Blanche

Assise dans le taxi jaune, Allyssandre observait la ville dans l'angle de la nuit. Les lumières étaient éblouissantes et Moodlane paraissait bien plus vivante, comme un mystère qui l'attirait inexorablement. Marron l'observait dans le rétroviseur, lui offrant un léger sourire avant de lui demander.

« Pourquoi êtes-vous venue à Moodlane ? »

La tête appuyée contre la vitre, elle cherchait bien ce qu'elle pouvait lui raconter. Parler de son enfance et de sa mère ne la tentait pas plus que ça, alors elle opta pour la sincérité.

« Je suppose que j'avais besoin de vivre pour moi et d'avoir la possibilité de réaliser mes rêves. »

Un léger sourire se dessina sur le visage du jeune homme qui reporta son attention sur la route. Allyssandre observa attentivement la petite clé qu'elle avait dans la main, un petit objet argenté et denté, une rose ornant la clé. La voiture s'arrêta alors progressivement et elle releva la tête, collant son nez contre la vitre pour apercevoir ce qui allait à présent être sa nouvelle demeure. Qu'elle ne fût sa surprise d'entrevoir un grand jardin, une vaste étendue d'herbe et de fleurs probablement colorées lorsqu'il ne faisait pas nuit, un jolie petit immeuble de trois étages se dressant au fond de celui-ci. Éberluée, la jeune femme aux cheveux rose sortit de la voiture, appréciant la fraîcheur de la nuit sur sa peau. Elle se tourna alors vers le chauffeur, afin de lui donner ce qu'elle lui devait, mais, dans un petit geste de la tête et un clin d'oeil il lui répondit :

« Je vous offre la commission. »

Dans un sourire et, replaçant une mèche de cheveux derrière son oreille, Sakura répondit :

« Merci Marron. »

Il lui adressa un signe de la main et reprit place dans son taxi, démarrant tandis que la jeune femme se retrouvait seule dans l'obscurité. La dernière phrase de Marron l'avait laissé quelque peu perplexe, mais elle ne s'y attarda pas, se tournant alors vers le charmant petit immeuble qui se dressait devant elle. C'était si beau, tellement idyllique qu'Allyssandre osait à peine marcher dans l'herbe, et pourtant elle finit tout de même par avancer, ses pieds s'enfonçant dans l'herbe fraîche. Tout lui paraissait plus beau ici, les étoiles lumineuses, la lune ronde et brillante, l'herbe odorante et les fleurs colorés, la jeune femme inspira un grand coup. Le poids qu'elle avait retenu pendant toutes ses années au fond de son cœur s'allégeait enfin. Si elle s'écoutait elle se serait laissée tomber dans l'herbe se roulant dedans en riant aux éclats comme elle l'aurait fait étant enfant, mais ce n'était pas le moment de se laisser aller à l'euphorie, elle avait encore tellement de chose à faire, tellement de chose à accomplir et ça commençait par la visite de son appartement. Traversant l'immense jardin elle se retrouva devant la porte du petit immeuble. Plissant les yeux elle observa les noms qui s'affichaient sur le parlophone : ''Vert'' et ''Bleu''. Etrange, elle allait devoir s'habituer à cette drôle de lubie et elle irait faire connaissance avec ses nouveaux voisins demain matin car il était à présent tard. Elle appuya sur le bouton de la porte d'entrée et monta les escaliers, son appartement se trouvant être celui du troisième étage, trépignant d'impatience elle faillit bien louper plusieurs marches. Une jolie porte blanche se dessina alors devant elle et, contemplant quelques secondes la clés qu'elle avait dans la main elle finit par la passer la clé dans la serrure, effectuant un tour sur la gauche pour l'ouvrir. Elle poussa doucement la porte et entra dans un appartement spacieux, même dans ses rêves les plus fous elle n'aurait pu imaginé ce qu'elle avait devant les yeux. Un grand salon se dessinait devant elle sous la forme d'un canapé en cuir, d'un écran plan et d'une charmante table basse en verre. Une forme rectangulaire attira l'attention d'Allyssandre et, se dirigeant vers la table, elle se saisit de la petite enveloppe qui y trônait.

