? 

- Très bien, on t'a bien avancé. 

Elle se rapproche de Wendie. Je la sens fébrile et mal à l'aise. 

- Excuse moi pour tout à l'heure je ... tu sais ce n'est pas facile. J'ai déjà beaucoup de travail quotidiennement ... 

- Ce n'est pas grave Angela, je comprends que cela vous mette la pression. 

Wendie met sa main sur l'épaule en signe d'empathie. 

- En parlant de rendez-vous, quand est celui du directeur de la télévision ? 

- Vendredi soir. 

- Tu me diras l'horaire précis, je dois t'accompagner en tant que tutrice de ton stage. 

- Vous allez devenir célèbres ? rigole Angela. 

- Mais ... nous le sommes déjà ! plaisanté-je. 

Riant de bon cœur, cela nous permet de souffler un peu de la situation. 

- Bon, je vais retourner à mon travail, je te laisse ma très chère assistante, dis-je à la standardiste avec un clin d'œil. 

- Fais attention que ... je ne te la pique pas. 

Je retourne dans mon bureau et note sur mon emploi du temps le rendez-vous de vendredi. Le téléphone sonne tout d'un coup. 

- Oui ? 

- Il y a ton client au téléphone, peux-tu le prendre s'il te plait ? 

- Oui bien sûr. 

- Allo ? 

- Oui bonjour Monsieur Farbe, c'est Sandra Paoli à l'appareil. 

- Oh bonjour Madame Paoli, je vous remercie de m'avoir tenu au courant pour mon projet. 

- Je vous en prie ! 

- J'ai noté que vous seriez deux ... 

- Oui tout à fait, mon assistante et moi-même. Je trouve cela intéressant pour elle de participer à nos projets. 

- Vous avez bien raison ! Est-ce que vous êtes disponibles toutes les deux pour demain soir ? 

- Oui tout à fait. A quelle heure ? 

- Huum ... est-ce que 17h vous conviendrez ? 

- Oui tout à fait je vais prévenir mon employeur de cela. Je vous souhaite une bonne fin de journée et vous dis à demain. 

- A demain Madame, merci. 

Je raccroche le téléphone et note également ce rendez-vous. Je compose le 01, numéro interne du standard. 

- Wendie ? 

- Oui ? 

- Peux-tu te noter que demain nous avons rendez-vous à 17h  avec Monsieur Farbe ? 

- Oui bien sûr. 

- Je vais travailler encore 30 minutes et je prendrai ma pause repas. 

- Très bien, je transmets le message. 

- Merci.  

J'avance sur mon projet, j'ai envie de proposer à mon client la proposition la plus brillante qui puisse être. Je trouve son événement tellement innovant : utiliser des gobelets à l'effigie de son projet en matière biodégradable, les différentes poubelles de tri en fonction des conteneurs pour la déchèterie, la purification des eaux utilisées, le compostage des aliments de la buvette ... Il vrai que la pollution de nos jours est devenue tellement énorme : le septième continent en plein cœur de l'océan d'une superficie fortement inquiétante, toutes les bouteilles en plastiques, emballages, mégot par terre et en pleine nature. On se demande vraiment comment les personnes ont été éduquées pour avoir un irrespect total de la nature. Ils se scient la branche sur laquelle ils sont assis. Pauvre planète, pauvre espèce humaine qui se croit "supérieure" alors qu'au final elle ne fait que des catastrophes  ... 

Des innovations comme ce festival sont une main tendue vers l'évolution de la mentalité humaine. Encore faut-il que les gens en prennent conscience et qu'ils arrêtent de faire n'importe quoi : lancer des pneus, des appareils électroménagers dans des cours d'eau, dans la mer, n'importe où ... Ce monde me fait honte des fois. Je déprime également à cause de cela. Je me demande des fois où l'on va, que va t-on devenir ? Est-ce qu'il est déjà trop tard ? 

- Sandra ? 

Tellement absorbée dans mes pensées, je n'ai même pas entendu la porte s'ouvrir. Je tourne la tête en direction de la voix. Wendie semble inquiète, elle est encore mal à l'aise. 

- Il y a un problème ? 

- Non ... Je ... 

Elle prend une grande inspiration et me regarde dans les yeux. 

- Je voulais vous remercier pour tout à l'heure ... Pour avoir pris ma défense. 

