Dérivant

Christian Lemoine

Ses trains n'ont plus de voies où aiguiller les infortunes de ses machines désarticulées. Marchant comme une route déviée, dérivant comme une voie sans issue, il va marchant dérivant. Sa quête : l'impassible mutation de ses grains et ses pleurs, de ses considérables échos destitués de leur vilénie ; sa quête, pas le salut, pas même une bénédiction, mais un pardon sans otage peut-être. Il est, marchant comme une mécanique qui se déshonore, ou bien encore à coups d'échardes, d'éclats virulents, il est, dérivant. Il ne sait plus, il ne se soucie plus. Il n'est qu'une infinie détresse, rivée en lui par des rêves crucifiés ; et sans le scandale de la résurrection. Marchant défait, comme chaque parcelle démembrée, harponnée par l'inclémence des cénotaphes. Dérivant parfait, ségrégué de sa propre substance comme un usurpateur dénoncé par ses zélotes. Il est marchant, certain de l'inanité de toutes ses prérogatives, qui n'étaient que des icônes blafardes, les éruptions vilipendées de sa jeunesse. Ainsi il est dérivant sur l'erre des naufrages, et sachant le déport absolu même s'il devine encore sur la rive les fantômes des ses amours perdues.
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