Antéchriste

Christian Lemoine

Enfant jolie, qui nais de misère. Tes yeux béant sur de rageuses outrances, se carguent autour des outrages rances. Née de misère, tu brises les digues, boule noire de tes pupilles meurtrières. Belle enfant, de débris, de tôles et de gravas ; pas même une accusation brandie, mais la rigueur du verdict sans appel. Toi qui nais de misère, tu sais sans les compasser les béances de colère subjuguées. Colère d'enfant, dans ta froideur sans relâche, toi qui nais de misère engrènes des rébellions que n'éteindront pas les subterfuges. La singularité raille les tauroboles, comme futiles et vains. Chaque parcelle court à l'aubaine de sa mitose, la vie gagée. Mais toi, irrésolue mais raide, tu piétines les providences, foudroies les fortunes ; tu chamboules les apanages et répudies les destinées ; comme si la puissance fixe de ton regard pouvait desceller les anathèmes. Toi qui nais de misère, écrasée entre tes doigts potelés la pulpe sanglante de toute parousie.
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