Le baiser

vividecateri

Une aventure du 31 décembre


Le 31 décembre, j'avais décidé de le passer seule, avec un plateau repas et une demi bouteille de champagne, installée sur mon canapé, en pyjama, devant la télévision a regardé les émissions répétitives que des producteurs sans âmes ni sentiments empathiques diffusaient durant les fêtes de fin d'année.

C'était sans compter sur mon amie, Roselyne, qui connaissait ma décision et ne l'approuvait pas. Rose est une sœur pour moi, elle sent quand j'ai besoin d'elle et elle m'appelle avant que je fasse son numéro. Cette fois, j'avais coupé mon téléphone. C'était sans compter sur sa détermination. Elle a tambouriné à ma porte en hurlant.

- Vivi ! Tu es sûre que ça va ? Je te sens ailleurs en ce moment ! Tu ne dois pas rester seule pour le réveillon ! Ouvre ta porte ou j'appelle le SAMU!

Que devais-je faire?

La voisine, ouvrait déjà sa fenêtre afin de connaître le pourquoi de ce tapage…

J'ai ouvert.

Le cyclone Roselyne est entré et en rien de temps qu'il fallait pour le dire. Je me suis retrouvée devant le miroir, habillée, coiffée et maquillée.

Roselyne a un énorme et grand pouvoir de persuasion.

Je devais « absolument » passer le réveillon avec ses amis qui étaient « Charmants ». De plus, j'allais retrouver notre bande. Mes amies de toujours, Virginie la généreuse, Sylvie, la boute en train, Lilas la douce, Christine, la grande gueule, Virginie la câline, Claire la fonceuse, Mariam la tendre… Féfée la secrète serait là aussi.

Je ne pouvais plus refuser…

-Très bien Roselyne, je te suis, je prends ma voiture, car après les coups de minuit je reviendrai à la maison. Je ne suis pas très « Fêtes de fin d'année » Tu le sais pourtant !

- Oui, je sais ma Vivi, mais je n'aime pas quand tu es seule surtout après ce que tu as vécu. Tu dois sortir ! Il est temps pour toi de revivre. Tu ne vas pas devenir une sauvage ! On ne te reconnaît plus.

Je devais avouer que depuis ma séparation avec Paul…Il y a deux ans. Je recherchais plus, la solitude que le monde, je savais tout au fond de moi que cette situation ne devait pas se prolonger. Je suis une femme qui aime être aimée. Me blottir dans des bras, écouter une voix aimante… Faire l'amour ! Vivre intensément…

L'amour parfois c'est comme une addiction…Vous savez que cela vous fait du mal, mais vous poursuivez ce mal…

J'avais besoin de calme. Je devais tout remettre en ordre dans mon cœur et dans mon esprit.

J'avais une nouvelle vie, un nouveau boulot, un autre appartement…

La vérité était que je devais trouver le courage de m'assumer.

Repartir vers d'autres horizons.

Le petit coup de pied au cul que Roselyne m'envoyait me serait peut-être, profitable.

Quand nous sommes arrivées chez les amis de Roselyne, ils m'ont accueillie comme s'ils me connaissaient depuis toujours. Faut dire que ma bande de corneilles comme on s'appelle entre nous, avaient fait comment dire…ma publicité…Ces folles !

Les hommes me regardaient comme si j'étais un animal farouche et les femmes comme une rivale… Forcément, j'étais redevenue célibataire.

La galère ! Cette soirée ! Ils étaient tous et toutes décidés à faire la fête. Comme si au réveillon, c'était une obligation! Je déteste le champagne demi-sec, les cotillons, les confettis. Il y a toujours un abruti au nez rouge et au chapeau pointu qui vient vous trompeter dans l'oreille avec le bien nommé « sans-gêne ». C'est agaçant !

Que de paroles futiles, de rires parfois forcés sur des blagues qui se veulent humoristiques. D'anecdotes superflues. De quelques médisances sur des absents…

Je m'ennuyais, comme une louve en cage, malgré les efforts de mes amies pour me faire participer aux festivités et aux jeux idiots, en attendant le passage à l'année nouvelle.

Une seconde d'inattention sur ma petite personne, et je me suis isolée du bruit et de la lumière, sur le balcon. Le temps était d'une douceur étonnante. La nuit était toute étoilée et j'en étais là, à me demander quand j'allais pouvoir filer en douce…Juste en face, de l'autre côté de la rue. J'ai remarqué qu'il y avait aussi une fête. Les mêmes personnes bien habillées, tenant les mêmes coupes de champagne. Un miroir, de ce qui se passait derrière moi.

