Dans la peau de Maddy Bleck

justmims

Je voulais partager un extrait d'une idée de Roman. Je ne vous en dit pas plus j'attends vos avis.

Dans la peau de Maddy Bleck.

Chapitre 1 : Coéquipiers.

L'homme est un vaste sujet à explorer. Le cerveau tout particulièrement, qui fait en sorte que chaque individu est différent, et en même temps tellement proche. Le comportement de chaque homme, sa manière de réagir face à certaine situation, dépend de son vécu, et tout particulièrement de ses traumatismes.

Ce qui m'intéresse tout particulièrement… ce sont ceux qui semblent n'avoir aucune conscience morale. Les tueurs en série. Un tueur en série naît il ainsi? Porte-t-il un gène? Ou le devient-il suite à ses traumatismes? Dans la plupart des cas, les tueurs en série ont un même point commun. Ils ont tous vécu un drame familiale ou autre dans le passé. Souvent, on retrouve une similitude entre les faits de leurs traumatismes et leur mode de fonctionnement.

D'ailleurs, il y a un certain aspect ironique avec eux, car un tueur en série ne souhaite évidemment pas exposer les preuves de sa culpabilité (traces de sang, empreintes, etc), de peur que la police scientifique ne remonte la piste jusqu'à son identité. Cependant, lorsqu'ils prennent de l'assurance, ils se créent… une sorte de signature, propre à eux même. Le terme signature est ici employé comme désignant un signe de distinction dans leur tuerie. Pour nous faire comprendre: c'est moi qui l'ai fait et pas quelqu'un d'autre. Ils jouent littéralement avec ceux qui les traquent: la police scientifique et criminelle.

La plupart sont méthodique, et leur savoir faire vient de leur passé. Ils s'entraînent sur de simples animaux en premiers lieux, et en général c'est un signe révélateur du tueur en série en devenir. Mais certains pourraient me dire: Les chasseurs, les pêcheurs, ou même l'homme tout simplement, tue parfois l'animal de sang froid sans éprouver le moindre remords, et pas seulement dans le but de se nourrir. Oui, l'homme est capable de tuer de sang froid. Et ce depuis les époques d'antan.

Bien avant même l'époque médiévale, dans laquelle la chasse (et les terrains prévus pour celle ci), n'était réservée qu'à la noblesse et aux rois. Et pour eux, abattre des animaux n'était pas dans un but spécifique. Ils appelaient cela une battue. Ce n'était pas juste un besoin vital, puisque le roi et ses disciplines, ainsi que les plus riches visages du Royaume, mangeaient le plus souvent à leur faim. Au dépend du peuple, bien trop pauvre. D'ailleurs, si un pauvre paysans se risquait à chasser sur les terres du roi… Il prenait grands risques pour sa vie et celle de sa famille. Et oui, parce que l'homme de cette époque prenait plaisir à pendre, brûler, et massacrer parfois des innocents sans autres forme de procès (le peuple d'ailleurs regardait et acclamait parfois ces actes sanglant), mais l'homme ne s'arrêtait pas là. Il violait des femmes, pillait et saccageait des maisons lors des guerres entre Royaumes, quand l'un des deux Rois triomphait et gagnait le château et les terres de l'autre.

C'est une raison suffisante pour dire que la psychologie humaine est complexe, car ces hommes à l'époque n'étaient pas considérés comme étant des tueurs… Pourtant ils ont prit plaisir à tuer un animal, et même un humain, et c'est un signe qui ne trompe pas. Comme quoi peut être que dans tout homme se cache un sadique… Un monstre. Un déficient. Il me vient donc une question à l'esprit… est-ce que pour certains, le plaisir de tuer pour la première fois est une révélation de leur condition de tueurs? Le plaisir de la première fois serait peut-être… Leur déclic?

Nous arrêtons ici les thèses et les hypothèses très cher lecteurs qui lisez mes lignes… Ce n'était pas de simples questions, et ce n'était pas une simple thèse à la con faite par une petite étudiante au cul serré. Je suis la réponse à la question ci-dessus. Je n'ai pas eu une enfance difficile, j'ai dix huit ans et j'ai eue, comme une personne normale, des parents aimants et protecteurs.

J'ai été à l'école, et nous avons même eu le plaisir de découvrir ma famille et moi même à l'époque, que j'étais plus intelligente que la plupart des jeunes de mon lycée. Oui, je me savais différente… mais non, ce n'est pas mon QI qui m'a posé problème à l'adolescence. Je pense que vous pouvez tout à fait imaginer la suite, ce que je suis, ce que je fais… je suis en réalité votre pire cauchemar.

