Disparue (33)

Louve

Héloïse, Anna, Alicia, malgré leur peur, leur fatigue, continuent leur marche vers la liberté...


C'est Alicia, qui, ayant levé les yeux la première aperçut une faible lumière au loin.

-Regardez, là-bas !

Elles coururent plus qu'elles ne marchèrent, malgré le froid qui leur glaçait les os, vers cette providentielle clarté. Elles arrivèrent alors près d'une grille rouillée et verrouillée, qui leur barrait le passage. Ce qui les rassura, malgré tout, c'est, qu'à deux ou trois mètres, en haut de la pente, elles pouvaient entendre le bruit de la circulation, le bruit de la vie.

Elles n'avaient aucune idée de l'endroit où elles pouvaient se trouver, mais peu importait. Elles allaient crier à pleins poumons, on les entendrait forcément.

-Ecoutez, on vient ! Héloïse, soudain alarmée avait jeté ces mots en même temps que son regard fou d'inquiétude se plantait derrière elle. Elles se retournèrent d'un seul élan. Elles ne distinguèrent rien mais toutes entendirent des pas résonner dans le sinistre boyau. Mais où se cacher ! Leurs regards affolés fouillaient la pénombre.

-Là, il y a un passage ! s'écria Alicia.

Sans plus réfléchir, elles s'engouffrèrent dans un étroit couloir, si bien dissimulé à leurs yeux, qu'il avait vraiment fallu que la chance soient avec elles pour le découvrir. Tapies dans le noir complet, le souffle court, elles attendirent.

Les pas s'étaient rapprochés. La menace était presque palpable.

Une voix, soudain, s'éleva :

-Je vous l'avais bien dit, elles ne sont pas descendues là, il aurait fallu pour cela, qu'elles connaissent l'entrée du souterrain ! Repartons, nous perdons notre temps ici !

Une autre voix rétorqua en ricanant :

-Et puis, il leur aurait fallu trouver la clé, vous voyez, elle est juste là, dans cette cache. Elle y est encore. Non, vraiment, personne n'est venu ici ! Le boss m'avait montré l'endroit, il y a bien longtemps déjà, pour, qu'en cas de problèmes, l'on puisse sortir de l'hôtel, en toute discrétion, au nez et à la barbe des flics.

Des rires résonnèrent alors contre les parois humides et froides. Puis, les pas, les voix s'éteignirent peu à peu...

Les trois femmes restèrent encore un long moment, muettes et figées, dans leur cachette. Elles sortirent encore apeurées, s'attendant à ce qu'on leur saute dessus à tout instant. Mais le tunnel était redevenu silencieux. L'on n'entendait plus que les bruits rassurants de la vie qui leur tendait les bras, à l'extérieur.

Ce qu'elles avaient retenu, malgré leur frayeur, c'était qu'une clé était dissimulée près de la grille. A trois, elles allaient bien la dénicher. De leurs doigts gelés, elles commencèrent à sonder le mur, avec précaution cependant, il ne fallait pas la faire tomber.

-Je l'ai ! s'écria soudain Anna. C'est une grosse clé, on ne pouvait pas la louper. Vite, essayons-là !

De ses doigts malhabiles et tremblants, la jeune femme introduisit la clé dans la serrure de la porte grillagée.

-Elle ne tourne pas, tout doit être rouillé !


Toutes les trois essayèrent à tour de rôle, sans plus de succès. Elles étaient découragées, d'autant plus que ne sachant pas si les malfrats étaient bien remontés, elles ne pouvaient s'enhardir à crier afin qu'on les entende de la rue.

-Il y a peut-être une solution ! s'exclama Héloïse, je vais cracher dans la serrure - aux grands maux, les grands remèdes - cela la graissera.

Après plusieurs tentatives infructueuses, la clé tourna enfin.

Encore quelques mètres et la liberté serait là, à leurs pieds, où plutôt à leurs têtes, le problème étant que le peu de chemin qui restait à faire était extrêmement raide.

