Je sombre dans l'ennui

chachalou

Un flou total et bien peu attirant.


Je suis perdue dans mon talent. Je suis noyée dans mes couleurs. Abandonnée dans mon intelligence. Parce que la différence, soit-disant, est une chance. Je t'explique, toi, lecteur ou lectrice. 

Ma chambre est recouverte de tableaux. Mes songes sont emplis de couleurs. Mes idées se succèdent sans trêves. Il faut créer, fabriquer, concevoir, sans cela, je broie du Noir. Dans ma bibliothèque, des tas de romans jamais lus : j'écris mes propres livres. Dans ma journée, inconcevable de ne pas chanter. J'ai la voix perchée, grave, mélange des deux géniteurs et j'en ris pas mal. Je m'endors au son de ma voix qui m'hypnotise mieux que personne.

Aujourd'hui, j'ai passé ma journée à écrire des textes et à peindre sur le mur de ma chambre, une grande et belle voie lactée, avec des méandres et des contours par centaines de milliers. Demain, je ferai les étoiles sur le haut du mur, juste à droite. Avec quelques cercles de couleurs : comme des bulles de savons qui se seraient perdus dans un Immense Arc en ciel. 

Les projets de ce type m'éveille. Pour être honnête, ce sont les seuls. Sans mes créations, ma plume, mes tableaux, ma voix, je suis vide, morte. Je comble l'inertie et l'absence dans la Création. Je prends le temps d'appeler les autres et de donner des nouvelles à ceux qui jamais, ne m'en donneront. Ou sinon, pour me dire "douée, déjantée, rêveuse, ailleurs ". 

J'aime pourtant cette complexité de la langue française ou allemande, j'aime pourtant écrire tout en contradiction et paradoxe, j'aime pourtant enchevêtrer mes idées et les fragmenter sur papier, sur toile, sur mur blanc ou teinté qu'importe. 

Je suis surdouée mais je l'ai toujours été. Gamine dans son coin en développement personnel, qui fait des Cathédrales avec des pinces à linge et observe par la fenêtre les oiseaux qui ne sont pas encore arrivés, comme à chaque jour, à chaque heure, toute l'année sauf en hiver. Gamine qui ne voit pas les autres mais fait semblant de les remarquer. Gamine sportive et excellente là encore. Gamine qui grandit et se perd sur ce chemin compliqué : son évolution. 

Qui est-t-elle ? Que veut-t-elle ? Personne ne comprend son talent, son imaginaire et son sens aiguisé de la contradiction. Nul ne prend le temps de lire ou dire la beauté de ses poèmes. Dans sa vie, dans son Monde, sur la Terre et au milieu de tout ces gens, pas un seul ne lui accorde de temps. La vie va vite. Les gens travaillent. Les âmes ont perdues le goût d'aimer... et de respecter. 

Et que fais-je là à désirer créer tandis qu'Artiste, on m'a constamment surnommée. Je le suis déjà... En somme, ne te fatigue pas. Ton statut, tu l'as ! Et je peins tout ce que j'ai dans les mains. Et je refais à ma sauce tout ce qui ne me convient pas. Et je m'habille avec du rose et du jaune si ça me convient. J'ai très fort caractère et je suis comme ça. Et à tout le Monde, cela déplaît. 

Mais je me perds dans mon être. Je me perds... Lorsque je me découvre des talents que même mes proches, n'ont pas. Je suis déçue. Je m'ignore alors. Pourquoi eux ? Pourquoi moi ? Qui suis-je au final, sinon une gosse que l'on a mise dans un coin et séquestrée pour ne pas qu'elle évolue en temps qu'elle-même. Gamine blonde, cheveux bouclés, d'une famille toute autre pour partie que celle qui l'a élevée. Adolescente perdue, ne se donne ni joie, ni statut et fait sa vie tel un automate. Va courir. Va recourir. Atteins presque les podiums et se lasse. 

C'est lassant, c'est tuant les entraînements pour au final ne rien avoir à la clef qu'un bout de métal autour du cou. Quel intérêt ? Aucun, faut-il être bien con pour se laisser abattre dans cette routine. Je l'ai pensé. Je le pense toujours autant. Je surprends. Je mène des débats où personne, je le sais, ne me suivra. Alors je me tais lentement, douloureusement en attendant le prochain train pour Demain. Pour un avenir où encore une fois, personne ne me comprendra. 

Le flou me happe et l'Art me pète le crâne. Parfois ce sont mes proches qui me gonflent en mode ras-le-bol. J'ai pourtant des frères et soeurs. J'ai pourtant quelques attaches. Mais personne n'a la vie qui va, pour me comprendre. Pas en adéquation. Je me sens Vilain petit canard à l'année. Trop talentueuse ou juste, inintéressante dans ses entreprises. Je suis Tout et je le gueule sur les toits. On me revoit en pleine face ma posture de femme soumise. Ok... je ne suis rien. Encore une fois. 

Mais au final... J'ai les talents et aucun droit. J'ai les talents mais aucun amour. J'ai les talents et la solitude toujours. J'ai Tout pour la Réussite et le cerveau pété chaque instant davantage. Parfois, qu'est-ce que je ne donnerai pas pour renaître bête, idiote et conventionnelle. C'est du gâchis, c'est dommage. 


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