Elle baisse les yeux. 

- Tu es mon assistante tu sais, c'est normal que je te soutienne ... 

Elle relève son regard vers moi et me sourit timidement. 

- Merci ... 

Je regarde l'heure sur mon ordinateur. 

- Oh il est l'heure de manger. 

 - Oui, je vais aller chercher mon tuperware, vous venez ? 

- J'arrive. 

J'éteins mon ordinateur et rassemble mes affaires. Je prends le chemin de la salle de réunion. 

- Avez-vous commencé à cuisiner les recettes de mon livre ? 

- Oui tout à fait. Et je trouve qu'elles sont plutôt savoureuses d'ailleurs. 

- Ravie que ça vous plaise. 

- D'ailleurs j'ai mis en place les conseils donnés pour le petit déjeuner. 

- Ah, c'est bien. Voulez-vous partager mon repas ? 

- Oui, pourquoi pas ? 

Comme la veille, elle fait chauffer son tuperware dans le micro onde et, une fois le réchauffage fini, verse la nourriture dans deux assiettes. Nous dégustons sa préparation. 

- J'ai fait un petit gâteau aujourd'hui, j'ai réduis la dose de sucre . 

- Oh, en quelle honneur ? 

- Eh bien ... En fait c'est mon anniversaire aujourd'hui ... 

Je me sens tout d'un coup un peu nulle. Mince, j'ignorais cela ... Et je n'ai même pas de cadeau. Pire même, c'est elle qui m'en a fait un la veille. 

- Bon anniversaire alors ! 

- Merci beaucoup. 

- Tu m'excuseras, je n'ai malheureusement pas de cadeau ... 

- Ce n'est pas grave, l'essentiel c'est que vous soyez là. 

Elle coupe son gâteau au chocolat en de petites parts. L'une d'entre elles est mise dans une petite assiette, et elle prend un autre morceau pour elle-même. 

- Si tu veux on ira acheter un petit gâteau à la boulangerie ce soir, ou on fera quelque chose de spécial. 

- A vrai dire ... C'était pour cela que je vous ai invité ... C'est parce que c'était mon anniversaire et que je voulais passer un moment avec vous. 

Touchée par cela, je ne sais pas vraiment quoi dire. Je me sens un peu prise au dépourvu car en général j'aime souhaiter les anniversaires même si je ne connais pas forcément les personnes. Je trouve que chaque personne mérite un "joyeux anniversaire" il s'agit tout de même de la date où la personne est venue au monde alors ... ce n'est pas anodin. 

- Il faudra qu'on prenne des bougies aussi ! 

J'ai envie de lui demander son âge mais ... Ce n'est pas très correct de demander cela. Est-ce que j'ose ? 

- Que ... Quel âge as-tu ? 

- 20 ans ... 

- Oh c'est un bel âge à fêter ! Ne voudrais-tu pas plutôt qu'on mange quelque chose aussi ? On peut passer la soirée ensemble si tu veux et je te ramènerai chez ta maman. 

- C'est une bonne idée mais je dois lui en parler d'abord. 

Sortant son téléphone portable de sa poche, elle s'isole. Tiens, cela me fait penser que je dois passer mon coup de fil pour mon chirurgien. Je prends mon téléphone portable et cherche sur google "Docteur Taztky" ... J'appuie sur le bouton "appeler". 

- Secrétariat du docteur Taztky bonjour. 

- Oui bonjour, je m'appelle Sandra Paoli, mon endocrinologue a envoyé une lettre en direction du chirurgien pour un premier rendez-vous. 

- Attendez, ne quittez pas. 

J'ai le droit à une petite musique d'attente pendant quelques secondes. 

- Madame Paoli ? 

- Oui ? 

- Oui c'est toujours la secrétaire, je viens de trouver la lettre dont vous me parliez. Avez-vous une préférence pour la date du rendez-vous ? 

- Eh bien je travaille du lundi au vendredi de 8h30 à 18h donc je ne sais pas, à voir en fonction de vous. 

- Huum ... Je regarde attendez ... Alors ... J'ai eu une annulation pour demain soir. A 18h, est-ce que ça vous irez ? 

- Euh ... oui cela devrait convenir. 

- Donc Madame Paoli Sandra, c'est bien cela ? 

- Oui tout à fait. 

- Très bien c'est noté pour moi, jeudi soir à 18h. 

