Tendre.
Schiele Basquiat
«Lentement»
Ses doigts caressaient les miens avec une douceur infinie, comme si le moindre faux mouvement les briseraient en morceaux.
Une sensation fantomatique me traversa la colonne, m'électrifiant, aiguisant mes 5 sens maintenant à l'affût, sur la pointe des pieds.
Je sentais le froids de l'argile, entendaient les battements de son cœur, humais le vent iodé, goutais l'amertume du vin et voyaient en coin ton visage concentré au dessus de mon épaule, ta posture forte dominant mon corps ferme, tes cheveux châtains et bouclés me chatouillant la nuque.
L'argile prenait forme sous mes yeux. Accompagné de tes mains, ce qui n'était qu'une masse difforme se transformait en un magnifique vase, une sorcellerie de céramique.
Comme cette terre, tu as pris soin de moi, m'a formé, arraché de mon milieu pour me transformer en objet d'exception, ignorant la terre de sang et de larmes dont je suis constitué, tu m'as aimé d'un amour certain, intemporel, incomparable.
Tu as fait de moi un homme capable d'aimer, de haïr, de penser, de sourire, de pardonner, tu m'as fait oublier la souffrance et je ne pourrais jamais assez l'en remercier. Tu m'émerveille, me fascine, m'éblouit et je dévoue ma vie à chacun de tes gestes sur ma peau couleur argile.
Ta chaleur s'estompe, je n'ai même pas eu le temps d'admirer le chef d'œuvre de notre création que tu la mets déjà au four avec rapidité. Je reste assis sur le tabouret, essayant d'absorber chaque parcelle de ta présence par la volonté. Tu souris avec l'air apaisé d'un berger de montagne sur son troupeau endormi, d'un père de famille heureux jouant avec ses fils, d'une personne âgé nostalgique des années d'or de son passé, cet air digne des dieux de la sagesse de la beauté, cet air digne d'Apollon.
26/06/21