l'enfant

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le temps n'existe pas, extrait n°21
je me retrouve à nouveau dans la forêt. l'enfant est devant et me reprend la main. il marche doucement. étrangement cette fois-ci, mon regard est à même hauteur que son regard. 

nous marchons pendant plusieurs minutes silencieuses au milieu de la jungle. mes pieds nus rougissent au contact du sable. nous passons à coté d'animaux gigantesques. des éléphants aux yeux bienveillants. des ours immenses aux poils changeant de couleurs. passant du brun au gris clair. leurs yeux de vert à bleu. d'un bleu si blanc. l'envol d'oiseaux vient rompre le silence. leur nature m'intrigue. corps d'aigles et becs multicolores. je suis émerveillée devant cette vie si éclatante.

l'enfant me lâche alors la main. et s'assoit en tailleur en face de moi. 
ses mains se posent sur la terre rouge.

il se met à me parler.

« tu ne comprends pas ce qu'il t'arrive, n'est-ce pas? »

l'enfant ne me laisse pas le temps de lui répondre.
son visage est dur. et pourtant se dégage de lui une bonté ressentie nulle part ailleurs.

« nous ne comprenons pas ta venue. tu es le premier humain à être entré dans cette forêt. nous ne connaissons de ton peuple que les images que le vent nous fait parvenir. nous ne savons pas si nous te voulons ici. tu représentes l'ultime Souffrance du Monde. »

il s'arrête alors de parler. je n'ose pas ouvrir la bouche.

« personne ne souffre ici.
devines-tu qui nous sommes? »

je fis non de la tête. j'ai peur. assise en face de lui, mes genoux rejoignent ma poitrine. mes yeux s'humidifient mais je ne pleure pas. mes doigts sont si petits.

« nous sommes ce qui auraient pu arriver à ta race. nous sommes car nous avons réussi à abandonner ce que vous n'avez pas réussi à abandonner. nous sommes ce que vous ne pouvez plus être. »

le vent vient alors caresser mon visage.

« nous nous posons tout de même une question. qui d'entre nous est l'erreur? nous ne pouvons cohabiter et ta venue est dangereuse. mais nous voulons des réponses. un seul de nos deux peuples s'en sortira »

c'est étrange, aucun son ne peut sortir de ma bouche pour lui répondre. les mots s'échappent au fur et à mesure que j'essaye de les formuler. 
je crois que je n'ai pas encore appris à parler.

dans l'impossibilité d'exprimer une réponse. mes yeux se posent sur l'enfant. droit dans ses yeux.
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