Fei Mu

Kevin Gauthier

Retour sur la carrière de l'un des cinéastes chinois les plus méconnus, dont le film Le Printemps d'une petite ville a pourtant fortement influencé des réalisateurs comme Wong Kar-Wai ou Wang Chao.

Fei Mu est né en 1906 à Shanghai et montre très rapidement une forte attirance pour les arts (littérature, opéra traditionnel chinois, …) mais désire plus que tout entamer une carrière de réalisateur alors qu'il est comptable dans une mine de sel les premières années de sa vie professionnelle.

Persévérant, il parvient à entrer comme rédacteur dans une des plus grosses sociétés de production chinoise des années 30, avant de se voir enfin confier la réalisation d'un premier film muet en 1933. Il devient l'un des cinéastes les plus prolifiques et intéressants du premier âge d'or des studios de Shanghai, naviguant entre films sociaux, opéras filmés et documentaire mélangeant actualités et fiction. Il réalise ainsi pas moins de 9 films jusqu'en 1937, date où la guerre avec le Japon fait rage dans le pays.

Après quelques années d'inactivité, il sort Confucius en 1940, long-métrage longtemps perdu qui relate le crépuscule de la vie du penseur, avant de se consacrer plus que jamais à l'opéra (filmé puis en tant que metteur en scène) pendant que les japonais prennent définitivement le contrôle de la ville.

En 1947, l'activité cinématographique de Shanghai reprend avec une vigueur comparable à celle des années 30. Fei Mu fait par conséquent son grand retour derrière la caméra, bien que marqué par la dévastation due à la guerre. En 1948, il réalise Le Printemps d'une petite ville qui sera totalement rejeté par les habitants de la région, alors en pleine célébration de la libération de Shanghai tandis que ce film, empreint d'une profonde nostalgie, se tient justement au cœur d'un village en ruines.

Avec l'avènement du régime communiste, Fei Mu décide de partir pour Hong Kong pour continuer sa carrière, brutalement interrompue en 1951 par une crise cardiaque.

Heureusement, Le Printemps d'une petite ville connaît une seconde vie dans les années 80 où de nouvelles copies sont tirées du négatif original. Un nouveau public découvre ce qui aura été le dernier film de Fei Mu, dorénavant considéré comme le chef-d'œuvre du cinéma chinois, et influence sans doute les prochaines générations de cinéastes chinois : certaines scènes du film où les deux amants dialoguent autour de leur amour impossible trouvent une étrange résonance dans In The Mood For Love (2000) de Wong Kar-Wai, et Tian Zhuangzhuang en a réalisé un remake en 2002.

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