Jeu Fatidique

Ophelia Ashendown

Cette pierre que tu me lances. Ce regard que tu m'adresses. Cette haine qui y luit. Toute cette rage et ce dégoût qui illuminent tes iris. Ces mots que tu plantes délicieusement dans mon cœur. Ces phrases qui, dans mon dos, réduisent en lambeaux ma chair et mon sang. Tout cette symphonie qui résonne dans ma tête et qui fait de moi la personne que je suis aujourd'hui. Cette cacophonie qui me heurte au mur que tu as construit minutieusement, brique par brique pour m'empêcher d'être libre.
Ce tout me rend vulnérable. Me rend fragile. Mon souffle est court. Ma tête est lourde. Mon corps, contre le sol. Tu n'as plus de chair à déchirer, plus de cœur à perforer. Tes iris ont perdu de leur lumière. Ton regard semble lassé. La pierre ne heurte plus ma peau. Tu as joué. Et pour toi la partie est finie. Je ne vaux pas la peine d'être achevée. Pour toi, j'ai perdu. Mais tu te trompes. Cette pierre que tu m'as lancée, ce regard que tu m'as adressé, ce cœur meurtri, ces chairs déchirées, cette âme réduite à néant, ce Tout réclame justice. Et dans un dernier souffle, dans une dernière volonté, un bruit sec et sourd ébranle la terre. Un autre suit. Les corneilles s'envolent. Pour une seconde, le monde se tait. Pour une seconde, le monde retient son souffle. Mais la vie trouve toujours le chemin et recommence son cycle éternel. Des sirènes retentissent dans la ville. Les sangs se mélangent. La lueur dans tes yeux s'éteint. Une arme encore chaude repose sur le sol en bois d'une école. On se retrouvera en enfer. Là où je règne en maître, et toi en esclave.

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