La Lassitude

nada--2

La lassitude lui tannant le cuir du matin au soir le laissait tranquille tant qu’il dormait. C’est à cause d’elle qu’il ne cessait d’augmenter sa consommation de tranquillisants. Soigner le dégoût de vivre par le sommeil était sa préoccupation majeure. Sa femme, qu’il avait épousée pour ne pas rester seul, n’en pouvait plus de partager le lit conjugal avec un mari qui ne la touchait pas. Il fallait qu’elle se trouve un amant, à tout prix. Elle avait beau multiplier les avances, aucun des bipèdes auxquels elle adressait ses doléances ne daignait la satisfaire. Les autres locataires de l’immeuble, aussi crasseux et répugnants fussent-ils, fuyaient comme la peste ce monstre évadé du musée des horreurs. Plus que son corps obèse de gorgone en chaleur, c’était son odeur, cette odeur de charogne vivante lui collant à la peau, où qu’elle aille, quoi qu’elle fasse, qui générait le vide autour d’elle. Au summum du désespoir et de la frustration elle eut l’idée géniale de mélanger des comprimés de viagra aux pilules que son mari gobait par poignées. Attendant qu’il soit profondément endormi, elle s’empala sur son sexe en érection et s’y laissa aller et venir. Pendant qu’il ronflait comme un possédé exorcisé de son mal être, elle cumulait les orgasmes. Pour le cunnilingus, elle adopta un molosse à la S.P.A et lui apprit à lécher son clitoris. Disposant de trois caméras numériques sur trépied, elle filma ses ébats, créa son site et mit ses vidéos en ligne. Les vingt-mille visites mensuelles récompensant ses efforts en firent une icône de la pornographie. Quand son époux, fragile du cœur, mourut d’un infarctus elle transforma son domicile en un refuge pour chiens. Le viagra réduit en poudre ajouté à leur pâtée métamorphosant en une meute de bêtes assoiffées de coït les animaux domestiques, elle n’eut plus à subir le rejet des hommes et coula des jours heureux avec ses quadrupèdes.

Signaler ce texte