Elle

compteclos



Elle rôdait sous les sillages de nos naufrages. Elle était belle, Reine et proprement sienne.

Elle avait la liberté au bout des doigts et une enclume sous les paupières.

Elle était insomniaque et amoureuse de la vie. Elle vivait par et pour l'Espoir.

Elle ne cessait de désirer des choses folles qui la rendait complètement accro à la Vie.

Elle savait que chaque chose était unique, et que les roseaux sous ses ongles lui rappelleraient son enfance maudite.

Elle savait que la pluie qui martelait ses joues cacherait ses larmes de jeune femme renfermée.

Elle aimait se perdre dans des livres à l'eau de rose, elle qui, n'avait jamais connue l'amour.

Elle se laissait divaguer quelques fois, lorsque la nuit sombre se déposait au creux de ses mollets.

Elle pensait à tout ce qu'elle n'avait jamais senti, touché, effleuré.

Elle susurrait tout bas «  Je suis là, je suis en vie, je vis ».

Elle jouait avec son ombre et riait de sa stupidité.

Elle était une enfant qui n'avait jamais eu d'enfance.


Je l'ai rencontré, un jour où l'on ne rencontre personne. Je l'ai rencontré en attendant le Tramway C, en direction de la gare Saint-Jean. Je l'ai rencontré sans m'y attendre vraiment. Ses cheveux blonds, sa peau blanche et ses yeux clairs ne m'ont jamais laissé indifférente.

Elle pleurait, silencieusement. Où allait-elle ? Prendrait-elle le train avec moi ? M'aimerait-elle ? Ferions-nous l'amour ?


J'ai bougé mon fessier et me suis approchée d'elle. J'ai laissé glisser mes phalanges sur ses joues humides.

«  Tu es bien trop jolie pour gâcher une seule seconde de sourire ».

Elle m'a regardé avec une telle intensité que mon cœur en est tombé à la renverse.

Nous sommes descendues du Tramway, nous avons marché jusqu'à en avoir mal aux pieds et la gorge sèche. Elle m'a prit dans ses bras.

Depuis ce jour, elle est maîtresse de mes nuits.

Depuis ce jour, je suis devenue sa seule envie.

Depuis ce jour, elle sourit.

Signaler ce texte