Atelier d’écriture

- Lénervé, quels conseils, donneriez-vous, aux personnes qui veulent écrire ?

- Ecrire des conneries !

- Pardon ?

- Tout le monde peut écrire, il suffit seulement de l'avoir un peu appris à l'école. Ce qui paralyse, c'est l'intention d'écrire de l'important. Un livre majeur qui prendrait sa place dans le grand rayonnage des milliers d'ouvrages d'auteurs de noms illustres et même reconnus.

- L'ambition créerait l'abstinence.

- Tout à fait. Pour ma part, je n'écris que des conneries. Je ne risque pas d'être freiné par l'angoisse d'un défaut de qualité.

- Lénervé, avez-vous déjà connu la panne de la page blanche ?

- Jamais ! Quand je ne sais pas trop quoi écrire, je rajoute un mort, ça m'occupe et ça intéresse toujours le lecteur.

- Il est vrai que vos personnages perdent souvent la vie dans vos écrits.

- Oui, parfois, je dois en rajouter en milieu de bouquin pour repeupler un peu.

- Vous n'êtes pas très tendre avec vos héroïnes, non plus.

- Pourquoi, mériteraient-elles un régime de faveur ? Ne sont-elles pas, des êtres mortels en principe ? Et puis, elles sont bien gentilles au début, belles, élégantes, charmantes, brillantes, toutes pimpantes les figurines. OK, mais à la longue, on s'en lasse, alors on les tue, c'est la vie. Simple et sans danger, pourquoi s'en priver.

- Mais ne pensez-vous pas que c'est frustrant pour le lecteur qui s'est attaché, suite à toutes leurs péripéties, à vos héros de papier ?

- Peut-être, mais c'est un tort. Les personnages ne sont que du vent et le papier s'envole au vent. Relisez « 1984 » les deux héros ne meurent pas à la fin et c'est bien pire. Continuer à les faire vivre comme des fourmis, parmi les fourmis, sans la force révolutionnaire de leur amour qui les rendait exceptionnels.