La mémoire, toujours les mêmes lois...

franzzzz

ce qu'on retient, ceux qu'on oublie, ce qui se travestit, ce qu'on laisse...

La mémoire c'est comme des bas résilles

Ca s'effiloche et s'pare de trous qu'on appelle l'amnésie.

Le cerveau ne retient que l'émotion la vraie,

et les mots sont laids parce qu'ils l'abrègent.


Se rappeler c'est un process sélectif

fait de barbelés électriques et de courts-circuits

qui font qu'il faut qu'on oublie c'qu'on nous dit

mais qu'en vrai, on n'oublie jamais les jours tristes :


Les détails d'une humiliation et leur pénible essence

les parfums de défaite et leur réminiscence,

les moments de honte d'un élève d'vant sa prof,

se transforment alors en réflexes de Pavlov.


On évite que s'invitent des images qui dérangent et puis on occulte

des souvenirs qui grattent et qui démangent comme de la merde au cul.

On sourit, on sourit en évoquant l'euphorie d'un fou rire et en sourdine,

on invoque des super-pouvoirs pour r'trouver ses clefs dans l'fourbi.


Parfois on s'invente une mémoire romantique

qu'est faite de moments tristes et de moments fixes

où tout vibre sous vides et où des corps à demi nus

sont souvent des souvenirs de moins de deux minutes.


D'autres de nos réflexes font qu'on excepte, qu'on écarte

des souvenirs de décès qui ne font que des traces.

Ce qu'il en reste ? des silhouettes imprécises, rémanentes,

des spectres de personnes qu'on idéalise en permanence.


Alors on r'garde des photos, pense-bêtes inoubliables,

pêle-mêle qui nous rappellent de si cours mirages

que c'parcours n'a rien d'une douce virade

bref que l'circuit d'la vie a plus que douze virages.


Quand on s'remémore, on essaie d'se r'mettre de ses morts,

on r'met en ordre des regrets des remords

jusqu'à ce que la routine nous force et puis qu'on capitule,

qu'on oublie l'exactitude face à nos habitudes.


Parce que l'effet de l'âge

c'est comme un rappel de charges :

on réalise qu'on a pas l'temps pour l'analyse

et qu'on amasse trop de factures, trop de fractures dans sa valise.


Pendant c'temps, c'qu'on a laissé de côté a grossi,

jusqu'à ce qu'en soi, ca n'en soit plus possible.

Alors on a horreur que notre cerveau se rebiffe.

Et cette putain de conscience qui brandit de si vaines reliques !


il n'y a qu'une solution : on s'persuade et on croit

se souvenir de rêves suaves qui ne sont pas à soi.

Moi c'que j'ai vécu, c'qu'il en reste, ça ne m'appartient pas,

au point que quand j'écris dans mon journal, eh bien je me vouvoie.


Faut dire que des fois ma mémoire me fait défaut.

Pire elle défalque des images, des falschs et des factices,

des tas de souvenirs marquants,

qui r'montent à j'sais plus trop quand.


J'ai l'impression que j'm'implante une mémoire romantique

qu'est faite de moments tristes et de moments fixes

où tout vibre sous vide et où des corps à demi nus

sont souvent des souvenirs de moins de deux minutes.


Parce que s'rappeler, se souvenir, retenir oublier, c'est un process sélectif

fait de barbelés électriques et de courts-circuits

qui font qu'il faut qu'on oublie c'qu'on oublie

mais qu'en vrai on n'oublie pas les jours tristes,

on n'oublie jamais les jours tristes.



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