-Je n'y arriverai jamais, soupira Anna. Des élancements douloureux taraudaient sa cheville.

Dans le feu de l'action, elle n'y avait guère prêté attention, mais à présent, la peau bleuie était très gonflée, très sensible.

-Nous allons t'aider, l'encouragea Alicia, mais il faut que tu enlèves ces engins de torture, lui suggéra-t-elle, en désignant les escarpins à très hauts talons. Ceux-ci n'avaient d'ailleurs plus rien d'élégants et étaient certainement à l'origine de sa blessure.

Anna s'exécuta sans regret, et, aidée des deux autres, grinçant des dents en silence, elle entreprit la montée.

Par endroits, la paroi était recouverte de mousse très incrustée, ce qui leur permettait de s'accrocher tant bien que mal.

Un autre obstacle les attendait pourtant en haut : un socle entravé de solides barreaux semblait les narguer. Mais, au moins, ils étaient assez espacés pour que l'une d'elle puisse y passer les bras. Ce que fit immédiatement Héloïse.

Soutenant Anna d'une main, elle agita frénétiquement l'autre à l'extérieur.

D'un commun accord, les trois femmes s'égosillèrent alors !

-A l'aide ! A l'aide ! Nous sommes ici, nous sommes ici !

Des voix d'hommes s'élevèrent :

-Mais, que font ces gens dans les égouts ? s'exclama l'un

-On leur posera la question dès que nous aurons déverrouillé ce fichu socle, décida un autre.

Ce qu'ils virent alors les stupéfièrent : trois femmes sales et frissonnantes avec, cependant, une immense lueur de joie, de soulagement, dans leur regard cerné et fiévreux.

-Prévenez la police ! Nous venons de l'enfer et il y en a d'autres encore en danger. Elles parlaient toutes trois en même temps.

Héloïse, Anna et Alicia étaient enfin libres. Assises dans la baraque de chantier des ouvriers, tout en racontant leur sinistre épopée, elles essuyaient parfois des larmes furtives qui coulaient sur leur visage encrassé.

-Vous avez eu une sacrée chance ! leur expliqua un des ouvriers. En temps ordinaire, la plaque d'égout en fonte aurait tout recouvert, mais nous devons, dès demain, procéder à des travaux de voirie et nous commencions à inspecter les lieux.

Oui, elles avaient été vraiment chanceuses, auraient-elles eu le courage d'attendre encore plusieurs heures...

Les pompiers arrivèrent, suivis de près par le Samu. On les enveloppa, toutes trois, d'une couverture de survie en attendant les forces de l'ordre.

Ces dernières arrivèrent enfin toutes sirènes hurlantes.

Deux policiers en civil rejoignirent le petit groupe.

-Est-ce que l'une d'entre vous est Héloïse Fontaine ? interrogea l'un deux.

Héloïse s'avança : - C'est moi !

Nous avons été prévenus par notre brigade de Seine et Marne et avons pu ainsi retrouver l'hôtel où vous étiez maintenue prisonnière. A cette heure-ci nos effectifs ont investi les lieux. Mais nous constatons que vous ne nous aviez pas attendu, quel courage vous avez eu !

-Je n'étais pas certaine que l'endroit ait été repéré, répondit Héloïse, mais tout va bien à présent, merci pour toutes ces malheureuses, leur cauchemar prend fin en même temps que le nôtre.

Le policier, un homme avenant d'une soixantaine d'années prit les trois femmes sous son aile.

-Nous allons vous escorter jusqu'à l'hôpital où vous reprendrez des forces. Mais si tout va bien, dès demain, l'on vous conduira au commissariat. Nous aurons besoin de vos témoignages à toutes les trois pour confondre toute cette bande.

-J'ai hâte, en effet, de converser avec l'inspecteur bienvenu, répondit Héloïse.