Je regardais ce spectacle jumeau, quand un homme qui discutait avec un autre garçon s'est détaché du groupe. Il était assez beau gosse, j'ai tout de suite pensé qu'il ressemblait à un acteur dont je cherchais le nom. Il a ouvert la porte-fenêtre et est sorti lui aussi, sur le balcon.

Seule la rue, qui était très étroite nous séparait. Je croyais qu'il ne me voyait pas, je ne bougeais pas, j'étais appuyée contre le mur dans le coin de la rambarde du balcon. Mais c'était une erreur, car juste à côté de la porte, une lanterne me révélait.

- Bonsoir ! Me dit-il. Sa voix était, grave, chaude et comment dire…assez sensuelle.

- Je ne pouvais que répondre, sauvage peut-être, mais pas impolie.

- Bonsoir…C'était plus un chuchotement qu'une réponse d'une femme sûre d'elle et déterminée à ne pas se faire emmerder par un mec qui devait se la péter dans son beau smoking. Belle voix ou pas.

- Vous aussi, vous vous ennuyez ?

- Euh non ! Euh oui un peu, enfin !!! Oui et non.

- Vous êtes normande ?

- Non, pourquoi ?

- Vous savez que vous êtes très jolie sur ce balcon ?

- C'est cela, vous n'avez rien d'autre à faire que de me marmonner des bêtises ? Votre femme ne va pas être heureuse de vous savoir en train de draguer une inconnue de balcon à balcon.

- Mazette! Un fauve ! Je n'ai pas de femme, ni d'amie. Vous oui ?

- Oui ! Euh non !

- Vous êtes certaine que vous n'êtes pas Normande?

- Je ne suis pas normande et de toute façon qu'est-ce que cela peut vous faire ?

- Une tigresse !

- Oh ! Monsieur arrêtez de m'ennuyer ! J'étais tranquille, j'étais peinarde…

- Ha ! Vous aimez Renaud ?

- Pardon ?

Et voilà qu'il se met à chanter…

- « J'étais tranquille, j'étais peinard
accoudé au flipper,
le type est entré dans le bar,
a commandé un jambon-beurre,
puis il s'est approché de moi…

Plus fort que moi, j'ai terminé son refrain par …

- « Laisse béton ! »

Et nous avons éclaté de rire. C'est à ce moment que les deux portes se sont ouvertes sur Roselyne, et pour lui un ami, ils nous ont appelés. Minuit sonnait. Un petit signe et nous sommes repartis dans nos mondes.

Après les bises, les vœux et tout le tralala. J'ai salué tout le monde et sous le prétexte d'une terrible migraine que personne n'a cru. La promesse de donner des nouvelles le lendemain et celle de prévenir Roselyne quand je serais arrivée à l'appartement. J'étais dans la rue, la clef de ma voiture en main.

Quand un homme s'est approché. Une seconde de frousse et l'envie de sortir ma bonbonne de gaz au poivre. Une seule seconde, car sa voix m'a fait remonter d'un étage. C'était le beau mec du balcon.

- Vous partez belle amie?

- Non je vais faire du ski…Cela ne se voit pas dis-je en montrant mes escarpins. Nous ne sommes pas amis et puis c'est tout ! Bonsoir.

- Vous êtes toujours sur la défensive ? Pourquoi ?

- Cela ne vous regarde pas. Bonsoir Monsieur ! Passez votre chemin.

- Vous pourriez me souhaiter la bonne année ?

- Et encore quoi ? Un vélo avec une grosse sonnette ?

C'est à ce moment, je vous jure, qu'une voix à l'intérieur de ma petite tête m'a dit : « Vivi, tu es exécrable. Ce type est charmant ! Excuse-toi !

C'était vrai, cet homme ne méritait pas ma mauvaise humeur. Je n'ai pas eu le temps de dire un mot, qu'il m'a attrapée par la taille et a posé ses lèvres sur les miennes !

Madre mio…

Le baiser! Il y avait longtemps que je n'avais plus ressenti cette émotion! Un baiser passionnel! J'ai fermé les yeux, mon âme s'est abandonnée dans l'infini euphorique. J'étais en état de grâce mystérieuse et sublime. C'était plus qu'une rencontre de nos lèvres ! C'était une rencontre de nos cœurs! Je reconnaissais dans ce baiser plein d'amour frénétique, un baiser qui pouvait me transporter instantanément dans un monde paradisiaque, dans un monde enchanté…

Je n'avais plus, qu'un désir : Mêler nos corps, nous fondre l'un dans l'autre.

M'abandonner à l'amour…

Pourquoi, je vous raconte tout cela ?

Parce que nous sommes le 1er janvier. Que je viens de me réveiller. Que je sens la bonne odeur du café et que ce n'est pas une bouilloire qui siffle dans la cuisine.

Je n'ai pas de bouilloire. Elle n'est pas belle la vie? Bonne année !

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