Je n'arrivais pas à ressentir le moindre sentiments positif. Comme une foutue ado en pleine crise d'hormones, j'aurais dû tomber amoureuse d'un gars et parler de sa belle musculature toute la sainte journée avec mes copines (qui ne devraient être que de pâles copies de moi même, mêmes problèmes, mêmes envies, une typique vie d'ado en bref). De même que j'aurais dû commencer à avoir peur des changements de mon anatomie, essayer de mettre en valeur ( ou de cacher), mes seins hors norme pour mon jeune âge.

Je pourrais vous rédiger entièrement le portrait typique de l'ado rebelle, de l'ado amoureuse, de l'ado en crise, ou de celle prête à tout pour exister aux yeux des bouffons de sa classe. Mais mon récit serait d'un ennui mortel, et je pense à vous pauvre lecteurs.

En clair, je n'ai pas vécue ce genre d'adolescence. Je simulais toute cette vie d'adolescente, avec ses émotions, son lot de sentiments puériles et stériles. Tout ce flot de choses que ressentent les personnes normales, surtout dans cette période importante de la vie, je le simulais. Oui, je devine ce à quoi vous pensez… J'ai simulée aussi ma première relation sexuelle ainsi que les suivantes.

Je trichais intérieurement. Je portais mon masque de porcelaine, affichant des sourires niais, forcés, mais apparemment crédibles… car j'ai échappée à la vie marginale qu'aurait du avoir le monstre que j'étais. J'ai beaucoup d'amis. Mais ne vous fiez pas aux mots que j'emploie pour me décrire, la sans coeur, la simulatrice, le monstre. Sachez que je préfère cent fois ce monstre que je cache, à cette personne que je me force de montrer chaque jours. Et donc, si vous vous posez la question: chez moi, l'envie de tuer à été transmise génétiquement.

Du moins c'est la seule hypothèse qui m'est venue à l'esprit quand j'ai appris que l'un de mes arrière grand père était un psychopathe, condamné à la perpétuité pour plus d'une vingtaine de meurtres, pour lesquels il a avoué n'en avoir commis que dix. Cela ne venait sûrement pas de mes parents, ils n'avaient aucun signes caractéristiques des criminels lambda, ou annonçant une quelconque instabilité émotionnelle.

Les déficients se reconnaissent entre eux, sachez le. Quelque chose dans le regard… et le premier regard similaire au mien que j'ai pu croiser s'est imprimé dans ma mémoire à la minute où nous nous sommes retrouvés face à face. Nous nous sommes compris, nous nous chamaillons souvent, mais nous sommes devenus les meilleurs amis du monde. Au collège.

Billy Dickens. Je crois qu'il a compris ce que j'étais avant que je ne le comprenne moi même, parce que j'ai pu lire dans ses yeux toutes les réponses aux questions que je me posais sur ma condition depuis toujours. Enfin, d'aussi loin que je me souvienne. Des questions venues tôt, car même en étant gosse, je tiquais sur le mot “aimer”. Je demandais souvent à ma mère ce que cela voulait dire. Mais elle faisait semblant de ne pas m'entendre, donc j'ai attendue d'avoir des réponses par moi même (c'est à dire dès que j'ai eu l'âge d'utiliser l'ordinateur de mes parents, en cachette bien sur).

J'ai dû apprendre à le faire apparaître sur mon visage dans quelques circonstances. Lorsque mes parents me demandaient si je les aimais par exemple. C'était très gênant, parce que la première fois j'ai juste répondue que je ne savais pas ce que c'était, et ils avaient semblés très inquiet. J'ai fais semblant de rire comme si je leur faisais une blague, mais je n'oublierais jamais leur visage tordus et pensifs. J'ai su de suite que je risquais d'avoir des rendez-vous chez le psychologue. Bill m'a toujours mise en garde avec ça.

Mais je ne vous ai pas encore dit comment j'ai rencontré la personne la plus importante de ma vie. Cette journée n'avait pas été de tout repos, toutes mes “amies” me demandaient quand comptais-je sortir avec le beau brun qui me tournait autour depuis des semaines.

Elles me broyaient les oreilles avec leur voix suraiguë, en me forçant à sortir au cinéma le week-end même, pour aller voir une comédie romantique à vomir.

-Ces idiotes ne comprennent donc pas le mot “Jamais”, je n'aime pas ce bouffon c'est pourtant pas compliqué, marmonnais-je, furieuse. Ni leur foutue comédie à la con!

Dès la fin de la journée, je laissais toute ma colère contenue s'échapper de mes lèvres, et jouissait de ma courte mais non moins agréable solitude retrouvée en mettant la capuche de mon sweat-shirt de collégienne sur ma tête, avec en prime mes écouteurs collés aux oreilles, planant, le regard dans le vide. Soudain, un bruit assez fort pour traverser mes écouteurs me sortit de ma rêverie. Ainsi que du garçon de l'autre côté de la route qui souleva sa capuche en même temps que moi.

