Léo et Léa

Christophe Paris

Plus souvent intermittent que dans le spectacle, Léo est las aujourd'hui. Assistant décorateur de son état, il peine à boucler ses fins de mois comme tout bon artiste qui se respecte. Il a pourtant la chance de bosser sur un long métrage à gros budget... Et c'est justement ça qui lui ruine le moral. Tout ce fric dépensé qui coule à flots, pendant que lui croule sous des dettes qui le mettent à sec. Quatre mois de contrat c'est pas ça qui va étancher la soif du banquier, du proprio, sans parler des impôts.
Le tournage est à l'arrêt suite à une mauvaise chute d'un comédien.
Léo est tout seul, affalé, clope au bec, dans un fauteuil « Club » du film au milieu d'un énorme hangar, entrepôt à bovins désaffecté et loué pour l'occasion. Une véritable caverne d'Ali baba, dégueulante de caisses ouvertes à l'arrache regorgeant d'ustensiles en tous genres. Fringues de marques, accessoires de luxe factices ou non, fausses armes , mobilier années soixante, véhicules d'époque, dont une splendide Corvette rouge de 1965. Ses yeux ne savent plus où donner de la tête, elle-même prête à tourner de l'œil devant cette débauche de tout.

Commence alors un rêve éveillé où dansent tous ces objets soudain pris de vie. Léo leur invente une histoire, un lieu, comme cette théière victorienne qu' il s'imagine effleurée par une main royale. Ces pipes oldschool qui l'envoient aux côtés de Holmes et Hyde, dans ces ruelles menaçantes du vieux Londres aux pâles réverbères. Et puis il y a… Cette superbe décapotable rouge qui lui fait des clins d'œil de ses phares chromés.
« Quelle caisse quand même ! » s'exclame-t-il à haute voix, s'imaginant à son volant, oreilles au vent, rasé, friqué, fringué. Et puis, coup de frein via une pollution neuronale , « Mince la facture de cantine de la petite… ». Il a oublié de la régler, bilan, saisie et frais bancaires. Après le rêve, le gros coup de calcaire, un truc à prendre une guitare et chanter du blues au bord du Mississipi.
Enorme soupir.
Il aimerait bien, « Just for one day » comme disait Bowie, devenir un héros ou tout du moins abandonner le costume du nullos l'espace d'un moment. Endosser l'habit qui fait le moine, le paraître qui rassure, même si derrière se dissimule parfois une raclure. Le rêveur pense à son appart pourri aux murs auréolés de champignons rongeurs de plâtre. La vitre pétée de la cuisine et sa caillante perpétuelle, la peinture qui fait pâle figure, et sa douche, HLM à mouches.
En rouvrant les yeux d'écœurement Léo tombe dans ceux de la corvette qui lui sourit de sa calandre comme une fille qui veut dire oui. La belle auto lui tourne les sens, Léo monte en pression, il est chargé de la nettoyer mais préfèrerait la faire tourner. Insidieusement une idée fait son chemin dans une cervelle qu'il peine à contrôler.
Devenir un autre le temps d'un jour. Être perçu autrement que le looser de service.