« Bienvenue dans votre nouvel appartement Rose. Il n'est pas entièrement meublé mais je compte sur votre bon goût pour y apportez votre touche personnelle.

Cordialement, Jaune. »

Il avait décidément tout prévu et, dans un sourire, la jeune femme reposa le papier qu'elle avait dans les mains pour explorer les autres pièces. Elle mit un pied dans la chambre et elle su qu'elle allait s'y sentir bien, un grand lit trônait au fond de celle-ci, une armoire en bois et un commode assortie harmonisait le tout. Elle s'approcha à pas feutrés du lit, passant sa main sur les draps de soie avant de finir par finalement sauter dessus, galvanisée par le bonheur de l'instant présent. Elle n'avait plus envie de s'y lever, mais la curiosité d'en voir plus la fit se remettre sur pied. Allyssandre ne mit pas énormément de temps pour trouver la salle de bain, un carrelage bleu clair, un toilette et une grande baignoire blanche, absolument ce dont elle avait besoin, mais elle se laisserait aller à la relaxation plus tard. Il ne lui restait que la cuisine à visiter et elle laissa échapper un cri de joie devant les jolis plans de travail, le four et les nombreux ustensiles qui la décoraient. Une fois que le tour de l'appartement fût fait, elle se rendit dans sa chambre, déballant son sac avec le peu d'affaires qu'elle avait, il faudrait sérieusement qu'elle pense à faire les magasins, mais pour le moment elle avait simplement envie de se plonger dans une nuit de sommeil salvatrice. Se déshabillant rapidement, elle enfila un pyjama en coton blanc et se glissa sous les draps de soie, fermant les yeux, elle s'endormit dans le lit de princesse dont elle avait rêvé depuis si longtemps.

Bip. Bip. Bip.

Non, elle voulait dormir encore un peu. Allyssandre garda les yeux fermés, mettant la tête sous le coussin afin de ne plus entendre le perturbateur de son sommeil.

Bip. Bip. Bip.

Aprés plusieurs secondes, elle sortit rageusement sa tête de l'oreiller et soupira quelque peu, jetant un coup d'oeil endormi sur le réveil. Six heures. L'idée de traîner encore quelques minutes de plus lui vint à l'esprit mais elle se rappela qu'elle devait d'abord aller se faire recenser à la mairie avant d'aller travailler et elle ne pouvait pas se permettre d'arriver en retard pour son premier jour, bien que son lit lui tendait les bras elle devait le quitter pour la journée. La jeune femme entama donc son rituel du matin, s'étirant de tout son long pendant cinq bonnes minutes avant de se lever pour se rendre dans la salle de bain. Maintenant qu'elle était debout, elle devait à tout prix se dépêcher afin d'avoir le temps de faire toutes les tâches qui l'attendaient. Elle se doucha rapidement, ne prenant pas le temps d'apprécier tout le confort de ce que la spacieuse baignoire avait à lui offrir et se sécha rapidement avant d'enfiler un simple T-shirt rose et un jean. Allyssandre attacha ses cheveux en un chignon rapide et enfila ses baskets avant de se saisir de son sac à dos. Une fois sortit de l'appartement, elle vérifia plusieurs fois si la porte était bien fermée et entreprit alors de traverser le jardin. Il lui fallut quelques minutes, son esprit vagabondant au moindre papillon qui venait se poser sur son épaule, ou aux pétales de milles couleurs qui s'envolaient poussées par une brise légère, le cadre était encor plus beau que la nuit dernière et elle se promit de s'y attarder lorsqu'elle rentrerait. La jeune femme composa le numéro du taxi et Marron ne tarda pas à arriver.

« Heureux te revoir ! On peut se tutoyer maintenant tu ne penses pas ? »

La jeune femme hocha la tête souriant gaiement.

« Tu es le seul taxi de la ville ? »

Riant il secoua la tête, lui apportant alors un peu plus de précisions.

« Nous sommes délimités par secteur et, dans le secteur Est, celui où tu te trouves en ce moment même, c'est moi qui m'occupe des trajets. »

C'était désormais plus clair et la jeune femme était ravie, Marron était gentil et de bons conseils depuis qu'elle l'avait rencontré. Il lui ouvrit la portière et elle monta dans la voiture, tandis qu'il s'installait devant le volant.

