J'avais deux chats

J'avais deux chats

L'un mignon feu follet     

Au pelage soyeux

Beige

Aux yeux bleus,

L'autre qui était vieux

Râleur

Au poil rêche

Et à l'odeur d'essieu.

Nous attendions

Sans doute aucun

Qu'il meure

Il allait se trainant

Et s'oubliait souvent,

N'avait-il fait son temps ?

Autant il réclamait

Sa pitance en miaulant

D'une voix de fausset,

Autant l'autre fringant                                

Et  déluré                                                                                            

Ronronnait en se frottant

Avec ardeur à nos mollets,

Nous mordillait les doigts

Puis s'endormait confiant

Sur nos genoux

Quand notre vieux jaloux

Préparait ses coups bas.

Le vioque était prudent

Et ne se risquait pas

Au-delà du coteau

Qui bordait la maison,

Quand son jeune compère

Aimable vagabond                             

Explorait les parages             

Avec obstination.                                    

Mais par un jour d'automne         

Dans la brume légère

Où le matin frissonne,

Un quarteron de pneus               

Au détour d'un virage

Mit fin à ce duetto.

Qui rendit l'âme dans un sanglot ?

Ce ne fut pas notre vieux faune

Qui ne quittait guère son trône

Mais mon  joli au beau pelage

Mort autant qu'il était volage.

Et l'autre vieux qui fait le beau

Quand moi j'en pleure encore de rage.