-Ah ! Non, Madame, l'inspecteur est retenu en région parisienne, mais le commissaire Clément sera là pour vous accueillir.

A ces derniers mots prononcés, Héloïse fut prise d'un étourdissement. Tout en gémissant, elle porta les mains  à sa bouche.

Un des médecins du Samu intervint alors :

-Il faut partir à présent, elles sont toutes les trois affaiblies et choquées. Il ne faut plus attendre !

Dans le fourgon qui les emmenait vers l'hôpital, Héloïse réfléchissait à toute allure. Evidemment, ni Alicia, ni Anna, n'avait réagi à l'annonce du nom de Clément. C'était logique, elles n'avaient jamais vu le personnage. Elle pensa qu'elle avait une bonne carte à jouer, malgré tout, puisqu'il était à cent lieues de se douter qu'elle avait découvert son vrai visage.

Il allait falloir la jouer "fine".

  • ah oui il va falloir la jouer fine!! comment cas-tu t'y prendre??

    · Il y a environ 7 ans ·
    Poup%c3%a9e des survivantes

    Natacha Karl

    • Regarde la suite et tu comprendras....

      · Il y a environ 7 ans ·
      Louve blanche

      Louve

  • Oh j'ai hâte de voir Héloïse face au flic véreux de Clément ! toujours aussi agréable à lire ! Juste à la fin de la 1ère partie quand elles trouvent la clé, au début du § "Elle ne tourne pas, tout doit être rouillé" et un peu plus loin je supprimerais le deuxième "enfin" car ça fait une répétition et tu as oublié la majuscule aux noms propres mais c'est vraiment des peccadilles aussi j'te l'dis comme j'le pense et vice et Versailles CHAPEAU A RAS DE TERRE ma belle pour ton récit qui nous tient en haleine ! bisous et douce fin de journée loin de ce monde frelaté ! à bientôt !!

    · Il y a plus de 7 ans ·
    Epo avatar

    Christine Millot Conte

    • Je corrige ma belle, je corrige. Pour les noms propres, je tape trop vite, et si je ne fais pas attention, ça reste en minuscule. Merci ma belle !

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Louve blanche

      Louve

    • Ah oui ! rouillé : faute d'inattention. Ce n'est pas pour me disculper, c'est juste pour t'expliquer. A plus et vice et Versailles, as-tu connu Louis XIV ??

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Louve blanche

      Louve

  • La vie continue Martine et tu nous requinques avec cette suite heureuse mais j'imagine que tu nous réserves encore des surprises ! Bisous

    · Il y a plus de 7 ans ·
    Version 4

    nilo

    • Oui, il faut bien reprendre le cours des choses ma nilo...encore quelques surprises en effet ! Bises !

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Louve blanche

      Louve

  • Heureuse, Louve, de te retrouver. Je te remercie sincèrement de nous livrer la suite de ton roman. D'abord, parce que nous revenons vers la vie, passé ce début de semaine si triste, et puis parce que nous découvrons la suite de cette histoire ! Je crois que je vais faire des cauchemars cette nuit à imaginer être poursuivie comme le sont tes héroïnes, coincées sous cette grille d'égout. Et ce commissaire Clément qui rôde... Tu sais maintenir le suspense, Louve ! Toujours aussi alerte, ton histoire ! A très vite ! Bises

    · Il y a plus de 7 ans ·
    Coquelicots

    Sy Lou

    • Il fallait que je continue même si le cœur n'y était pas vraiment après cette triste nouvelle...Bises jolie Sy Lou !

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Louve blanche

      Louve

    • Bien sûr que tu vas continuer, Louve. Tu lui dois bien ça, elle aurait été heureuse de te lire et d'apprécier que tu lui inventes un quotidien faisant office de parenthèse. Continue donc... Bises, précieuse Louve !

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Coquelicots

      Sy Lou

    • Merci beaucoup Sy Lou !

      · Il y a plus de 7 ans ·
      Louve blanche

      Louve

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