« Alors, où dois-je t'emmener aujourd'hui ? »

Allyssandre sortit une feuille de papier de sa poche, organisée, elle c'était notée tous ce qu'elle devait faire dans la journée afin de ne rien oublier.

« Je dois d'abord aller à la mairie pour me faire recenser. »

Dans un sourire mutin, Marron lui lança :

« Accroches-toi, c'est parti ! »

La jeune femme aux cheveux rose eu à peine le temps de boucler sa ceinture que déjà il démarrait. Il roulait dans des rues que la jeune femme ne connaissait pas encore et elle tentait de mémoriser les quelques éléments que sa rétine voyait afin de pouvoir se diriger un peu plus tard dans la ville. Malheureusement pour elle, la médecin n'avait jamais eu le sens de l'orientation et la tâche risquait de s'avérer particulièrement périlleuse.

«Mais … La mairie ouvre à quelle heure ici ? »

Dans un rire Marron lui répondit :

« A Sept heures, tu vas arriver pile pour l'ouverture. Tu vas vite le voir Rose, mais ici nous travaillons tous très durs. »

La jeune femme ressentit une drôle d'impression, elle avait encore du mal à se faire à sa nouvelle identité et, techniquement, tant que la cérémonie n'avait pas encore eu lieu, elle tenait à ce qu'on continue de l'appeler par son véritable prénom. L'homme au taxi jaune se gara devant la mairie, un grand bâtiment clair et aux multiples fenêtres. Allyssandre sortit de la voiture et le jeune homme lui répondit :

« Je reviens dans une demi-heure, ça devrait être suffisant, et je te conduirais à l'hôpital, ce n'est pas très loin d'ici, tu y seras à l'heure. »

Elle le remercia, lui adressant un signe de la main et se tourna vers la mairie tandis que le taxi démarrait en trombe. Elle poussa la porte, une clochette se faisant retentir, et une jeune femme leva la tête de ses papiers. Elle était plutôt jeune, probablement deux ou trois ans de plus qu'Allyssandre, et elle remit sa crinière noire en place lorsqu'elle la vit.

« Bonjour mademoiselle ! Que puis-je pour vous ? »

Allyssandre s'approcha du bureau de la jeune femme, une certaine vague d'appréhension la saisissant. Elle se sentit rougir jusqu'aux oreilles en cherchant ses mots :

« Heu .. Je suis nouvelle et je ... »

« Ah oui vous venez pour le recensement ! » La coupa t-elle alors dans un léger sourire.

La jeune femme hocha la tête tandis que la secrétaire fouillait dans son ordinateur. Elle devait probablement avoir l'habitude de faire ce genre de chose et semblait savoir de quoi elle parlait.

« Allyssandre c'est bien ça ? »

« Oui »

Devant son air étonné, la jeune femme lui adressa un léger sourire :

« Nous sommes au courant de toutes les nouvelles venues ici, Jaune nous communique les informations en temps et en heure. Au fait, je m'appelle Beige. »

Dans un rire quelque peu nerveux, la jeune femme aux cheveux rose rétorqua :

« Je crois que je n'arriverais jamais à m'y faire à ces drôles de surnoms. »

Beige fronça quelque peu les sourcils, répliquant alors :

« Ce ne sont pas des surnoms, ce sont nos véritables noms, en intégrant Moodlane et sa communauté nous formons tous une seule et même famille, nous sommes les couleurs de l'élite, les haut-gradés, nous devons être fiers d'arborer fièrement nos nouveaux noms. Moodlane est une ville merveilleuse, gorgée d'histoires et de souvenirs, ici tout est réalisable et la noirceur des hommes ne nous atteint pas, car nous valons tellement plus que ça. »

Allyssandre resta quelque peu interloquée devant le monologue de la jeune femme, c'était des belles paroles, des paroles auxquelles elle croyait dur comme fer, mais quelque chose la chiffonnait et elle n'aurait su dire ce que c'était. Beige retrouva son sourire et tapota alors quelque chose sur son ordinateur.

« Alors Allyssandre, quel âge avez-vous ? »

« Vingt-cinq ans. »

Beige tapota de nouveau sur son clavier, tandis qu'elle jetait un œil vers elle.

