Ballade

Susanne Derève

Un quartier de lune à la traine
Une rose qui fane au fond d'un encrier
 
Et la mer, et la mer indolente
Aux blancs reflets d'opale
Aux reflets d'amarante
La mer étale
 
Nos rêves étaient pareils à ces moissons du ciel
Qu'engrangent les nuages
Chimériques
Traversent-ils les âges ?
 
Je ne sais pas
Je n'en sais rien
Je ne sais plus
 
Nos souvenirs étaient verts, neufs
A peine imprimés dans la chair
Et la chair imprimait en nous
Le désir
 
Le désir animal
Et de le satisfaire                                                                          
Etait le principal     
 
L'était-ce ?
 
Je ne sais pas
Je n'en sais rien
Je ne sais plus
 
Toujours est-il
Qu'aujourd'hui est ailleurs
Sur la page
Page blanche
Nul besoin de crayon
De toi à moi lecteur
Un fil plus ténu qu'un nylon
 
Bas nylon aux coutures lascives
Talons aux aiguilles cursives
 
Etait-ce utile banal ?
 
Je ne sais pas
Je n'en sais rien
Je ne sais plus
 
J'allais naviguer sur les crêtes
Nu-pieds
Dans le vent sidéral
La barrière de corail était notre Saint-Graal
 
Apres avoir défait le socle des statues
Avions-nous désappris
-  sans doute -
Qu'on ne s'écarte pas aussi loin de la route
Sans dévier ?
 
66 un motel oublié                                      
Harley Davidson au  hasard
Vers nulle part
Marilyn de carton-pâte
Sourire  d'albâtre
Asphalte défoncé
 
Etait-ce encore l'été ?
 
Je ne sais pas
Je n'en sais rien
Je ne sais plus
 
Reprendre la route
Coute que coute vaille que vaille
J'ai fini par rentrer au bercail
Le rêve n'avait plus sa place
Gagner sa croute
Je t'ai aimé par contumace
 
Comme tout s'efface…
 
Reste un quartier de lune à la traine
Une rose fanée
J'ai jeté l'encrier
 
Inutile ?
 
Je ne sais pas
Je n'en sais rien
Je ne sais plus
 
La mer est  là
Aux reflets d'amarante
Le soleil a l'éclat
De ce mica qu'on plante
Dans les yeux qui cherchaient
 
Le sens qu'on donne aux choses
Y semer des chimères
 
L'ai-je fait ?
 
Je ne sais pas
Je n'en sais rien
Je le suppose
 
 
  • Merci pour ces vers somptueux... Vous nous livrez, en fragments, l'incandescence et la grâce. Continuons de poursuivre, ces rêves chimériques, peu importe qu'ils soient sages ou raisonnables. De l'aveuglement naîtra la clairvoyance. Tout semblera limpide... Et le clapotis de nos vagues s'apaisera pour ne laisser, sur le rivage, que la beauté et l'amour enlacés, figés dans l'éternité.

    · Il y a plus de 6 ans ·
    Profil

    Julien Darowski

  • les souvenirs varient, on fait des boucles et des circuits, mais la mer sans chimères est toujours là... quoiqu'il arrive..

    · Il y a plus de 6 ans ·
    Tulip  avr  21  03

    rechab

    • mer de sel et de vent aux blancs reflets d'opale ? mer de mirages , je ne sais pas ...

      · Il y a plus de 6 ans ·
      Photo

      Susanne Derève

  • Vous supposez bien :)

    · Il y a plus de 6 ans ·
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    Mario Pippo

  • Gabriel Meunier parle d'un "ressac". La mer, la nuit, le rythme du texte... je cherche, j'aurais bien voulu mais ne trouve pas mieux.

    · Il y a plus de 6 ans ·
    Photo 1 orig

    Alain Balussou

    • le ressac? ou les cahots de la route ? comme sur ces routes droites et nues des Etats Unis qui se dévident à l'infini , je ne sais pas...

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      Susanne Derève

  • Superbe poème...Susanne.
    Le fond, la forme....merci pour cette ballade nostalgique et introspective.
    Quand nous nous retournons, nous sommes nombreux à ne pas savoir...

    · Il y a plus de 6 ans ·
    Oeil

    anne-onyme

    • Merci ! Il faut prendre soin de ne pas se retourner trop souvent !

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      Susanne Derève

  • Au fil des lignes, j'ai peu à peu entendu la petite musique du ressac, celle du lent métronome des galets qui nous dit : je suis la mer, je suis le ciel, je suis la terre. Un matin je vous ai accueilli, vous avez voulu parcourir mes horizons les plus fous, mais je vous garde une petite place, pour toujours.

    · Il y a plus de 6 ans ·
    Autoportrait(small carr%c3%a9)

    Gabriel Meunier

    • quand on est de quelque part on y revient toujours, mais est ce qu'on renonce jamais tout à fait aux rêves fous de la jeunesse ?

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      Susanne Derève

  • C'est beau!

    · Il y a plus de 6 ans ·
    1338191980

    unrienlabime

  • un superbe road movie dans vos pensées qui nous épargne le voyage dans un pays certes beau mais qui répugne en meme tps. merci pour ce raccourcis.

    · Il y a plus de 6 ans ·
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    enzogrimaldi7

    • je suis d'une génération qui a abhorré les States avant de les adorer :)

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      Susanne Derève

    • j'irai quand les indiens seront de retour.

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      enzogrimaldi7

    • tellement lu Tony Hillerman , j'ai rêvé de Four Corner , on a les rêves qu'on peut :)

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      Susanne Derève

    • Je vous comprends. J'ai rencontré Philip Roth, Tony Morrison et...Jim Harrison. Et ct pas un rêve.

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      enzogrimaldi7

    • ah quelle chance vous avez de vivre mes rêves !

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      Susanne Derève

    • J m'êtais juste pointé à ça: http://www.citedulivre-aix.com/citedulivre/spip.php?article141

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      enzogrimaldi7

    • :)

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      Susanne Derève

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