Etonnov niet?

La cour des voisins contigüe à nos murs est sale comme une culotte souillée roulée en boule sous un lit d'adolescente. On la cache sans jamais l'oublier ni la laver et on range la chambre pour que ça ne se soupçonne pas. L'ordre apparent n'est qu'un écran de fumée, les livres alignés et les étagères au carré des leurres, des miroirs aux alouettes destinés aux visiteurs de passage.

De l'extérieur, rien ne se voit bien au contraire et surtout pas la cour. La façade dont la moindre mauvaise herbe est épilée avec maniaquerie, politiquement correcte et objectivement lisse, blanche et aseptisée est une promesse d'ordre et de propreté que la cour dément brutalement dès qu'on y pose un pied.

Mais les hauts portails opaques et clos comme les fenêtres gardent la crasse en-dedans, à l'abri des regards extérieurs. Les hauts portails et les hauts murs sont des facteurs aggravant d'humidité malsaine, de pourriture latente, de rejets envahissants, d'odeurs fétides, de serpents rampants, de mousses noirâtres.

Le bordel sale intérieur est là qui ne doit pas se savoir mais qui est entretenu sciemment.

Etonnov niet? Étonnant ce qui se cache parfois derrière des apparences de propreté et d'ordre, derrière la méticulosité maniaque affichée et les fragrances chlorées, derrière le besoin de ranger et laver au dehors, de mettre la moindre chose en équation dans un tableur, en conservant parallèlement un espace miteux, sombre, lourd et malsain tout contre soi.  

Étrange de constater ce que la psyché humaine est capable d'organiser pour ne pas se "laver" au fond. Combien le trauma doit être profond...

Est-ce que ça se soigne docteur?