« Votre travail ici ? »

« Je suis la nouvelle médecin de l'hôpital de Moodlane. »

Enième tapotement de clavier tandis que la jeune femme aux cheveux rose regardait autours d'elle. Plusieurs portes étaient fermées, probablement toutes des bureaux pour les différentes fonctions de la mairie. Beige la sortit alors de ses pensées :

« Bon, de ce que j'ai compris, Jaune veut vous rebaptiser Rose, est-ce que cette couleur vous convient-elle ? Sinon nous en avons d'autre de libres. »

La jeune femme secoua la tête.

« Non Rose c'est bien. »

« Parfait. Alors tant que la cérémonie n'aura pas eu lieu vous serez Allyssandre dans le registre de la mairie, vous deviendrez Rose aprés la cérémonie. Celle-ci aura lieu dans une semaine, votre présence est bien évidemment obligatoire. »

Une cérémonie, ça semblait tellement surfait. Néanmoins, la jeune femme se contenta de garder ses états d'âmes pour une fois et d'hocher la tête avant de sortir.

« Merci à vous Beige, aurevoir. »

« Aurevoir Rose et à bientôt. »

La jeune femme sortit à la hâte de la mairie, Beige lui avait décidément fait froid dans le dos et elle était bien contente de ne plus se trouver face à elle. Comme prévu, Marron était là et l'attendant, garer devant le trottoir.

« Tu en fais une drôle de tête, qu'est-ce qu'il y'a ? »

La jeune femme secoua la tête.

« Oh c'est rien. »

Un éclair de compréhension passa dans les yeux du jeune homme.

« Laisse moi deviner c'est Beige ? Oh ne fais pas attention à elle, elle est très lunatique. »

Allyssandre hocha la tête, pas vraiment convaincue et monta dans la voiture, il était maintenant temps de passer à autre chose et de commencer sa première journée à l'hôpital. Elle avait hâte de pouvoir exercer ce métier pour lequel elle avait tant étudier, de se sentir utile pour la communauté. Tandis que Marron roulait, la jeune femme regardait la route, s'imprégnant à chaque fois des nouvelles rues qu'elle découvrait. Finalement, le trajet fut moins long que le précédent et ils arrivèrent rapidement à l'hôpital. C'était un bâtiment blanc, immense, divisé en plusieurs sections, et vu son sens de l'orientation, la jeune femme était sûre qu'il lui faudrait un petit moment afin d'enregistrer toutes les informations et de s'y retrouver là dedans. Tandis que Marron lui ouvrait la portière, elle se sentit blêmir.

« Hey qu'est-ce qui t'arrive ? »

La jeune femme répondit d'une voix mal assurée.

« Je crois que j'ai le trac. »

Marron ne pu s'empêcher de rire devant la tête de la fille aux cheveux rose.

« Mais non, tu ne montes pas sur scène, tu commences simplement à travailler ! Allez respire un grand coup ça ne sera pas si terrible que ça. »

Reconnaissante envers le jeune homme, elle sortit de la voiture et lui offrit un petit sourire. Marron s'avérait être un ami prévenant et au fond elle l'en remerciait, il savait trouver les mots dont elle avait besoin. Il reparti rapidement, et elle se retrouva seul face à l'immense hôpital. Allyssandre tourna quelques minutes avant d'enfin trouver l'entrée. Les portes coulissantes s'ouvrirent d'elles-même et elle entra dans un long couloir parsemé de carrelage blanc, parcourant les allées affin de trouver quelqu'un qui pourrait la renseigner. Une jeune femme aux cheveux noir vint à son secours, un doux sourire sur les lèvres.

« Excusez-moi, vous cherchez quelqu'un ? »

La jeune femme aux yeux émeraude soupira de soulagement, heureuse que quelqu'un se propose enfin pour l'aider.

« Oui, je cherche Blanche, je suis la nouvelle médecin de l'hôpital. »

Le visage de la jeune femme en face d'elle s'illumina.

