Hospices (3)

laura-lanthrax

…..Je cesse de courir, je me pose doucement sur la table, j'attends mon chocolat avec phanphan, je regarde en dessous, mes lacets sont défaits, je me relève, quelle tête !, coupe tes ongles vaurien, n'achète pas mon silence avec tes paroles souffreteuses et légèrement décalées, regarde moi bien droit dans les yeux ou sinon j'te frappe, tu ne cesseras donc jamais tes jeux minables, tiens toi droit on nous regarde, combien de fois devrais-je m'exprimer sur le sujet, ce chocolat qui ne vient pas, mes médicaments qui prennent froids, mon cache nez qui n'est plus que l'ombre de lui-même, acheté en 1921, au cours Florent, avec une réduction encore, bleu mauve initialement puis recoloré en vert au fil du temps, un beau vert comme je les aime, facile à repérer dans tout ce fatras de laines et de chiffons qui s'accumule dans les armoires, j'ai fini par tout jeter, je suis comme qui dirait une ancienne collectionneuse, repentie heureusement, aujourd'hui phanphan et moi on voyage libre, une valise, quelques affaires et notre tour est joué, sac-à-dos, couvertures, voiture balai, on est d'accord pour aller de l'avant, surtout ne pas regarder en arrière, allez marche phanphan, on n'y est presque, avance j't dis, il faut te porter peut-être, monsieur fait son cinéma au bar des chanceux, la chance c'est pour demain, les kilomètres ne disparaitront pas avant la nuit, j'avance encore, je rampe, je me traine s'il le faut mais j'avance, je ne renie rien, je finirais cette course quoi qu'il m'en coute, de vie à trépas, j'organise l'école pour mon phanphan l ‘année prochaine, prise de risque et partie fines, j'aurai besoin d'une armée entière, la divine promesse de me saborder au prochain virage, tu crois que maman a une vie facile, ici, au milieu de tous ces lave-linges, tapisseries et ragouts, mon phanphan, mon unique, mon caramel fondu, mon médicament qui ne vient toujours pas, j'ai demandé un chocolat il me semble, cette petite a tout l'air d'une bassine à l'envers, faudra t-il élever la voix, crier plus fort de jours en jours, petite écervelée, tu gâches notre après-midi, ici sous les arbres grâcieux,  viens plus prêt, je ne parlerai pas plus fort, viens m'attendre sous les branches, j'arracherai ta polarité à prix fort, j'atteindrais le vertige de la langue, mais ne compte pas sur un sacrifice, phanphan reste là, ne bouge pas, maman se pose délicatement sur la table, nous attendrons encore, qu'elle vienne, goute ce caramel que maman a ramassé, carrément bon ce caramel doux doré épluché avec mille précautions, s'il vous plait, mademoiselle, soyez gentille, j'en prendrais encore un mademoiselle, mademoiselle…..

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