Furtive splendeur de l'été
Jean Claude Blanc
Furtive splendeur de l'été
Heureux, radieux et extasié
Juillet et aout sur mes sommets
Furtive splendeur, saison d'été
De bon matin il fait frisquet
Se la ramènent, les promeneurs
Sûrement pas pour se faire bronzer
Les paysans, à leur labeur
Se levant tôt, darde le soleil
N'ayant pas besoin de réveil
Volets ouverts, quelle merveille
Déjà butinent les abeilles
Verte vallée à perte de vue
Sous les fougères suintent des rus
Brodés de frênes au-dessus
Desquels se déploie le bleu des nues
Souriante période d'ardente lumière
Où se renouvelle l'atmosphère
Pas étonnant santé de fer
Lorsqu'on respire le bon air
A profusion, saine nature
Inhabitée durant l'hiver
Pourquoi pas tenter l'aventure
S'y installer en solitaire
S'accoutumer vivre à la dure
Comme chaque année, battent le rappel
Nichent les mésanges, les hirondelles
Fonder famille leur donne des ailes
A leur rituels, toujours fidèles
S'épanouissent fraises et myrtilles
Se les disputent les papillons
Attirés par tout ce qui brille
Dans les roseaux en suspension
Les libellules sur l'étang cillent
Se la coulent douce ces mois sans nuit
Où tard le soir la lune luit
Charme de la campagne, plus aucun bruit
Que les clochettes des brebis
En cet instant de béatitude
Touchent à la grâce mes sentiments
En m'imprégnant de l'arum des champs
Juste pour prendre de l'altitude
Quand tendrement, me souffle la bise
La canicule, demain promise
Au firmament enfin en paix
Me remémore le passé
De mes anciens, préoccupés
A récolter ce qu'ils ont semé
Jadis seulement pour se distraire
Au bal musette, allaient danser
Nantis d'une solide cavalière
Sur la place du village
(Quel beau mariage dans l'année)
Selon légendaires commérages
Pas de ce siècle, je m'en contente
Suivre le tracé d'étoiles filantes
Où dans le ciel, quand il fait beau
En pointillés forment un chariot
Chères montagnes désertées
Que je préfère, méconnues
Afin de n'être pas déçu
Par ceux qui leur manque de respect
La salopant de leurs déchets
Débarquent ainsi nombres d'autocars
Pour les narcisses, pas denrée rare
C'est fou ce qu'on aime faire bande à part
Nous autres bougnas, qu'on dit avares
De commérages, pas bonnes poires
Qu'on nous surnomme, midi moins le quart
Mais bien heureux nos visiteurs
Qui en savourent de bon cœur
Pain et fromage, à 4 heures
En ignorant, sens et valeurs
De ceux qui ne plaignent pas leurs douleurs
N'ai pas choisi de vivre ici
C'est le pays qui m'a conquis
A cette époque, vrai Paradis
Viennent en estive comme des fourmis
Blafards des villes, vite cramoisis
Ne paie pas de mine notre région
Où l'on déguste à profusion
Fourme, jambon et saucisson
Gros rouge qui pique, à l'occasion
Quel misanthrope, allez penser
Ça coule de source, natif d'ici
Même tellement fier m'y confiner
En mon hameau, pour ses secrets
Que l'on partage qu'entre amis
L'été, l'éther à ma portée
Les prés se parent de fleurs sauvages
Hélas les sentiers pleins de genêts
Y'a plus de bêtes en pâturage
Peut-être mieux comme ça, pas dérangés
Beauté furtive, saison d'été
Déjà régresse, pour la Saint Jean
N'y pense pas, ce serait risqué
De trop se faire du mauvais sang
A la retraite désormais
Pourquoi ne pas en profiter
Revoir mes potes de jeunesse
Pas mal ridés, mais encore lestes
Si nos ancêtres revenaient
S'apercevraient qu'a bien changé
Leur terroir désolé
Mis en jachère ou vendu
Pour quelques sous aux inconnus
Comme par hasard, vieux têtu
Ne cède pas mon trou perdu
Le lèguerai si ça leur plait
A mes enfants, seuls héritiers
Ne serai plus là pour le voir
S'ils le liquident, s'en séparent
J'irai hanter leur conscience
Tant j'en ai sué, mon existence
Début juillet, toujours dans le ton
Prendre ma besace, mon bâton
A la recherche de champignons
En parcourant les bois, les monts
Mais y'en a guère, la terre est sèche
Tant pis pour moi, rien ne m'empêche
De m'enchanter virtuellement
A l'infini de mes boniments
Ma symphonie d'unique saison
Celle des joies de la moisson
Vous la concocte à ma façon
Y'a plus personne à l'horizon
En vérité, quelle déception
Etant presque tous moribonds
Les péquenots sont plus légions
Restent que les rayons, soleil de plomb
Qui alanguissent ma maison JC Blanc juillet 2017 (pour Francis Jammes : le village à midi)