- Est-ce que je dois amener quelque chose de particulier ?

- Non juste vous-même et ça ira très bien. Nous acceptions les chèques pour la consultation. 

- Très bien merci. Bonne soirée. 

- Bonne soirée Madame. 

Je raccroche et retourne dans la salle de réunion. Wendie m'attend avec un sourire. 

- Ma mère est d'accord pour ce soir. Elle doit travailler plus tard de toute façon. 

- Tu dois lui demander la permission ? 

- Non, je l'avertis juste ... normalement nous devions faire quelque chose ensemble. 

- Veux-tu que nous regardions où aller pour ce soir ? 

- Il y a un restaurant que j'aime bien. 

- Ah oui ? Quel est son genre ? 

- Asiatique, c'est le genre buffet à volonté vous savez. Je vais les appeler. 

Décidemment elle est très entreprenante ... Elle ne parait pas comme cela, timide et non bruyante. On a un avis trop sévère sur les personnes timides. On pense souvent qu'elles ne s'expriment pas alors que finalement elles sont tout aussi efficaces que n'importe qui. Souvent même plus réfléchis. Il est vrai que c'est difficile pour ces personnes de "s'imposer" ou de "oser" mais des fois elles peuvent prouver leur valeur. 

- C'est bon pour ce soir, dit elle soudain excitée. 

- Je vois que tu es contente. 

- Oui ! Cela me fait vraiment plaisir. 

Elle s'approche de moi et me fait un petit bisou sur la joue. Je reste immobile à ce geste affectif. 

- Je ... pardon, c'était impulsif ... 

- Ce n'est rien. Je ne m'y attendais pas simplement. 

La porte s'ouvre tout d'un coup et Lolita déboule dans la salle de réunion. 

- Coucou les filles ! Ah que c'est agréable d'avoir enfin fini toute cette paperasse. Ouf, je suis bien contente de pouvoir faire autre chose. 

Elle s'approche de moi et vient me faire la bise ainsi qu'à Wendie. 

- Vous allez bien ? 

- Oh oui ! 

- Qu'est-ce qui te rend de si bonne humeur ? 

- C'est son anniversaire. 

La comptable se retourne vers mon assistante et ouvre grand les bras, pétillante de la nouvelle. 

- Waouh ! Laisse moi t'embrasser ma belle, bon anniversaire ! 

Elle s'approche d'elle et lui fait un bisou sur la joue tout en la prenant dans ses bras. Wendie rit de sa bonne humeur. Lolita s'écarte et sourit, encore ravie. 

- Dommage que je n'ai pas su cela, je t'aurais offert un beau cadeau ! Tu as prévu de faire quelque chose ? 

- J'ai amené une part de gâteau si tu veux en manger. 

- Volontiers ! Huuum ça a l'air bon. 

Elle déguste un bout de part de gâteau avec nous. 

- Chélicitation, ch'est très réuchi ! dit elle le gâteau plein la bouche. 

- Tu sais que ce n'est pas terrible de manger la bouche pleine ...

Elle avale sa part, se nettoie la bouche avec un bout de serviette. 

- Oh ça va Sandra, arrête de faire ta rabat joie ...  Bon, je dois malheureusement retourner à mon bureau. Merci beaucoup pour le gâteau ! Et encore bon anniversaire ma belle. 

Sur ces paroles, elle nous abandonne, mon assistante et moi-même. 

- Toujours une boule d'énergie cette Lolita. 

- Oui ... et très affectueuse. 

Depuis que Nathan m'a fait la remarque de mon attirance pour les filles, j'y ai beaucoup réfléchi et je dois dire que cela doit remonter à de nombreuses années. Je pense que je le savais quelque part mais que je ne voulais pas me l'avouer. Trouver des filles vraiment jolies mais ... se dire que tout simplement ce ne serait pas réciproque. Quand j'avais appris que l'une de mes meilleures amies souhaitaient tombé enceinte, j'avais pris la chose très mal. Au fond de moi-même je savais que j'étais attirée par elle et ... je ne pouvais naturellement pas lui dire. A cause de mon poids, mon endocrinologue m'a déjà dit que ce serait difficile pour moi d'être enceinte car mon IMC est trop grand pour pouvoir être assistée et ... à cause de mon problème d'ovaires ce n'était pas simple. En clair, la seule solution, c'était de perdre du poids ... Des fois je me demande si je veux devenir maman ou non ... Souvent j'en rêve et quand j'en rêve, je me dis "j'ai loupé ma vie". Cela me fait peur de consacrer ma vie à un être alors que j'ai des ambitions ... 

