A n'en pas douter

Orléans.

Deux personnes se tiennent main dans la main, ils semblent amoureux, mais ce n'est qu'une façade. Lui la trompe, elle le quittera bientôt. Pour aujourd'hui, l'image est belle, un soleil et une balade en couple, une délicatesse, un restau, des sourires, une jolie journée à n'en pas douter.

Ce garçon qui passe est triste à mourir. Il est persuadé que son petit-ami le trompe, il souhaite finir cette histoire, rongé par le chagrin, il rentre chez lui, cette journée est affreuse à n'en pas douter, pas un instant il n'imagine que son partenaire l'attend chez lui, un billet d'avion à la main, direction les États-Unis qu'il a toujours rêvé de visiter.

Cette jeune fille aussi est triste. Elle pleure sa récente rupture, elle est assise, au milieu des gens, une amie est à côté d'elle et tente de la réconforter, la première ignore que la seconde est la nouvelle petite-amie de son ex, la seconde le sait et tente de noyer sa culpabilité, à n'en pas douter, cette journée est paradoxale.

Cet homme au teint jauni, lui, profite du soleil, ce soir il aura perdu de cette couleur qui le dégoute tant et lui rappelle qu'il est malade, cette journée est un soulagement, à n'en pas douter. Le soleil est une bénédiction pour lui, la lumière l'aide, l'apaise, il ignore d'ailleurs que son téléphone qu'il a oublié chez lui sonne, et qu'au bout du fil, on l'informe qu'un donneur a été trouvé, il aura bientôt sa greffe de foie.

Ce chef d'entreprise détestable vient d'avoir son bilan, il fait mieux que l'exercice précédent, il a licencié sa meilleure employée et ne se doute pas qu'à la suite de cela, son entreprise va couler. A n'en pas douter, cette journée est belle.

Cet arrogant et prétentieux adolescent n'imagine pas un instant qu'il s'écroulera dans quelques heures, victime d'une attaque, il ne pense pas un seul instant que c'est la jeune fille qu'il harcèle depuis des mois qui le sauvera, lui prodiguant les premiers soins avant que n'arrivent les secours. Cette journée est, à n'en pas douter, étrange.

Et il y a moi, ni bon, ni mauvais, ou peut-être les deux à la fois. Assis sur un banc, je regarde tous ces gens passer, je réfléchis, et je profite de l'air. Je me dis que j'ai de la chance de me tenir encore debout, d'avoir des amis, un toit et à manger, je me dis que même s'il manque un petit quelque chose, ma vie est plutôt réussie, à n'en pas douter, cette journée n'est pas si terrible.