Cairn hell, l écran bleu

bulbul

L'enfer est pavé de bonnes intentions...

L'enfer est pavé de bonnes intentions. Les intersections y sont noyées par des tas de cailloux . Empilages faits par des promeneurs qui semblaient savoir où ils allaient. Pire encore . Persona non Grata du grand barbu, les randonneurs de la morts ont assemblé  meticuleusement ces morceaux de pierres dans le but de nous aider. Pour nous donner La Direction.

L'enfer, c'est les cairns.

A-t'on demandé de l'aide ? Il devrait y avoir un panneau d'information dès les rives du Styx : "Chers promeneurs, merci de ne pas lapider la liberté de vos semblables", "Les pierres des uns ne doivent pas sauter aux yeux des autres" ,etc. Peut être serait-il nécessaire dans les Tartares de poser des distributeurs de sacs pour ramasser les empilages de cailloux et éviter de marcher dedans ? Pourtant, n'est ce pas là, le plaisir, face à la croisée des chemins, de prendre sa carte , observer, prendre des points de repères , définir un itinéraire ?

Mettre sa pierre à l'édifice ! Pour certain c'est une obsession, L'obsession d'un acte de construction pour une société meilleure. Inutile. Ecran bleu.

Tous nos cailloux finissent un jour ou l'autre en grains de sable sur la plage. Je ressens un certain plaisir quand, sur la rive, en toute discrétion, avec des coups d'œil furtifs ,ma progéniture va détruire le château de sable d'un autre. Il a observé qu'il avait été laissé vacant par son propriétaire temps d'une trempette. Attention, le voilà ! 

Mais non, sorti de l'eau, le bâtisseur scène va sécher dans une serviette avec son contremaître de père qui lui fourre des palets bretons dans le bec.

Territoires. Thanatos.

Il  ne faudra au vandale que quelques secondes pour céder à son désir .Et paf dans ta gueule le pont levis ! Que c'est drôle ! Mais celui qui à grand coups de pieds, se prend pour un Gargantua, n'a pas vu que dans son dos la grande bleue commençait à grignoter son oeuvre de l'après midi, une construction monumentale qui m'avait été présentée par son promoteur comme un complexe hôtelier  unique car bâti en plein désert. J'avais eu le droit à une visite inaugurale à l'heure du goûter " Là tu vois , j'ai fait un tunnel pour que les gens ...et pis ici là, y'a des piscines pour quand ils ont chaud. Ca , c'est la tour que j'ai construite pour qu'ils puissent dormir".

Bref, il semblerait que sur le tard de cet après midi ensoleillé mon architecte se soit reconverti dans la déconstruction. Il a même trouvé un galet avec lequel il scalpe les tours de son voisin de trempette. Il ferait mieux de se retourner ! Derriere lui, un remous d'écume saccage les murs de son Hilton quatari. Aïe, une vaguelette, et ses chambres pour milliardaires se délitent comme une charlotte pas assez fraîche...Les piscines viennent de se combler d'une purée de sable. Il peut encore sauver quelques pièces si il agit vite. Mais la destruction ça occupe ! C'est un vrai projet si on le fait méticuleusement. Pendant que la cité de Carcassonne est promise au rang de ground zero, la grande bleue finit d'avaler goulûment les derniers kilos de sable de la perle du désert et de son Sofitel.

Erosion

Transport

Sedimentation

Quelques millions de années plus tard, les spas , les discothèques reposent au fond de l'eau, compactés en une masse solide. On ne parle plus de sable. Mais de grès. Une roche sédimentaire. Un caillou pour faire plus simple.

Ça y est je me perds.... où voulais-je en venir ? ou plûtot , où voulais-je aller ? [...] Non ! Ne m'indiquez pas la direction ! Je vous vois déjà venir ... Par pitié laissez ces pierres par terre et trépassez votre chemin !

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