- Wendie, tu reviens travailler avec moi ? demande Angela. 

- Oui, j'arrive. A tout à l'heure ? 

- A tout à l'heure Wendie. 

Sur ce, je regagne mon bureau pour me replonger dans mon projet. 

17 heures ...

Je regarde l'heure numérique et rassemble mes affaires. L'ordinateur éteint, je marche à grand pas vers le pôle accueil. 

- Angela ? 

Je la vois au téléphone en train de discuter vivement avec ce qui semble être un client. Je tourne la tête vers mon assistante. 

- Pourras-tu dire à notre chère standardiste que je file à la pharmacie ? Je dois impérativement prendre mes médicaments. Je suis de retour dans peu de temps. 

- D'accord. 

Sur ce, je fais un petit signe de main à Angela qui me répond par un regard au ciel. Sortant de l'agence, je me dis que prendre les escaliers ne me fera pas de mal. Je me sens pousser des ailes, je ne sais pas si c'est l'arrivée de Wendie dans ma vie ou bien le fait qu'elle me soutienne dans mon rééquilibrage alimentaire. Une fois descendue, je me précipite dehors et rentre dans ma voiture. Pianotant sur mon portable, je cherche dans Google Maps la pharmacie la plus proche ... Rue François Ferdinand, PARFAIT. J'enclenche le parcours guidé et démarre la voiture, me voilà en route pour l'opération retrait de médicaments. Mais soudain ma voiture fait un drôle de bruit et je me retrouve au beau milieu de la route ... sans pouvoir avancer ! 


Chapitre 6 


Ah c'est vraiment la grosse poisse maintenant, je vais faire comment ? En plus je suis censée être au boulot et là je me retrouve bloquée... Et l'anniversaire de Wendie ce soir ... et notre rendez-vous chez notre client et mon chirurgien. J'enrage intérieurement. Que faire ? Appeler le boulot ? 

Enervée, je sors de mon véhicule et des voitures commencent à klaxonner. Allez, il ne manquait plus que cela ! Comme si la situation n'était pas déjà assez pénible de tomber en panne en plein milieu de la route. Les conducteurs me font des gestes d'agacements tout en criant des "dégage ta voiture" , "bouge de là grosse vache". Très charmant ... Cela me donne encore plus envie de les embêter. 

- Besoin d'aide ? 

Je me retourne et tombe sur Nathan. Si je m'attendais à cela ! Je n'ai pas le temps de le saluer et enchaine directement. 

- Je crois qu'elle m'a complétement lâchée ... 

- Elle me rappelle étrangement son prioritaire alors ... , dit-il en tournant la tête et me gratifiant d'un sourire provocateur. 

Un point pour lui. Bon est-ce qu'il va m'aider à faire quelque chose concrètement ou me lancer des piques au fur et à mesure ? 

- Tu m'aides oui ou merde ? 

- Huum ... Laisse moi réfléchir à la situation : tu es coincée sur la route et des dizaines de conducteurs klaxonnent et te traitent de tous les noms. Ca mérite quand même réflexion ... 

- NATHAN, hurlé-je. 

- Oui bon ça va, ça va, je t'aide bien sûr ! 

Enclenchant les feux de détresse de mon véhicule, enlève le frein à main et m'ordonne de m'installer du côté du volant. Une fois fait, il commence à pousser côté passager. J'ouvre alors la fenêtre latérale de droite. 

- Ca va ? 

- Oui, je m'amuse comme un petit fou, ça ne se voit pas ? 

Levant les yeux au ciel, je continue de l'observer dans sa manœuvre. 

- Bon, on va prendre la prochaine rue à droite, prépare toi à tourner le volant quand je te le dirai. 

Quelques mètres plus tard, il m'ordonne de faire la manipulation, je m'exécute. Une fois le moyen de transport en sécurité, il arrête de pousser. 

- Mets le frein à main Sandra ! 

Suivant l'ordre, j'enclenche le mécanisme. 

- Bon, on va regarder ce qui ne va pas maintenant. 