« Oh et bien suivez-moi ! Je vais vous y conduire. »

Suivant les traces de sa sauveuse, elle arpenta les allées avant de se retrouver devant une salle vitrée où se tenait une femme grande, blonde, et plutôt imposante. Son malaise s'intensifia quelque peu et l'idée de faire demi-tour lui traversa vaguement l'esprit. La jeune femme aux cheveux noir ouvrit la porte et se tourna vers Allyssandre tandis que la voix de la femme blonde résonnait dans la pièce.

« Merci Aline, fais là entrer. »

La jeune femme aux cheveux rose fut quelque peu étonnée que la personne en face d'elle n'est pas été encore rebaptisée. Néanmoins, elle n'eut pas le temps de se poser la question car celle-ci retourna à ses occupations tandis qu'elle allait enfin rencontrer la gérante de l'hôpital.

« Bonjour Allyssandre, entrez vous êtes pile à l'heure. »

En son fort intérieur, elle se félicita, c'était déjà un bon point pour elle. La jeune femme entra dans ce qu'il semblait être une pièce d'opération au vu des nombreux objets et scalpels qui trônaient à côté d'une table d'opération.

« Enchanté de vous rencontrez Blanche. »

Allyssandre acquiesça, avalant difficilement sa salive.

« J'ai étudié ton dossier, et tes notes sont plus qu'excellentes, néanmoins la pratique est bien plus difficile que la théorie, as-tu déjà travaillé dans des hôpitaux ? Ou ausculté des personnes ? »

La jeune femme hocha la tête.

« Et bien, j'ai travaillé à mi temps dans un cabinet de médecine générale, et une semaine de stage dans un hôpital où j'ai déjà appliqué des points de sutures, hormis cela ... »

« Tu es une novice. » Compléta Blanche.

Elle sembla réfléchir un instant, avant de lui dire :

« Néanmoins, je perçois en toi un grand potentiel et je suis sûre que tu vas devenir un très bon élément, je te formerais afin que ce soit le cas. Maintenant j'ai une question, une seule, pourquoi es-tu là Allyssandre  ? »

La question tant redoutée, au fond comment ne pas passer pour la gamine indisciplinée, celle qui avait simplement voulu fuir d'une vie qui lui allait pas, s'éloigner du joug de sa mère afin de pouvoir satisfaire ses caprices d'adolescences ?

« Je voulais fuir une vie qui ne me convenait pas, je n'étais pas malheureuse mais j'avais l'impression de ne pas être née au bond endroit. Lorsque j'avais six ans, je suis tombée sur un spot publicitaire représentant Moodlane et j'ai alors décidé que c'était là bas que je voulais aller vivre. »

Blanche croisa les bras, la toisant du regard.

« Tu sais qu'il va falloir travailler dur pour y arriver ? Que même si tu es ici, tout ne vas pas te tomber du ciel, tu en es bien consciente j'espère ? »

Allyssandre hocha la tête, plus déterminée que jamais.

« Je sais, et je compte bien réussir. »

Blanche se mit alors à faire les cent pas dans la salle, tandis que d'une voix monocorde, elle dévoila son passé à la jeune femme.

« Je n'ai pas eu une enfance facile, mon père était un homme violent. »

FlashBack

Apeurée, la petite fille c'était recroquevillée dans un coin du mur, tandis que son père, un verre de trop dans l'nez, s'approchait d'elle l'air menaçant. Elle n'avait que dix ans bon sang et déjà plus de bleus que ce qu'elle n'avait d'années. Blanche était née dans la mauvaise famille, sa mère morte en lui donnant naissance, son père la jugeait responsable de tout ses malheurs et, l'alcool aidant, au fur et à mesure des années il était devenu de plus en plus violent. La petite ville était dotée d'une beauté incroyable, de long cheveux blond, des yeux couleur chocolat et des formes qui se dessinaient déjà. Lorsque le poing de son père s'abattit sur son visage elle n'hurla pas et cela faisait des années qu'elle ne pleurait plus, mais la peur qui envahissait à chaque fois ses yeux satisfaisait son père. Lorsqu'il n'eut plus la force de lui taper dessus, il alla s'avachir sur son lit tandis que la petite s'endormit à même le sol n'ayant de toute façon plus la force de se lever. Demain serait un autre jour, aujourd'hui il s'était énervé pour un verre cassé, demain il trouverait bien autre chose pour s'en prendre à elle.