Mon regard s'est immédiatement attiré comme un aimant sur la biche morte au milieu de la route en béton. Le sang formait une flaque parfaite autour d'elle… N'importe qui aurait, soit tracé son chemin, soit essayé de ramener l'animal sur le rebord pour vérifier s'il était bien mort. Et moi… un sourire se formait sur mon visage et je m'étais arrêté comme pour contempler une oeuvre d'art, dans un silence presque religieux. Je savais que quelque chose clochait chez moi, je ne m'expliquait pas quoi, et c'est Bill qui m'a donné la réponse.

J'ai levé les yeux, attirée par son regard posé sur moi. J'ai eu un court instant de panique en pensant que ce que je faisais était mal et qu'il me jugerait folle, comme mes parents quand j'ai un comportement anormal. Mais quand j'ai vue son sourire et le regard intense qu'il a posé sur moi, ses yeux qui m'ont compris à cet instant… j'ai su que nous étions pareil. Et surtout, qu'en cet instant précis, il allait bouleverser ma vie, parce que nous ne pouvions pas ressentir d'amour l'un pour l'autre… Mais si c'était le cas, je crois que nous serions amoureux. Je crois que nous serions mariés, avec trois gosses, une maison, un chien, et une voiture familiale. La parfaite famille.

Mais bien sur nos envies étaient autres. Les choses banales, les sorties en ville, les cinés, sont tâchés par le sang de nos pulsions. Et cette passion, nous ne pouvons la partager qu'à deux. Quand à notre mode de fonctionnement et notre signature… Nous les partageons aussi. C'est comme si nous étions des jumeaux dans nos moments de trans, jusque dans les moindres faits et gestes. Et pour les victimes, nous ne traquons que des criminels recherchés qui se cachent dans la nature, où des criminels tout court. Avec une liste de noms que Bill vole à son père, qui, par pur coïncidence, est flic. Un flic qui élève un meurtrier, y a pas plus con, vous ne trouvez pas ?

-On ne choisit pas ses parents, Maddy, m'a-t-il lancé un jour. Et je crois que si mon père savait ce que je suis… Il n'aurait jamais voulu d'un fils comme moi.

Nous étions allongé dans un champ proche de chez moi, une bouteille de champagne bon marché qu'on avait pour habitude de se partager après les cours. C'était notre petit rituel à peu près normal d'adolescents, en dehors de notre passion peu commune… Et peu conviviale je vous l'accorde.

-Bah écoute, chacun ses défauts. Ton père est un putain de flic alcoolique, les miens me mettraient bien à l'asile, et nous, nous sommes des monstres… Mais nous, on a pas eu le choix Billy. Eux ils l'ont, soit ils nous aiment tels qu'on est, soit ils continuent à faire comme si nous étions des gosses normaux. Mais un jour ou l'autre ils le découvriront, s'ils ne s'en doutent pas déjà.

-Tu sais le plus glauque? J'ai même pas peur du jour où ça arrivera. J'ai pas peur de les perdre, ni peur de voir la déception dans leur regards. Il n'y a qu'une seule personne sur terre que j'ai peur de perdre, Maddy… Et c'est toi.

-On pense pareil, Dickens. Bon passe la moi cette bouteille, fais pas ton radin, dis-je en souriant intérieurement.

-Moi ? Tu veux que je te rappelle la semaine dernière ?

C'était la chose la plus belle qu'on m'ait dite, et j'ai pensé en cet instant que peut-être... je pourrais l'aimer. Vraiment. Peut être que j'étais un peu humaine pour une fois. Il a claqué des doigts devant ma figure. Et je sortais de ma rêverie.

Nous finissions d'emballer le corps, je posais une nappe dans le coffre et déposais les sacs séparant les différents membres du corps d'un mafieu appelé Renald Bocelli, suspecté du meurtre d'une femme et de sa fille. Nous avions trouvé les preuves de sa culpabilité avant même que le père de Billy ne se penche sur l'affaire. Enfin bon, son alcoolisme nous donnait la plupart du temps un bon temps d'avance sur lui. En résumé, Renald les avait tué l'une en face de l'autre, poussant la mère à lui avouer une vérité. Sûrement sur le fait que son mari avait tenté de rouler Renald en volant toute sa coke pour la revendre. Hélas, même en ayant divulguée toutes les informations qu'elle avait sur son mari pour protéger sa fille, il l'a abattu devant les yeux de sa mère.

-C'est triste, dis-je à Billy.

Il se mit à rire, et à chaque fois qu'il se foutait ainsi de moi j'avais une furieuse envie de le découper en rondelle.

-Rigole encore et tu finis comme lui, sauf que je planterais les morceaux de tes membres sur une brochette géante que je ferais cuire au barbecue.