Une certaine fébrilité se fait sentir, Léo s'interroge et trouve seul sa réponse. Jouer à l'acheteur haut de gamme et visiter une villa de rêve. Pas besoin de cash dans ce cas, les apparats de la réussite suffiront.
Check-List.
Trouver d'abord le costard qui tue, celui qui fait baisser les yeux des mecs et briller ceux des filles. Le choix est vaste. Grand, bien gaulé, plutôt beau mec, la trentaine sportive, sourire de prédateur et goût prononcé pour l'humour, tout lui va comme un gant. Les trois pièces à grandes griffes défilent, jusqu'à ce magnifique costume St Laurent à l'étoffe bleu pétrole, aussi étincelante qu'une pleine lune. Une belle sape ça vous change un homme, Léo est métamorphosé d'un coup de braguette magique. Il se trouve rayonnant, beau comme jamais, lui qui se perçoit toujours avec un moins devant chaque adjectif. « Un rien change le tout » pensa-t-il en se regardant dans un miroir plein pied d'une des loges. Transformé en riche américain à Weston bleu Klein, fausse Rolex et fausse chevalière en or, Léo se termine avec un peu de gel, du blanchisseur à dent de l'actrice principale, pour finir en chippendale « bankable ».
Il s'empare de la clé de la corvette et s'y installe… Grande inspiration…Mains qui tremblent…Contact… Brooaaaarr, le moteur fait hennir ses chevaux. Fébrile comme un puceau lisant Playboy, il a la chair de poule en passant la première vitesse et boum… Coup de pied au cul, grosse accélération, le tout dans un cri de joie qui dure tout un kilomètre. Tout ça risque de prendre un mauvais tournant et de finir dans le décor, mais grisé par la vitesse et par sa folie passagère, Léo n'y pense pas, n'y pense plus, son esprit est ailleurs, il est autre. Un nouveau soi qui lui reste à définir. Sale con pété de thunes ou riche héritier au grand cœur ? Quel personnage choisir ? Beaucoup auraient sans doute choisi la première alternative histoire de se venger de toutes leurs frustrations en une journée, mais c'est un type gentil il aurait trop de mal. Conclusion, plan beau gosse friqué et dilettante.
La route serpente entre les champs colorés de la vallée de Chevreuse submergeant les narines de Léo des parfums de campagne. L'odeur de fesses négligées des champs de Colza d'un jaune à faire pâlir le soleil, le parfum comme torréfié des champs de blé mûrs, la fraîche moiteur de la luzerne qui l'assène de chlorophylle. Tout lui semble plus beau, plus fort, plus dense, et lui se sent bien.
Il se dirige vers une agence de location de luxe trouvée via Google et pas trop loin du tournage. Arrivé à destination, il se gare exactement en face de l'agence histoire de rentrer dans le vif du sujet. Ça en jette y'a pas à dire tous les badauds le matent avec une pointe d'envie ou de jalousie, pas habitué Léo est un peu gêné mais se reprend à l'arrivée de la miss de l'agence.
« Waoh ! Évidemment un pur canon, tu m'étonnes… Louer une baraque à 80 000 euros la semaine, vaut mieux un joli représentant de commerce, c'est sûr » pense un Léo amusé et dont l'œil se coquinise à l'approche de la beauté. Une échassière à hauts talons, grand décolleté et lèvres en bouée de sauvetage. Une rousse cuivrée à teint de visage pâle et yeux de squaw en amande, qui déboule dans une démarche à faire blasphémer dix générations papales.
- Bonjour, je suis Léa, enchantée  enchaîne-t-elle,
- Bonjour, je suis Léo, enchanté enchaîne-t-il.
Petits rires retenus des deux côtés, serrage timide de la mimine
- Le hasard a parfois de l'humour c'est un plaisir de vous rencontrer.
- Le hasard a parfois bon goût, quelle heureuse fortune de croiser votre route, répond un Léo qui joue les playboys oldschool option voix de crooner, dans un naturel qui le surprend. Léa rougit des joues, sourit des lèvres et cligne des paupières six fois de suite un peu troublée par le joli cœur
- Euh…oui…bon…alooooreuh, je viens de réceptionner cette magnifique propriété dont je vous ai parlé au téléphone, vous en êtes le premier visiteur balance-t-elle de manière frénétique comme pour laisser son trouble sur place.
- Ah parfait, ça me donnera un sujet de conversation dans l'une de mes soirées caritatives.
- Vous travaillez dans l'humanitaire ?
- En quelque sorte répond Léo, j'organise des diners de bienfaisance pour célébrités et gens fortunés.
- Oh mais ce doit être exaltant de rencontrer ce que la planète produit de mieux.
- Si vous entendez par là, qualité de coupe de leurs robes haute couture, certes. En revanche si vous considérez que l'habit ne fait pas le moine, vous réalisez rapidement que côtoyez les pires raclures que notre généreuse planète ait porté.
- Ah ?!! répond une Léa interloquée parle discours du beau parleur, mais alors pourquoi les fréquenter, n'est-ce pas contradictoire ?
- Détrompez-vous, au contraire.
Léo déballe une impro avec un naturel qui le surprend.
- Disons que mon argent ne suffirait pas à sortir le monde de l'impasse dans laquelle il se trouve. J'ai donc décidé de le garder, mais de l'investir à faire banquer banquiers et nantis en jouant sur leur culpabilité voire cynisme. En un mot les "J'me sens pas bien d'avoir tant de fric " et les "Rien à foutre mais c'est bon pour ma côte de popularité". Je métamorphose leur coupable noirceur en assiette à 500 euros pièce. Pas un sou pour moi, leurs virements partent directement sur les comptes des associations sous leurs yeux ébahis et satisfaits via écran d'ordinateurs. Ils m'adorent parce qu'ils savent que leur fric est réellement investi... Je cite... Terrible non ? Certains disent de moi que je suis le robin des bois du CAC 40...
- C'est.. surprenant, en effet. Léa est dubitative, il a de beaux yeux, une belle tête qui tourne aussi rond que son coupé sport, mais quand même quel drôle de phénomène, et son vocabulaire... Les riches sont vraiment imprévisibles pense-t-elle.

