De l'attente ...

douxfoutropforever

Un texte de Francis Lucille ... J'aimerais porter le même nom que la guitare de BB King ... ! https://youtu.be/-Y8QxOjuYHg



Que pouvons-nous attendre de nos rencontres ?

Apprendre à ne pas attendre.

Ne pas attendre est un grand art.

Quand vous ne vivez plus dans l'attente, vous vivez dans une nouvelle dimension.

Vous êtes libre. Votre mental est libre. Votre corps est libre.

 Comprendre intellectuellement que nous ne sommes pas une entité psycho-physique tendue vers le devenir est une première étape nécessaire, mais cette compréhension n'est pas suffisante.

 Le fait que nous ne sommes pas le corps doit devenir une expérience réelle qui pénètre et libère nos muscles, nos organes internes et même nos cellules.

 Une compréhension intellectuelle qui correspond à une re-connaissance subite et fugace de notre vraie nature nous apporte déjà un éclair de joie pure, mais, lorsque nous avons pleine connaissance que nous ne sommes pas le corps, nous sommes cette joie.

Comment puis-je percevoir sensoriellement que je ne suis pas le corps ?

Nous éprouvons tous des moments de bonheur qui s'accompagnent d'une perception d'expansion et de relaxation.

Avant cette perception corporelle nous nous trouvions dans une expérience intemporelle, une joie sans cause et sans mélange, dont la sensation physique n'est que le contre-coup ultérieur.

Cette joie se perçoit elle-même.

A ce moment, nous n'étions pas un corps limité dans l'espace, nous n'étions pas une personne.

Nous nous connaissions nous-même dans l'immédiateté de l'instant.

Nous connaissons tous cette félicité sans cause.

Quand nous explorons en profondeur ce que nous appelons notre corps, nous découvrons que sa substance même est cette joie.

 Alors nous n'avons plus le besoin, ni le goût, ni même la possibilité de chercher le bonheur dans les objets extérieurs.

Comment accomplir cette exploration en profondeur ?

Ne refusez pas les sensations corporelles et les émotions qui se présentent à vous.

Laissez-les s'épanouir complètement dans votre vigilance sans but, sans aucune interférence de la volonté.

Progressivement, l'énergie potentielle emprisonnée dans les tensions musculaires se libère, le dynamisme de la structure psychosomatique s'épuise, et le retour vers la stabilité fondamentale s'effectue.

Cette purification de la sensation corporelle est un grand art.

 Elle requiert patience, détermination et courage.

 Elle se traduit au niveau de la sensation par une expansion graduelle du corps dans l'espace environnant et une pénétration concomitante de la structure somatique par cet espace.

 Cet espace n'est pas vécu comme une simple absence d'objet.

Quand l'attention se libère des perceptions qui la fascinaient, elle se découvre elle-même comme cet espace auto-lumineux qui est la véritable substance corporelle.

A ce moment la dualité entre le corps et cet espace s'abolit.

Le corps s'est dilaté à la mesure de l'univers et contient en son sein toutes les choses tangibles et intangibles. Rien ne lui est extérieur.

Nous avons tous ce corps de joie, ce corps d'éveil, ce corps d'accueil universel.

Nous sommes tous complets, sans aucune pièce manquante.

 Explorez seulement votre royaume et prenez-en possession sciemment. Ne vivez plus dans cette hutte misérable qu'est un corps limité.

J'ai de brefs aperçus de ce royaume dans des moments de tranquillité, puis je vais au travail et me trouve dans un environnement qui n'est ni royal, ni paisible, et ma sérénité me quitte aussitôt. Comment puis-je garder mon équanimité en permanence ?

Tout ce qui apparaît dans la conscience n'est rien d'autre que conscience, vos collègues de bureau, les clients, vos supérieurs, absolument tout, y compris les locaux, les meubles et le matériel. Comprenez-le d'abord intellectuellement, et vérifiez ensuite qu'il en est bien ainsi.

Il vient un moment où ce sentiment d'intimité, cet espace de bienveillance autour de vous ne vous quitte plus ; vous vous trouvez partout chez vous, même dans la salle d'attente bondée d'une gare.

Vous ne le quittez que lorsque vous allez dans le passé ou dans le futur.

Ne restez pas dans la hutte, cette immensité vous attend ici même, en cet instant même.