-Tu baptiseras la brochette en mon nom?

-Pas le temps, je t'aurais déjà bouffé.

-Tu es diabolique.

-Je sais.

N'ayez craintes, nous ne sommes pas cannibales. Petite précision. 

Il n'y avait pas d'éclats dans nos regards respectifs, pourtant nous nous aimions à notre manière, mieux que n'importe qui d'autre ne pourrait le faire.

Un amour dissimulé, inexpressif, unique. Particulier.

Pendant les vacances, je tentais de le voir tous les jours, nous avions nos petits “playdate” habituels avec Billy… Mais mes parents sont entrés dans ma chambre, le sourire aux lèvres, quelques jours après le début des vacances d'été, et je savais instinctivement que ça n'augurait rien de bon.

-Commence à préparer ta valise, Chérie, nous partons pour Cuba.

Mon visage ne reflétait aucune émotion à cet instant précis, pourtant un flot de rage traversaient mes veines et l'envie de les tuer sur place grandissait, tellement forte, elle s'insinuait en moi comme une drogue. Je passais devant eux sans même leur décrocher la moindre parole, claquait la porte et courait aussi vite que possible jusque chez lui.

J'explosais. Je devenais dangereuse pour moi-même à cet instant, car j'aurais pu tuer n'importe qui sur le chemin. Un chien. Le voisin. La petite vieille qui me proposait des bonbons à chaque fois que je passais devant chez elle, au coin de la rue. N'importe quel passant. Heureusement, je ne possédais pas d'arme. Et je contrôlais plutôt bien mes pulsions. Mais j'avais besoin de décharger ma colère, ou de me canaliser. Il n'y avait que lui qui pouvait me gérer.

Pas de voitures, ses parents n'étaient visiblement pas chez lui. Parfait. Je toquais à la porte en déchargeant une petite partie de ma haine sur la porte. Quelques minutes passèrent.

-Répond enfoiré, ou je te trucide dans la seconde.

Une dame avec son bébé passa devant moi au même moment, me lançant un regard que j'aime appeler “le regard outré de la prude”, celui que me réserve ma mère à chaque fois que je dis ou fais quelque chose d'inapproprié en public.

-Vous avez besoin de quelque chose peut-être ?, lui dis-je calmement, en la regardant déguerpir.

La porte s'ouvrit enfin. Billy était à moitié endormi, il me fit signe d'entrer sans rien dire, me priant aussi de fermer ma gueule en posant délicatement un doigt sur ma bouche, le temps d'émerger, ce que je fis en m'asseyant dans le sofa vintage du salon. La maison entière était imprégnée par l'odeur de pastis et de cigare de son père, Billy partageait d'ailleurs à peu près cette même odeur sur lui, avec un soupçon de vanille.

Vous trouverez ça peut-être étrange chez un homme, de porter de la vanille, mais moi je l'aime. Je pourrais respirer son odeur pendant des heures, si j'étais une fille normalement conçue. Je me sentais comme chez moi, chez lui, lorsqu'il n'y avait pas la présence pesante de ses parents. Ses parents essayaient tous les jours de faire bonne figure, le paraître était ce qu'ils jugeaient de plus primordial.

Ils étaient très investi dans la vie de notre petit village, dans les commémorations, les événements, le bénévolat, les kermesses etc. Ils affichaient constamment un masque impassible et un sourire sans faille devant les habitants de Pentburg. Ils n'étaient pas si différents de mes parents… et de nous deux, puisque d'un sens nous nous cachions aussi derrière une façade.

Mais la réalité les rattrape parfois, son père bois pour encaisser, sa mère prend des somnifères et s'endort les larmes au yeux. Je les trouves pathétiques, Billy aussi. Ils ne m'aiment pas beaucoup non plus, parce qu'ils me trouvent vulgaire. Je suis vulgaire non pas parce que c'est cool ou pour me donner un air de dure à cuir, je suis vulgaire parce que j'extériorise une colère dont je ne connais pas la raison, mais ça ils ne pourraient pas le comprendre. Et de toutes manières je m'en contre fou d'eux, j'aime leur fils et c'est tout. Bref, je m'égare.

-Je peux?

Je lui demandais toujours avant de prendre la parole, histoire de ne pas lui prendre la tête dès le matin. Il me sourit pour toute réponse.

-On ne se verra pas cet été.

Il ne répondit rien, le visage inexpressif, me fixa pendant plusieurs longues minutes.

-Pourquoi?

-Mes parents m'emmènent à Cuba. 

En une seconde, un clignement de paupières, il a renversé tout ce qui lui tombait sous la main, balançant lampes chaises, pour finir par jeter son poing contre le mur, en plein milieu du miroir du salon. 

-Prépare toi, on part en chasse.

Voila comment on extériorisait nos émotions.

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