Le temps d'un paquet gache

Alexis Venifleis

J’ai dit “que l’ecriture soit”, et j’ai ecrit. Fin de celibat pour moi, je suis ecroue. J’ai purge ma peine. Motif: Manuscrit volontaire, et victimisation de ma complice de toujours.

Nom: Ecriture. Date de naissance: 21/12/1988. Nationalite: Francaise. Adresse: 18 rue du crane ecervelle. Casier vierge.

Mon proces s’est tenu sans juge, et elle s’est fait justice elle meme.

Oui, l’ecriture c’est comme une femme, suis la elle te fuit, fuis la elle te suit. J’ai bien tente de la corrompre, en vain. Elle reste fidele a ce qu’elle est. Obstine, j’en ai abuse, jusqu’a la violer. Trop fiere, elle ne s’est jamais vraiment vengee, mais m’a simplement condamnee, delectee de son exil. Un prix a payer sans appel, une peine de mort spirituelle. Bonnie sans Clyde, Thelma sans Louise…

Je la voit rire derriere les barreaux imaginaires que forment ses H, mon inspiration ligotee entre le O et le Q. Elle avec la consonance de son vocabulaire, la richesse de son eclectisme, l’ignominie de ses termes. Orphelin de l’art qu’elle developpe parce que j’ai sous estime sa valeur. Son indifference m’a rendu lamentable, au dela de l’inracontable. Elle a fait de moi un bandit de l’alphabet, un malfra du vocabulaire. 1 mois jour pour jour que je suis sous liberte conditionnelle, tentant de reprendre mes habitudes d’etre humain. De vivre avant d’ecrire.

Et la voila donc ce matin, qui debarque a l’improviste sans preavis. Incognito, accent circonflexe en guise de chapeau, sur la pointe des pieds en italique, bronzee, presque noiraude. Pas de fioriture, elle y va franco et n’hesite pas a mettre les points sur les I, ainsi que les barres sur les t.

Maquillee, elle m’allume avec son charme naturelle. Encore mefiante, elle prefere rester cachee, mais m’incite a la faire parler sur ces pages. Pourtant etrangement decontractee, elle s’assoit gentillement a cote de mes neurones, et me supplie de lui apporter de la nicotine ainsi qu’une tasse de café pour la garder eveillee. Je m’excute, et elle s’elance. Elle me fait part de ses vacances de paresseuse. Farniente, et cocotier me dit cette salope epistolaire. Je l’ecris, passionne et son rythme me mene a la baguette, pourvu qu’elle ne se tire pas. J’aimerais lui faire part de tout ses mois sans elle. Rediger le calvaire qu’a engendre son absence, et m’appuyer sur ces facultes pour condenser un resume. Lui raconter ces episodes festivals qu’elle a rate, ces deboires sentimentales qu’elle adorait. Lui rafraichir la memoire, lui expliquer que Scarlett c’est le bon vieux temps, et qu’entre temps Eden, Deborah et Anais ont fait leur apparition. Sans oublier de me faire pardonner de l’avoir brusquee… C’est avec son lot de voyelles et ses paires de consonnes que j’implore sa clemence pour former deux mots qui font que nous ne faisons qu’un : Excuse moi.

Fort heureusement le temps n’est pas au passé, mais aux retrouvailles de l’instant present. Embarasse, mais heureux de m’etre rabiboche je ne peux que lui lacher le célèbre “tu n’as pas change”. Toujours aussi libre et anarchiste, vieille plume. A la fois cynique, realiste, joueuse, legere, etrangere… Sequence emotion lorsqu’elle se saisit de mes doigts pour ecrire ceci: “Je ne vis que par toi, et ta vie est faite pour etre ecrit.”

C’est reciproque, je ne m’enrichie que grace a toi.

En plus de la fortune, tu m’a offert un banquet de femmes. Elles sont a la queue leuleu derriere ma bite, et avalent aussi bien mes mots que mon gland. Mieux, tu m’as sauve de la mievrerie, en echange de l’aigreur meilleur rapport facilite/attraction.

J’ai le sentiment que tu n’es que de passage,  mais ne te fait pas prier pour rester.

Mi casa es tu casa. Reprend tes habitudes, tu connais la maison, mets toi a l’aise. Tu seras contente de voir que je t’ai achete un nouvel ordinateur. 21eme siècle oblige, tu es maintenant a la pointe de la technologie et disposes des meilleurs outils pour t’exprimer. Alors j’insiste, fais comme chez toi. En plus papa et maman te connaissent et louent tes qualities. D’ailleurs tout le monde me demande de tes nouvelles depuis l’an passé, on ne te presente plus. Ton cercle de fans s’est elargie, et ils te reclament. J’ai bien essaye de t’imiter, d’autres de te copier, mais rien ne te remplace. Affronte la rancon de la gloire.

Bref, tu l’as compris vieille plume, on a beaucoup de temps a rattraper toi et moi, alors ne fou pas tout en l’air.

Perplexe, elle se complait dans un mutisme et laisse une page blanche.

Enfin elle ponctue.

-"J’ai un projet pour nous m’accorde t-elle, mais il faut aussi que tu payes mon billet ajoute t-elle sourire en coin.

Rejoins moi a l’aeroport je t’expliquerai.

Je suis fatigue, ecrase moi cette cigarette, j’ai besoin de respirer a present."

Bonne nuit et n’oublies pas ton passeport.

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