Des frissons dans la nuit

alexandra-basset-9

03h20, réveil en fanfare mineure. On entend les souffles des corps déposés, reposés, la nuit sur des cotons. On exhume le sien propre qui siffle et furète, s'accroche aux cathédrales endormies. Une vitre teintée s'est posée sur le monde, et je n'aperçois plus de lui que ses recoins ombragés, effrayants. Je me retiens au bord du vide, la tête coincée dans la machine à cauchemars depuis six mois. Réveils glacés en sueurs, une offrande quasi-quotidienne de mon inconscient qui se noie dans ses peurs, comme un enfant perdu dans une forêt noire. Je me les gèle, l'accueil du nouveau jour est moite et glacé. Je garde souvent des souvenirs en mosaïque, flous, lavés-salis comme des pares-brises mal nettoyés de ces combats nocturnes où les adversaires ne font qu'un. Parfois, mes angoisses d'enfance ne prennent même plus la peine de se travestir, elles montrent leur vrai visage tordu et premier degré. Je le vis presque comme une insulte : c'est comme si je m'invitais dans mes propres cauchemars et que ces derniers n'avaient même pas pris la peine de monter les décors, les acteurs n'ont pas non plus répété leur texte. C'est du n'importe quoi, un théâtre abrupte et sans lendemain, qui se fout des avis prétentieux de son public exigeant. Un affront. Ma psyché ne fait plus l'effort d'échafauder des mises en scènes, comme si elle savait d'avance que je devinais ses ambitions malsaines. Ces cauchemars semblent être les vestiges de ma peur maladive du monde. Ils sont des bougies dont les flammes ombragées se dissipent et se noient, au matin, dans une tasse de café. Alors, la journée se teinte de pensées sombres et stagnantes, répandant leur viscosité affriolante sur le monde extérieur, sans y être invitées.

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