Clandestins

Nicolas Pellion

1er mars 2019

Goût étrange, comme un manque après l'emballement. Ce serait drôle d'entrouvrir à peine la porte pour l'introduire dans un courant d'air, de refermer avec précaution que le pêne ne claque pas, que l'intrusion reste silencieuse, juste des mots perdus dans un chuchotement, avant de s'éloigner en profondeur dans l'appartement, que nul ne nous entende, les cœurs battants peut-être par crainte d'être surpris, avec l'excuse toute prête d'une ampoule à changer, d'un besoin d'outil ou d'une complicité de voisinage, puis l'effleurement des souffles, des paumes, l'hésitation première, l'effacement de la timidité, le rapprochement, la libération des ardeurs, l'empoigne, l'imbrication, la moiteur, les frissons, les tremblements, le plaisir brut, animal, clandestin, sans passé, sans avenir, l'instant présent. J'ignore si la rencontre physique aura lieu, si nous passerons sans déception l'examen de la réalité, si nous créerons une bulle, même d'un instant, pour assouvir le désir, un fantasme, son corps, ses mains, sa peau, son odeur, son regard... nos sexes en bataille, nos ventres accolés, nos jambes emmêlées, nos bouches avides...

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