Carnaval

Christian Lemoine

Les portes de l'intelligence et de la compréhension ouvrent souvent le cœur sur des étendues étranges. Il y circule d'obscures humeurs, des supputations non négociables qui n'ont pour calibre que l'empan de leur déraison. On y voit, sous la surface plane des évidences, ramper des dogmes inflexibles aux remugles nauséabonds. Ou bien, sous cette gangue des idées reçues, des théories exténuées à force d'abus.

Nous n'en serons jamais quittes. De la fatuité des dominants splendides, qui labourent de leur jouissance les âmes sans utopie. Des calculs de statistiques aléatoires où les pérégrinations des courbes provoquent la nausée des manèges endiablés. De la superbe des nababs de toute extraction, en inflation de leur appétit insatiable, qui dévorent comme mâchoires métalliques le périssable sol de leurs enjambées frénétiques. De l'outrecuidance des imbéciles, sûrs de leur supériorité parce qu'ils méprisent ce qui les dépasse.

Ce brillant carnaval, comme une submersion rompant les digues, emporte en la furie des courants limons et germinations, pour ne laisser à la décrue que débris, fanges et boues. Et tous les cossus cupides contemplent avec extase, en millions de pixels, les aspérités coralliennes de leurs futures sépultures.

Signaler ce texte