Biche

Christian Lemoine

Il lui dit, ce n'est que moi, comme chaque jour, moi encore qui viens marcher sur tes traces invisibles. Il parlait silencieusement, s'adressant à cette vie qui n'entendait pas ses mots. C'est encore moi, disait-il, ne repousse pas ma tendresse émue, comblée de t'apercevoir bondissant dans une fuite méfiante. Il lui parlait silencieusement, guettant l'ombre furtive dans le filtre alternatif des troncs anarchiques. Ce n'est que moi, lui dit-il. Et l'ombre se posait un temps, suspendue entre deux fûts élancés et brouillons de feuilles éclatées de soleil ; les yeux grands comme un khôl héréditaire soulignant l'œillade innocente. Puis la tête se détournait et la belle s'éloignait, aussi indifférente qu'une écorce esthétique.
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