Je te veux innocent.

J'essaie de ne pas broyer du Noir en songeant à ce gouffre béant qui anime mes entrailles de jours comme de nuit. Je tente de ne plus reconnaître la Peine gravée sur mon visage et d'éloigner les tourments. J'essaye telle une forcenée d'aller de l'avant pour enfin libérer mon corps de ces chaînes qui l'entourent. Et moi, fermant les yeux, imaginant les nuages et contrées désolées qui n'ont pas d'âges, je me vois pieds nus au pied d'une falaise glaciaire et vertigineuse, prête à sauter. J'ouvre les bras. Je déploie des ailes que je n'ai pas. Je sens le vent m'entraîner dans ses bourrasques et au prochain tourbillon... Je vivrai pour de bon. 

Les vagues sont attirantes, les roches me supplient de les rejoindre, six-cent mètres plus bas et puis là, dans le plus grand des silences, je te vois. Je résiste sans le vouloir. Je recule sans m'en apercevoir. Et je me demande s'il est humain de désirer sauter par ta faute. La question m'interpelle et m'ôte quelques sanglots. Au final, tu as ruiné ma vie, ma possible carrière et par ton absence, tu as massacré mes rêves un à uns. L'inacceptable fait furie en Moi. La haine se déploie en Monstre dévoreur. Puis le Pardon m'envahit et me laisse sans saveurs. 

Je te haïs mais je te pardonne. Je te maudis mais faut croire que je t'aime. T'as pas le Courage, t'as pas la Droiture et t'es rien pour moi. Sauf peut-être le fait que toute ma vie, j'aurais dût t'appeler... 

Papa.