Informé de sa présence et ayant goûté déjà une fois à l'harmonie sous-jacente des choses, laissez les perceptions du monde extérieur et vos sensations corporelles se déployer librement dans votre attention bienveillante jusqu'au moment où l'arrière-plan de plénitude se révèle spontanément.

Ce renversement de perspective est analogue à celui qui permet de reconnaître soudainement une figure angélique dans l'arbre d'une de ces gravures qui faisaient la joie des enfants du début du XXème siècle.

 D'abord, nous ne voyons que l'arbre, puis, informé par un message au bas de l'image qu'un ange s'y cache, nous procédons à un examen minutieux du feuillage, jusqu'au moment où nous voyons enfin l'ange qui avait toujours été devant nos yeux.

L'important est de savoir qu'il y a un ange, où il se cache, et d'avoir expérimenté une fois le processus au cours duquel l'arbre se désobjectivise progressivement jusqu'au moment où les lignes de la gravure qui en constituaient la substance apparaissent en tant que telles et se recomposent pour nous livrer le secret de l'image.

La voie ayant été frayée, les renversements ultérieurs de perspective sont de plus en plus aisés jusqu'au moment où nous voyons pour ainsi dire simultanément l'arbre et l'ange.

De manière similaire, une fois notre nature profonde re-connue, les distinctions résiduelles entre ignorance et éveil s'estompent progressivement pour céder la place à l'ainsité fondamentale de l'être.

Je commence à me rendre compte que je suis englué dans mon corps, mes sensations et mon impression d'être un individu séparé.

Comment cet engluement se manifeste-t-il ?

Je me sens comme hypnotisé, à la fois par mes pensées d'orgueil, mes émotions, la colère surtout, et par l'agitation de mon corps.

Bien. Dès que vous prenez conscience que vous êtes hypnotisé, l'hypnose cesse.

Pourquoi cela ? Ce point n'est pas clair pour moi.

Demandez-vous qui est hypnotisé. Interrogez-vous profondément. Qui est-ce ? Où est-il ?

Vous allez voir qu'une telle entité est introuvable. Si vous explorez votre psyché et votre corps, vous allez trouver quelques concepts auxquels vous vous identifiez tels « je suis une femme », « je suis un être humain », « je suis une avocate », etc.; vous pouvez aussi trouver certaines sensations dans votre corps, certaines zones plus opaques, plus solides auxquelles vous vous identifiez également, mais quand vous y regardez de plus près, il devient évident que vous n'êtes pas cette sensation dans votre poitrine, ni cette pensée d'être une femme, car sensations et pensées vont et viennent et ce que vous êtes réellement est permanent.

A ce moment précis l'hypnose cesse. Le problème est moins l'occurrence de ces pensées et sensations que votre identification avec elles.

 Dès que vous prenez conscience d'elles, vous vous distanciez, vous êtes libre.

Dans cette liberté, vous ne vous situez nulle part. Il est important de demeurer dans cette non-localisation, car nous avons tendance à nous empresser de saisir une nouvelle identification dès que nous avons lâché prise de la précédente, tel un singe qui ne lâche pas une branche avant d'en avoir saisi une autre.

Vous allez voir combien il est merveilleux de vivre en l'air de cette manière, sans saisir, sans attaches.

Au début cela semble un peu étrange, bien que votre nouvelle attitude n'empêche rien.

 Vous pouvez toujours remplir vos fonctions de mère ou d'avocate, sentir votre corps, etc… En fait, n'être rien, en l'air, nulle part, est très pratique.

Cela simplifie beaucoup la vie. Ne vous contentez pas de comprendre, mettez en pratique votre compréhension. Essayez de n'être personne. Lâchez les branches.

N'est-il pas difficile de revenir ensuite dans son corps pour vivre le quotidien ?

Vous n'avez jamais été dans votre corps, donc la question d'y revenir ne se pose pas.

 Votre corps est en vous, vous n'êtes pas en lui. Le corps vous apparaît comme une série de perceptions sensorielles et de concepts.

 C'est ainsi que vous savez que vous avez un corps, lorsque vous le sentez ou lorsque vous y pensez.

Ces perceptions et ces pensées apparaissent en vous, pure attention consciente.

 Vous n'apparaissez pas en elles, contrairement à ce que vos parents, vos éducateurs et la quasi-totalité de la société dans laquelle vous vivez vous ont enseigné, en contradiction flagrante avec votre expérience réelle.

