Dis-moi, mon coco…

Hervé Lénervé

Répartitions des tâches ménagères chez les Lénervé.

-         Dis-moi, mon coco…

Quand ça commence comme ça, généralement, déjà, c'est ma femme qui me parle et secondement, cela n'inaugure rien de bon. Oui, nous avons nos habitudes domestiques, nos rites, nos intimités, nos familiarités, notre ethnométhodologie de couple en couche, quoi ! Qui fait que l'on se reconnait là où d'autres passeraient leur chemin sans même nous voir. Bon, ce n'est pas textuellement ça, mais vous avez compris les sens, en gros.  Allez, je la relance.

-         … j'ai l'impression que tu n'en fais pas lourd sur le ménage, ces temps-ci.

Je l'avais bien dit, je le sentais, je le savais !

-         Ah bon, tu crois ???

-         Non, je ne crois pas, j'en suis certaine !

-         Eh, j'ai le bricolage, quand même !

-         C'est vrai, je te le concède, je ne touche pas à tes truelles. Mais le dernier clou que tu as planté dans le mur remonte à dix ans.

-         La faute à qui ! Si tu avais tenu la chaise correctement, je n'aurais pas trébuché et défoncé la cloison mitoyenne.

-         D'accord, ça va être moi, la seule responsable, maintenant ?

-         La seule, non, en fait le vrai coupable, c'est le voisin qui était derrière, puis dessous ! Tu peux me dire ce qu'il foutait là-derrière, ce con ? Il devait passer ses journées l'oreille collée au mur pour nous espionner, le pervers !

-         Je te rappelle qu'il est mort dans l'effondrement, ton pervers et un peu par ta faute collatérale, quand même.

-         Ah, ne reprend pas la thèse de la police, s'il te plait ! Ça m'a, quand même, coûté dix ans de zonzon son incivilité à l'autre taupe et puis d'abord, comment aurais-je pu le savoir qu'il était ton amant ?

-         Bien sûr, toi, tu ne vois jamais rien.

-         Ne détourne pas la conversation, tu me reprochais, ce que je ne faisais pas, pas, ce que je ne vois pas. Restons concentrés et factuels.

-         Oui, mais tant qu'on y est. Autant faire un check-up complet. D'ailleurs, comment as-tu trouvé ma nouvelle coupe de cheveux ?

-         Facile ! Elle était sur ta tête.

-         Et alors ?

-         C'est bien ! Original, certes ! Mais bien, quand même… si, admettons ! Ça ira ! Ça ira ! Ça ira super bien avec ton nouveau caddie de courses, of course.

-         Tu vois quand je te dis que tu ne vois pas. Je n'ai pas été chez le coiffeur et toc !

-         Tant mieux, c'aurait été de l'argent jeté à la poubelle par les fenêtres, pour un résultat discutable.

-         Comment cela ! Ma coupe discutable ? Alors là, mon coco…

-         Décidément, je n'aime pas quand tu commences tes phrases comme ça, ma cocotte !

-         Tu as raison, ne perdons pas inutilement notre temps précieux, soyons simples. Il n'y a rien à manger ce soir et tu dors sur le canapé cette nuit ! OK !

Cool, tu vois quand tu veux ! Ah ces filles et leurs bavardages !

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