Astrale

Christian Lemoine

Une ombre au sol, secrète, se conjugue au rayures balayées que projettent les arbres. Canevas rapiécé des ramures d'hiver. Quelque rongeur grelottant, ou un oiseau chahuté, quelque animal timide. Juste une vie entraperçue. Le froid gifle la peau, obscurcit la rétine. Avant même que cette ombre ait traversé le champ visuel, la paupière se ferme, se plisse sur la larme. Et l'animal qui fuit en quête d'un abri s'excuse en indicible trace.

Dans le gris encore froissé des scories de la nuit passée, parmi les flétrissures inquiètes du petit matin, on fouille, on disperse, on fouit du bout des doigts vers des résurgences insaisissables, à la recherche de ce rêve doux, ce rêve-là à retenir. Des pelotes argentées roulent dans le ciel, s'y éclaboussent les encres noires des corneilles. Sur l'oreiller, la main repose, paume ouverte, tournée vers le plafond. Phalanges, articulations, empreintes, doigts écartés. Au confluent des lignes aux runes énigmatiques se tient, vibrant et instable, l'espoir brûlant d'un univers à naître. Avant le Big Bang, avant les confusions d'atomes. Avant le mariage grandiose de la galaxie d'Andromède et de la Voie lactée.

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