Le CRS et la Zadiste

Le CRS et la Zadiste

Il l'avait repérée de loin, qu'est-ce qu'elle était belle avec ses longs cheveux bruns, son air déterminé et farouche, une vraie pasionaria...

Elle l'avait remarqué, au milieu de tous ces casques noirs et de ces visages fermés, durs et impassibles qu'ont les CRS lorsqu'ils attendent l'ordre de charger...

Il pensa : j'aimerai bien lui parler, mais comment faire ?

Elle se dit : s'il m'adresse la parole, comment vais-je réagir ? Moi avec un CRS ? Quelle idiotie !... Mais il a l'air si différent des autres lui... Il a l'air si tendre...

Il pensa (au règlement) : ne jamais fraterniser avec des manifestants, ne pas leur répondre, ne pas leur adresser la parole. Juste hurler pendant la charge c'est tout !

Elle se dit : tout de même, et si je lui offrais une fleur ?

Il pensa : je l'inviterai bien au cinéma, mais je ne sais pas si elle voudra...

Elle se dit : bon on verra bien, mais il me plait ce petit CRS tout mignon...

Il pensa : moi avec une zadiste ? Que vont dire les collègues ? Oh je m'en fous, elle à l'air si chouette, si « cool »...

Et soudain ils n'eurent plus l'occasion de se dire ou de penser quoi que ce soit

L'ordre de la charge avait été donné...

L'espace fut rempli du vacarme des tirs de grenades, dans les deux camps tout le monde gueulait et hurlait...

Ce fut une ruée sauvage de part et d'autre, le choc fut terrible...

La zadiste balança au jugé un cocktail Molotov dans le groupe des CRS...

Le CRS tira au hasard sa grenade offensive dans le groupe des zadistes...

Par hasard le cocktail Molotov atterrit sur la tête du CRS.

Et par hasard aussi la zadiste reçut la grenade offensive en pleine poitrine...

Et leur histoire d'amour s'arrêta nette ici...