Couloir

Christian Lemoine

Enfants qu'ils sont ! Dans le couloir sombre de la maison nocturne, des formes se prolongent sous les rais minces, vagues pâleurs de lune. Parquets et armoires, autant de caches assassines où grincent des dents de trépassés. Enfants ! Ils dissimulent sous les draps des terreurs de cauchemar. Le lit pleure l'insomnie, les murs tremblent la fièvre des sommiers trempés ; l'oreiller mord et se déchire. Puis, les jours pastellisent, édulcorent ; défraîchie la peur enfantine, troquée contre des sérieux de manutentionnaires pragmatiques. Couloir, ne laisse plus galoper déchaînées les juments infernales, ni ne convoque à ses cérémonies les démons décharnés. Les froideurs panoptiques ont asséché dans leur bonhomie toutes les sueurs ; pour jamais asséchées. Couloirs ; de raison, de procédures méthodiques, le cartésien en guide des conduites. Couloir. Bien plus effrayant dans la calme sérénité des cloisons d'équanimité. Des portes de part et d'autre, enfants, où vous ne cherchez plus l'ogre ni le maléfice. Mais ce couloir, de tous vos tourments ; ce couloir à gueule béante où vous glissez d'adulte en ancêtre, au bout le gouffre omnivore.

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