Fin du FlashBack

Au fur et à mesure que ses souvenirs refaisaient surface, le visage de la doctoresse devint plus grave.

« Puis un jour j'ai rassemblé mes quelques affaires et je suis partie, je n'en pouvais plus et j'avais toujours eu un fort caractère et cette fois-ci j'étais décidée à ne plus me laisser faire. J'ai fui et j'ai arpenté les rues pendant de nombreux jours avant qu'une gentille vieille dame se décide à m'accueillir chez elle. Elle était médecin et m'a apprit tout ce qu'elle savait, notamment sur l'incroyable pouvoir de guérison des plantes, j'ai alors décidé que moi aussi je deviendrais utile et aiderait les gens comme elle avait pu m'aider moi. Lorsque Moodlane fut construit, on vint frapper à ma porte. Le fondateur de la ville, vint me proposer de travailler pour lui et de l'aider à bâtir l'hôpital de Moodlane, le projet m'a évidemment plu et j'ai accepté. J'ai vu la ville se construire et les habitants y entrer petit à petit, j'ai vu les changements, les turbulences et les joies de chaque habitant, je fais partie des murs aujourd'hui. »

Admirative, Allyssandre l'observa, la force de cette femme était palpable et elle ne pu s'empêcher de louer son courage et son grand parcours. Blanche se tourna alors vers elle, lui faisant un léger signe de tête.

« Allez, je vais te faire visiter l'hôpital. »

La jeune femme aux cheveux rose talonna Blanche et elles errèrent dans les différentes allées que Blanche détaillait avec précision.

« L'allée A, elle est réservée aux simples auscultations, et donc plus simplement à la médecine générale. »

Allyssandre jeta un coup d'oeil, de nombreuses portes fermées s'y trouvaient et de nombreux patients attendaient sur des chaises. Elles entrèrent alors dans la deuxième allée.

« L'allée B, celle réservée à la gynécologie et aux accouchements, c'est la partie dont s'occupe Aline que tu as vu tout à l'heure, elle est sage femme et gère donc cette allée. Elle n'est ici que depuis deux semaines mais j'ai déjà toute confiance en elle. »

Ceci expliquait donc pourquoi elle n'avait pas encore été rebaptisée, elle n'était arrivée qu'une semaine avant elle.

« Voici maintenant l'allée C, celle des graves traumatismes et divers accidents, c'est également ici que se trouvent les blocs opératoires. »

La jeune femme espérait secrètement qu'elle aurait l'occasion de mener des opérations, c'était en partie pour cela qu'elle avait voulu devenir médecin, pour sauver des vies. Blanche s'immobilisa devant un couloir qui lui semblait bien plus long que les autres, un hurlement venant briser le silence.

« L'allée D, est la seule allée où personne n'y a accès, à part moi évidemment. C'est l'allée des névrosés et plus communément des personnes les plus dangereuses. Tu tourneras sur plusieurs postes, mais tu ne t'aventureras jamais dans cette allée, c'est bien clair ? »

La jeune femme hocha la tête, bien que sa curiosité avait été piquée au vif. Néanmoins elle ne posa pas plus de question, ayant comprit que le sujet était clos du côté de Blanche. La grande femme blonde se tourna alors vers elle et lui tendit une main :

« Maintenant que vous avez fait le tour de l'hôpital, rentrez chez vous, reposez vous, le vrai travail commencera demain. Je suis ravie de collaborer avec vous. »

Dans un sourire, la jeune femme aux cheveux rose serra la main dans la femme en face d'elle.

« Moi de même. »

Blanche la raccompagna jusqu'à la sortie de l'hôpital, probablement pour s'assurer qu'elle ne se perdrait pas, ou ne s'aventurerait pas dans un lieu inapproprié pour elle. Lorsque la jeune femme sortit, elle leva la tête, le soleil étant haut dans le ciel. C'était agréable et l'été pointait le bout de son nez. Sa supérieur lui avait fait bonne impression malgré son air autoritaire, c'était une femme qui avait travaillé dur pour arriver au sommet et elle ne tolérerait pas une seule erreur de sa part, elle en était certaine. Plus déterminée que jamais, Allyssandre se promit qu'elle ne la décevrait pas.