LES FOUGÈRES DE Melle ALDEBERGE XXVI

Philippe Larue

L'écriteau “Des dix commandements du sauna” stipulait qu'à poil, la vie se poêlait poilue, mais phallus t'il en corps en être fier. L'hôtel ne payait pas de mine de l'extérieur, mais dès que vous y entriez, vous sentiez vos tracas s'évaporer.

La Suède était un pays où vous viviez dans la dignité. Migrer sa vie pour la transformer y était salutaire. Les soirées avaient une réputation exemplaire: friponnes, persifleuses, espiègles. Le bouche à oreilles du petit hôtel faisait que le nombre de brochures avaient été inespérée à distribuer. Cady Laprose et Melle Aldeberge en étaient les propriétaires. Les deux femmes avaient négocié une formation en yoga sexuel, par une année sabbatique à y vivre et expérimenté le kamasoutra. Spécialisées en tantrisme, elles avaient acheté ce petit hôtel suédois, afin d'y allumer une fin de vie administrative libertine. En vérité, elles étaient tombées amoureuses l'une de l'autre, après l'expérience du claquetois irlandais Peucheron, chacune à sa manière.

Les débuts avaient été assez durs comme expatriées. Mais l'empathie suédoise avait vite effacé les soucis. Normalement.

Car ce matin, un couple incongru arrivait à l'hôtel, sans que Melle Aldeberge Lekine et Cady Laprose ne puissent imaginer pareille situation. En effet, trois semaines avaient été réservées sous le nom de Jeunechamps. Oh, les neurones de Melle Aldeberge auraient dû percuter. Mais après quatre années détendues, une année de tantrisme et de kamasoutra, impossible de penser queue tchatter…

Mme Mimex et le claquetois irlandais Peucheron, ici dans les plaines enneigées de Suède. Après avoir passer des journées et des soirées entières à conter l'histoire de la quéquette irlandaise de l'ambassadeur Peucheron, il avait invité Mme Mimex à une soirée libertine. Et Mme Mimex d'en être séduite, se sentant rajeunir sans paperasses. Incognito, le couple avait parcouru les lieux secrets du naturisme pendant deux années. Puis, les deux protagonistes étant en retraite, déchargés de contraintes, s'étaient pacsés. Et voilà les Jeunechamps des anciens jardins remarquables de Nanteuil-la-Forêt, d'exposer leurs croupions joufflus aux hôtels mondiaux! Couzu avait acheté la maison de Melle Aldeberge, et avait métamorphosé la serre à fougères fanées, en paperasserie sexy de Lui, le Playboy de Nanteuil-la-Forêt. Nostalgique un instant, Melle Aldeberge avait commencé à écrire un livre de sa première jeunesse: les fougères de Melle Aldeberge. 

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