Commun dimanche

Jean Claude Blanc

divagations d'un dimanche de printemps arrosé

            Commun dimanche

Commun dimanche fin de semaine

Plus bien alerte j'étire ma flemme

Déjà passée la soixantaine

Je me retire de la scène

Las de cette comédie humaine

Maigre le bilan de mon existence

Guère brillantes, mes performances

Se la ramène ma conscience

Pour en mesurer les conséquences

 

Pourtant je n'ai pas à me plaindre

Mes deux mouflets intelligents

Se désolent que je ne cesse de geindre

A jouer ainsi les indigents

Jouissent de leur jeunesse, ça me réconforte

Mais loin de moi, le diable m'emporte

A croire que ma mémoire est morte

Plus personne frappe à ma porte

 

Livre bataille à mes démons

Sur mes montagnes de soucis

De cogiter, c'est pas bien bon

Plus d'appétit, tellement aigri

 

Passé ma vie à m'inquiéter

Des chiens galeux, ces mal-aimés

Jusqu'à choyer femme et enfants

Le résultat, plus que parfait

Je coule à pic, dans le néant

 

Ne l'ai appris que par ouïe dire

Que les épreuves font grandir

Moi qui déborde d'énergie

Peut-être le suis du type maudit

Plus je me démène et plus j'en chie

 

Ce 8 avril anniversaire

Petit retour en arrière

Y'a 24 ans qu'est mort mon Père

Soudain chopé par le cancer

 

« Je me souviens, je me rappelle »

Me tourne en boucle en ma cervelle

« Je le regrette, je me morfonds »

C'est devenu une obsession

 

J'ai beau en faire tout un plat

Rabibocher notre tribu

C'est terminé, chacun chez soi

Pour le pleurer, peine perdue

Par chance, choisi la meilleure arme

Pour me défendre de mes états d'âme

Avec ma plume verse des larmes

Illusionniste bidonne les drames

Me console bien que l'indifférence

Que je me concocte, seul en silence

 

« Il est parti, Papa chéri

Lui si serviable, si gentil

Il est sans doute Au Paradis »

J'en fais des tonnes de ces âneries

Comme « reviendra en son pays

Fumer sa clop de tabac gris »

Lui, disparu d'une pneumonie…

 

Cherche une raison à mes angoisses

La trouve de suite en ce jour triste

Mon vieux est là, ça me trépasse…

Feu d'artifice fameux l'artiste

 

Pour m'évader de ma nostalgie

Choisi la voie de la fourberie

Mourir de rire, antibiotique

Faire des vers, potion magique

Pleins de vitamines, comme les lombrics

 

Etant bouché mon horizon

Pour m'en tirer, seule solution

Mettre mes neurones en action

Tout effacer sur internet

Dans ma jugeote faire place nette

Pour rebâtir ma raison

 

Excusez-moi, suis dur à suivre

Tellement fantasque de nature

Mais pour survivre à mes souvenirs

Mon esprit part à l'aventure

 

Ces quelques lignes déjà me délassent

Même que j'y découvre ce qui me tracasse

Ces sombres pensées, qui me tenaillent

Les chasse de mon crâne, ces vieilles canailles

 

Alors la fièvre du dimanche soir

Fermée ma boite, y'a pas de pétards

N'étant camé qu'au désespoir

Pour m'en soigner, broie plus du noir

En relisant tous mes couplets

Je m'aperçois que j'ai progressé

Car le début, bien tristounet

J'en termine fort, d'humour comblé

Commun dimanche, je me promène

Sur mes versets et mes poèmes

Bottant les fesses à mes problèmes

Même si c'est pas du Verlaine

 

Ces anonymes cauchemars

Me prennent la tête, tard le soir

Ne me contant que des sornettes

Vais pas sortir mon mouchoir

Mon Père s'est barré pour perpète

Dans les étoiles du ciel il guette

Ma proche visite, pour faire la fête

 

Mes 2 amours de gamins

Je les soutiens, me le rendent bien

Me laissent pas seul dans mon coin

A agonir comme un chien

 

Lentement, sûrement, je me libère

Près de minuit, j'y vois plus clair

C'est le moment où se déchaine

Mon optimisme sans aucune gêne

 

Bien venu mon art de scribouillard

Qui me décharge de mes doutes

Car pour sortir de ce brouillard

Moi si sensible, ça me coûte

 

Dimanche sacré, jour du Seigneur

Vais me consacrer à mon labeur

Pour mes amis, compte pas mes heures

Les soulager de leurs malheurs

Ravivant leur for intérieur

Pour les bonnes œuvres, génial sauveur

 

Malade de la tête de trop m'en faire

En quelque sorte bipolaire

Faut se le payer mon caractère

Qui endosse les péchés de la Terre

 

Ce que je déteste les week-ends

Où trainent leurs guêtres les âmes en peine

Rituelles balades dans le passé

Préfère mon rôle de déboussolé

Brave Papa, songe à mes gosses

En ma baraque pas à la noce

Sombre dimanche, émerge lundi

Vais me lever tôt de mon lit

Pour regagner mon haut pays

Là où me réclament mes conscrits

Comme dimanche m'est proscrit

Notamment le jour de la Saint Guy

Pauvre de moi Saint Jean d'hiver

Je me les gèle, singe en hiver

Deux vers de trop, bête j'exagère

D'avance, bon pour la fourrière

 

La fuite du temps, vaste sujet

Les philosophes l'ont chantée

Mais impossible à rattraper

Vivons l'instant, ça de gagné

 

Souvent on cherche faire une trêve

Sur l'improbable destinée

Un jour férié, un jour de grève

Tous religieux et ouvriers

Pour une fois réconciliés

Sachant que pour gagner son pain

C'est la semaine des sept matins

Même en profitent les magasins

Toujours ouverts, que pour leurs gains

 

Marché commun, n'a pas de fin

Pour le péquin se reposer

Manquent la messe, mauvais chrétiens

Faisant la grâce matinée

Belle excuse pour déserter

Leurs mégères en leur foyer

Surtout dimanche, faire le tiercé

Un coup de Ricard, pour communier

 

C'est pas mon genre de pratique

Vénère que mon Auvergne bucolique

J'endure le vent, la pluie, la foudre

Sûrement maso, mais rien à foutre

 

Commun dimanche de printemps

Quelle douceur cette mi saison,

Mimi pinson, pincée de nichons

Mon coucou chante, c'est de bon ton

Tellement de chattes, il est gourmand

Pardonnez-moi ces allusions

De libertin en rémission

Y'a des jonquilles plein les prés

Qui présupposent un bel l'été

Déjà l'automne en mes pensées

Je ne me sens pas de mon époque

Ce 21ème siècle, que de la camelote

Vendue par des prêcheurs cinoques

Les dieux sont tombés sur la tête

Offrent aux barbus de puissants sceptres

Coupé cabèche, Super-Market   JC Blanc avril 2017  (divagations Common Sunday…)

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