En vrai mécanicien, il soulève le capot. Je dois bien avouer que je suis un peu nulle là dedans. Mon père avait pourtant essayer de m'initier à cela mais ... C'est un domaine bien compliqué pour moi. J'avais compris comment vérifier le niveau d'huile ou comment mettre de l'eau dans le réservoir de refroidissement mais ... vous direz où il se trouve, telle était la question ! 

- Je vais devoir la porter au garage ? 

- Non ce n'est pas nécessaire, je ne vois rien d'anormal de ce côté là, allez voir du côté de ton tableau de bord. 

Nathan s'installe et essaie d'allumer la voiture sans réussir ... Il retente l'opération plusieurs fois, en vain. 

- Je crois que tu as juste un problème de batterie. Je suis garé non loin, je vais rapprocher ma voiture et on va les connecter avec les pinces crocos. 

- D'accord, merci Nathan. 

- De rien, c'est bien la première fois que tu me fais le coup de la panne, dit-il un sourire pervers aux lèvres. 

Il arrive rapidement et branche les deux automobiles. 

- Nathan, je dois vraiment aller à la pharmacie, je peux te laisser un quart d'heure ? 

- Oui, ça devrait être chargé d'ici là. 

- Je garde mon portable avec moi. 

Me guidant grâce au tracé virtuel indiqué par l'application, je finis par tomber sur le saint graal au bout de 10 minutes. Je rentre dans la structure médicale. Une petite sonnerie indique mon arrivée et une pharmacienne sort des meubles remplis de médicaments. 

- Bonjour Madame, me dit-elle avec un petit sourire. 

De taille moyenne, la quarantaine, elle a les cheveux bruns coupés au carré. Elle porte une blouse blanche, symbole de la médecine. 

- Bonjour. 

Je m'approche du comptoir et sort mon ordonnance du sac. 

- Je viens vous voir pour renouveler mes médicaments. 

- Oui très bien, pouvez-vous me donner votre carte vitale s'il vous plait ? 

Je sors la carte verte de mon porte feuille et lui tend. 

- Alors ... du duphaston et de l'aldactone c'est cela ? 

- Oui tout à fait ... 

Insérant la carte dans son lecteur, elle me demande mes coordonnées. Je lui réponds par automatisme. 

- Puis-je avoir un numéro de téléphone ? 

- 06 00 00 00 00. 

- Très bien, je vais vous chercher vos médicaments. 

Elle part dans l'exploration de ces différents tiroirs à rallonge. Telle une énorme bibliothèque, les meubles aux alentours sont remplis de produits : soin dentaire, soin corporel, douleurs diverses ... Je la vois ouvrir un tiroir qui semble sans fond. 

- Voulez-vous une boîte de 90 comprimés ? 

- Euh oui, pourquoi pas, ce serait plus pratique. 

- Vous savez que la sécurité sociale vous prélève 0.50 centimes d'euros par boîte ? 

Je la regarde, intriguée. Honnêtement non, je n'avais jamais fait attention à cela sur mes relevés de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie. 

- Non je l'ignorais ... 

- Avec une boîte de 90 comprimés vous allez économiser au moins 1€. Cela s'applique aussi bien pour les personnes qui ont le 100% dans le cadre de leur maladie que sans. Uniquement les enfants sont épargnés. 

- Avez-vous une mutuelle ? 

- Je lui tends le papier vert plié. 

Elle marque les informations, tamponne l'ordonnance et imprime l'encaissement sur la feuille. 

- Voulez-vous un sac ? 

- Oui, volontiers, je suis à pied. 

Mettant les boîtes dans le sac, elle me le tend. 

- Et voilà, bonne journée à vous. 

- Merci, bonne journée. 

Je sors de la structure. Mon portable se met tout d'un coup à sonner. Regardant l'écran je vois marquer "Boulot" dessus, je décroche. 

- Allo ? 

- Oui Sandra c'est Angela. Dis donc cela fait un sacré moment que tu es partie maintenant. Qu'est-ce qui se passe ? 

- J'ai eu un problème avec ma voiture ... 

- Ta voiture ? Mais comment vas-tu faire pour revenir ? 

- Nathan est venu m'aider, il a diagnostiqué une décharge de la batterie. Je vais le rejoindre d'ici à cinq minutes, je sors de la pharmacie. 

- Très bien, tiens nous au courant s'il te plait. 

Elle raccroche. 



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