A la mode Léo
Jean Claude Blanc
A la mode Léo
Quand la mer se la ramène avec des éclopés
Homme ou chien, c'est pareil, on les regarde sombrer
Sur les pages dorées de la Méditerranée
Personne ne s'en dérange pour aller les sauver
Que de brèves émotions pour ceux qui viennent mourir
Car passent avant tout, nos moindres menus plaisirs
Surtout fermer les yeux, les oreilles en sourdine
Etant des assassins, dépourvus de victimes
Le port de Marseille, trop bouché de sardines
Plaisantes chemises brunes, tachées que de sang caillé
O ma sœur la violence, O ma sœur traitresse
Que de légions d'horreurs que pour toi l'on commet
Tellement tu ensorcelles le cœur de notre jeunesse
Tandis que je cherchais, sous les pavés la plage
Dans le Paris latin, dans le quartier Boul'Miche
Soudain « Taxi Driver », au grisonnant visage
M'est passé sur le corps, dans sa tête un pois chiche
Sur ce monde aboli à coups de vaines colères
Faudrait qu'à ses auteurs, on colle une muselière
Qui ont la religion cousue dessous la peau
Pour nous assujettir à leur ordre nouveau
J'entends par là nos tripes, à la mode de Nice
Servies en hors d'œuvre, aux becs fins terroristes
Justiciers pour leurs dieux, leur doivent ce service
Leur offrir en retour bronzés, huilés touristes
A pas vouloir crever, on meurt d'impuissance
« La science sans conscience, n'étant que ruine de l'âme »
Pourtant il suffit d'un simple bidon d'essence
Afin gagner le ciel, pas cher le jerrican…
S'agit d'avoir du cran pour se faire exploser
Mais avant de mourir, user d'un cran d'arrêt
Ou n'importe quel ustensile, pourvu que ça fasse de l'effet
Car c'est pas interdit, même pas un péché
C'est même recommandé, pour être béatifié
La violence et l'ennui se tiennent compagnie
Epique la première pour nourrir l'Histoire
Morfondue la deuxième, de trop de nostalgie
L'ensemble réuni, inscrit dans la Mémoire
Mon sens démocratique, me cause des rougeurs
En marge je me tiens de cette maladie
Cancer inguérissable, citoyen-électeur
Vais me faire pendre ailleurs, ma mort, je la choisis
Je sens qu'en moi débarquent, des hordes de libertaires
Qu'armés de drapeaux noirs en face de révolvers
Actualité comblée, technicolor-télé
S'en branlent les voyeurs, d'hémoglobine, grisés
Ainsi on s'offre un verre de haine sur canapé
Dans les salons guindés, aux lustres vénérés
En ces palais conquis aux rencontres câlines
Ministres à boutonnière, conviés aux parties fines
Depuis que je plaide ma cause, aux creux de mes nuits d'angoisses
Rien ne me dévore tant, que mon esprit sans voix
Car les mots pour maudire, me manquent, j'ai la poisse
Abruti pauvre quidam, trop le sens de l'Etat
Alors que certains, pénards sur l'oreiller
Se la jouent à qui perd gagne, du genre « touché-coulé »
Voguent sur l'océan, des rafiots d'émigrés
Qui ne peuvent pas périr, que pions sur l'échiquier
Mon araignée me conseille d'avoir de la pratique
Pour me placer au rang des fourbes politiques
Comme je fous de tout, surtout de cette république
Vais pas me laisser prendre à cette petite musique
Me tourne vers Léo, pour ne pas faire un bide
Trouvère, je me présente, anarchiste lucide
Vous confiant « c'est extra », d'en être initié
Comme Pépée sa guenon, « poètes vos papiers »
Vous passe ses romances, et son intimité
Qui est le plus maudit sur cette Terre tragique
L'artiste visionnaire, qu'en instruit son public
Ou l'imbécile heureux qui va jeter des pierres
Au stade le dimanche, sur ses adversaires
« Madame la misère », cet oiseau de malheur
Sur le Pont Mirabeau, joue les martins pêcheurs
Bouffant pas gros poissons, que de maigres chômeurs
Ces albatros sans ailes, au salaire de la peur
Toi qui dors désormais, du sommeil des justes
Comme toi sur les poseurs, je tape comme une brute
« Chanson du Mal Aimé » qui tombe à point nommé
En me marrant « ils ont voté, et puis après »
Hélas « L'affiche rouge », tu l'aimais bien, je sais
Tellement elle a rosi, qu'elle ne fait plus succès
Car l'art poétique, c'est plus ce que c'était
Alors que tu reposes à St Germain des Prés
Eternel chef d'orchestre, dirige nos pensées
Sachant qu'avec le temps, s'obscurcissent les idées
Des extrêmes qui se hâtent de nous en imposer JC Blanc avril 2017 (merde à Vauban…)