 Ils vous ont enseigné que vous êtes dans votre corps en tant que conscience, que cette conscience est une fonction émergeant du cerveau, un organe de votre corps.

Je suggère que vous n'accordiez pas une confiance démesurée à cette connaissance de seconde main et que vous interrogiez les données brutes de votre expérience.

Vous souvenez-vous des recettes de bonheur qui vous ont été données par ces mêmes personnes quand vous étiez une enfant, faire de bonnes études, avoir une bonne profession, épouser un homme de qualité, etc. ?

Ces recettes ne marchent pas, sinon vous ne seriez pas ici, posant ces questions.

 Elles ne marchent pas parce qu'elles sont fondées sur une perspective fausse de la réalité, perspective que je vous suggère de remettre en question.

Voyez donc par vous-même si vous apparaissez dans votre corps ou dans votre mental, ou si au contraire ils apparaissent en vous.

C'est un renversement de perspective analogue à la découverte de l'ange dans l'arbre.

Bien que ce changement puisse paraître minime au début, c'est une révolution aux conséquences insoupçonnables et infinies.

Si vous acceptez honnêtement la possibilité que l'arbre soit en fait un ange, l'ange se révèlera à vous et votre vie deviendra magique.

Pourriez-vous nous parler de la pratique qui consiste à vivre intuitivement depuis le cœur ?

Ne soyez personne, ne soyez rien. Ayant compris que vous n'êtes personne, vous vivez la vérité depuis l'intelligence. Lorsque la notion ou la sensation d'être une personne ne vous troublent plus, que vous pensiez ou non, perceviez ou non, agissiez ou non, vous vivez la vérité depuis la plénitude du cœur.

A ce point, je suis dans une relation juste avec moi-même et avec le monde ?

Oh oui. Vous êtes dans la juste relation qui est l'inclusion. Le monde ainsi que votre corps et votre mental sont inclus dans votre soi réel. L'amour est inclusion. La compréhension est une étape intermédiaire, mais la destination finale, le centre réel, est le cœur.

Le cœur est-il l'endroit entre cette branche et la suivante, pour reprendre l'analogie du singe ?

Si vous acceptez de lâcher la branche à laquelle vous vous cramponnez sans en saisir une autre, vous tombez dans le cœur.

 Vous devez accepter de mourir, de laisser filer tout ce que vous savez, tout ce qu'on vous a enseigné, tout ce que vous possédez, y compris votre vie, ou du moins ce que vous croyez à ce stade être votre vie. Cela demande de l'audace. C'est une sorte de suicide.

Est-ce vraiment ainsi ? Par exemple, est-ce que vous vous rappelez les moments qui ont précédé votre re-connaissance ?

Était-ce ainsi ?

Merci. Aviez-vous auparavant une idée de ce qui allait se passer ?

Oui et non. Oui, parce que je sentais l'invitation. Non, parce que jusqu'alors je n'avais connu que bonheurs relatifs, vérités relatives, connaissances relatives et je n'aurais pas pu imaginer l'absolu, l'ineffable. Le soi est au-delà de tout concept, de toute projection. C'est pourquoi nous ne pouvons pas nous diriger vers lui de notre propre chef et devons attendre qu'il nous sollicite. Mais quand il nous invite, nous devons dire oui joyeusement, sans hésiter. La décision nous appartient, la seule dans laquelle nous exercions un réel libre-choix.

L'une des raisons pour lesquelles je remets à plus tard et je ne me rends pas à l'invitation est ma crainte que ma vie ne soit radicalement changée.

Oh oui, elle le sera.

Ainsi que ma famille ?

Votre famille aussi. Tout sera changé.

Je crains que certaines personnes ne me quittent et soient remplacées par d'autres.

Je puis vous assurer que vous ne regretterez rien.

Est-il possible d'avoir reçu l'invitation et de l'avoir refusée ?

Oui, vous êtes libre.

Serai-je invité à nouveau ?

Oui. Tenez-vous prêt. Soyez disponible. Vous êtes disponible quand vous comprenez qu'il n'est rien que vous puissiez faire par vous-même pour vous rendre chez le Roi. Quand vous réalisez votre impuissance totale, vous devenez une salle vide. Dès que vous devenez une salle vide, vous êtes un sanctuaire. Alors le Roi entre, prend place sur le trône et vous gratifie de sa présence immortelle.

(Extrait du livre Le Sens des Choses par Francis Lucille Editions Acarias L'Originel)

 

 

Signaler ce texte