IRIS, extrait.

Olivier Roisneau

Une pause, une gare, Iris, des éoliennes. C'est beau. Et peut-être un peu effrayant...

La gare de Zéphyr consiste en un grand hall recouvert d'un dôme en verre. Elle est habituellement destinée aux ouvriers techniques de « Alizé », une des nombreuses sociétés appartenant au Groupe Sigü, venant travailler sur le parc éolien. La plupart des étudiants, trainant sacs et valises, se dirigent vers le bar et la librairie disposés au centre du hall. Iris décide de traverser la gare. De l'autre côté, les éoliennes, immenses, imperturbables, indifférentes aux petites déconvenues des êtres humains, effectuent leurs danses statiques. Les vents venus de l'ouest animent leurs rotors, c'est à la fois beau et un peu effrayant. 

Curieuse, et comme attirée par leurs majestueux mouvements, Iris a envie d'aller voir de plus près. Elle dépose sa valise dans un endroit prévu à cet effet, et passe la grande porte d'entrée de la gare. Elle descend les marches jusqu'à un parvis. Elle se retourne, tout le monde semble être resté dans la gare. Iris continue de marcher jusqu'aux premières éoliennes. Un bruit sourd et régulier se fait entendre à chaque passage d'une pale au niveau du mât exécutant ainsi un concert rythmique qui complète le spectacle visuel de ces géants. Les éoliennes doivent mesurer près de cent mètres de haut et sont chacune espacées de quatre-cents mètres environ. 

Iris avance encore pendant un bon moment. La gare est assez loin maintenant. La jeune femme s'assoit et ferme les yeux, comme bercée par le rythme sonore des pales, et les ronronnements des parties mécaniques. « Et si ce train repartait sans moi ?... Il ne faut pas que je tarde. » Malgré tout, Iris a envie de prolonger ce moment. Elle se sent toute petite. Petite, comme quand elle était dans cet appartement tout blanc, avec ces peintures blanches aux murs. Petite, comme quand elle était dans cette espèce de salle d'opération blanche, avec son père… Son père… C'est aussi le médecin… Que fait-il ? « Que me fait-il?» Iris, les yeux toujours fermés, fronce les sourcils. Elle n'avait encore jamais eu ce souvenir… Souvenir ou fruit de son imagination ? 

Quelque chose ne va pas. Que se passe-t-il ? Le silence. Il n'y a plus de bruit. Iris n'entend plus les pales tourner. Elle reconnait maintenant ce silence. C'est le même qui précède à chaque fois ces « apparitions ». Iris ouvre les yeux.

L'éolienne la plus proche, comme animée par la vie, semble se tordre… Elle s'étend, s'étire… « Ça y est, ça recommence !... » La machine soulève son rotor à la verticale, comme pour prendre de l'élan, puis abaisse violemment ses pales jusqu'à frapper le sol à quelques mètres d'Iris, qui a juste le temps de rouler sur le côté et éviter ainsi de justesse de se faire écraser. 

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