Etoile

Christian Lemoine

Donner à la musique l'heur des énergies rassemblées, pour l'émergence de la mansuétude. Oblique des obliques, dans la traversée des privilèges déçus, échappatoire des pusillanimités. Et toi, sur les routes sans fossé, les trahisons chevillées aux talons, par la vicariance des circonstances par trop déférentes. En vol de laneret cherchant l'approbation de ses exhalaisons, te voilà qui déjoues les supercheries par la raucité de tes éructations terrassantes. D'une logorrhée dimorphe, tu ravaudes le tissu râpeux d'un sinueux message, où tes vocalises attirent l'auditoire dans le franchissement des goulets. Là, sur la frontière invisible entre l'âpre monotonie et le sublime de l'élévation. Là, sur tes pas, sur tes notes. Ils trébuchent et chavirent, toujours soucieux de te paraître dignes, sans faille, sans trouble ; de peur de déchoir dans la perfection de ton regard. Sur tes pas, ils s'arrachent des plaintes murmurées, les pieds griffés, les pieds nus, par autant de surgeons et de recrûs, les palimpsestes obscurs que tu laisses derrière toi, sans remords, mais sans non plus la clef de ces cryptogrammes. Sur la table lasurée d'hickory flamboyant, la fulgurance de tes doigts dessine un filon qu'ils hument, qu'ils fouissent, bénis de l'aspersion de tes arpèges en quoi ils inventent des utopies de corps à corps. Vertige consenti d'un rêve de sérendipité. Tu les tiens dans ta main, tu les tiens dans ta voix fragile et intense, dans les volutes lanugineuses de ta chevelure. Tu les tiens sur la ligne tremblante de tes yeux innervés d'insolence. Tu les tiens dans le sourire mordant où tu les égrènes. Où ils choient, hâves et chétifs, incrédules en leur amour indéhiscent.
Signaler ce texte