La route défile, les liens se tissent, tandis que Léa ne cesse de rire aux ancetdotes de Léo, toutes fausses évidemment. Voici nos deux décapotés arrivés devant un portail à motifs déstructurés. Une tuerie. Un picasso en fer forgé qui s'ouvre sur une verdure luxuriante aux arbustes taillés comme des Rodins, copies exactes du jardin du musée. La voiture avance sur un chemin de grès rose dévoilant une bâtisse d'un modernisme total dessinée par Franck Ghery. Huit cubes comme fondus, posés l'un sur l'autre sur deux rangées à la limite de la chute, tant leur équilibre paraît précaire.
- Indiciblement époustouflante, quelle splendeur ! On croirait une oeuvre échappée de Beaubourg
- Hum il a quand même du vocabulaire finalement... Remarque Léa qui débute la viste empreinte de ce cliché si français, "si tu causes bien t'es respectable, dans le cas contraire t'es qu'un minable". Etrange pays où les mots peuvent ouvrir des portes... Ou non.
- Bien ! je vous propose de déambuller dans cette extraordinaire maison sans vous influencer par aucun commentaire mais en restant à votre entière disposition pour toute éventuelle question.
- Léo aimerait effectivement bien en disposer de la miss, mais autrement, vu les courbes de la VRP. Des courbes comme celles de l'intérieur de la baraque. des lignes douces qui se frôlent, se touchent, sous l'oeil de perspectives aux volumes improbables. Des baies vitrées gigantesques, des terrasses en cuillère fondues, des escaliers futuristes semblant flotter dans les airs. Léo est largué, pense à Dali et n'écoute même plus la miss qui malgré tout déblatère son blabla. Il est stupéfait par cette douche pluie de 30 m2. Un ciel parigot mais avec une flotte à 39 °, un truc à vous métamorphoser un parisien en marseillais. Notre faux riche est à la fois admiratif et perturbé, à la limite d'en gerber. Tout ce cash, toute cette absence d'emmerdes qui rongent la vie au lieu d'en profiter, c'est là devant lui, comme à la télé mais en vrai.
IL blanchit d'un coup, se met à loucher et prétexte une visite du jardin zen d'intérieur hisroire de prendre l'air. Dans le même temps Léa répond à un coup de fil. "Doit être son mec " se dit un Léo en un léger soupir intérieur.
- ... Ok si tu veux passes me chercher mon client doit directement partir, j'allais commander un taxi... d'ici 10 mn, je savais pas que tu étais dans le coin... ah... un problème ? Bon tu me raconteras, à toute.
Léo se zénifie dans le jardin avec ses petits cailloux blancs, ses bonzaïs, un bassin à poissons chinois et du gazon de-ci de-là. Une fois le coup de fil terminé, il se retourne pour rejoindre sa loueuse sans faire attention à ses pieds qui glissent sur l'herbe humide, le plongeant lamentablement dans le bassin de tout son long, façon dos crawlé. Son instant de survie cède à la panique et tente de reprendre dignité le faisant se dresser droit comme un ressort à la démarche de Jacques Tati.
Vlam ! Same player chute again, cette fois-ci face contre terre. Glissade, mais dans la boue. Il ressemble à s'y méprendre aux morts vivants de séries B tant sa démarche de mec trempé, souillé, semble inhumaine. La pauvre Léa ne peut s'empêcher de s'esclaffer tandis que Léo transi de froid et de honte reste hagard et bouche ouverte.
- Euh.., enchaîne-t-il. Unique son que peuvent émettre pour l'instant ses deux hémisphères complètement largués des pôles.
Amusée puis touchée par les vicissitudes de son client et de sa tête déconfite, Léa reprend le dessus, retour au protocole comportemental.
- Oh mon pauvre Monsieur, Oh mon cher Léo, je suis navrée par ce qui vous arrive, rassurez-vous nous prendrons tous les frais à notre charge. Je pars vous vous chercher des serviettes. La voici qui monte dard dard, butine deux trois serviettes, redescend en mode abeille à la bourre et débarque dans un jardin qui a perdu de son zen.
Léo fait peine à voir de loin on jurerait un homme sur cintre. Les bras le long du corps légèrement écartés, la jambes raides et la tête penchée vers ce sol qui l'avait trahi. Sa tête a beau être penchée, elle pense, et à plusieurs choses en même temps, fait rarrissime chez la gente masculine. A ses pompes, celles du second rôle, toutes cradasses,le costard du rôle principal tout pourri de boue et la Corvette à ramener sans la salir...
Léa lui tend une serviette qu'il peine à attraper tant il est frigorifié.
- Laissez-moi vous aider, lui propose-t-elle.
- Non non ! , laissez, vous aller vous macculer.
- Non, détendez-vous, laissez moi faire ce sera plus rapide, reprend-elle, commençant à lui nettoyer le visage.

Léo était gelé mais se réchauffe vite quand le tissu effleure sa peau, son regard bleu glacier noyé dans le vert émeraude des tomahawks de Léa. Les visages sont si proches qu'il perçoit le souffle parfois retenu de la miss, comme pour étouffer autre chose. Une fois terminé elle enchaîne par le costume, débutant par le haut puis descendant jusqu'à sa poche de pantalon. Léo est troublé, son regard plonge dans le décolleté de sa bienfaitrice qui s'est décalée pour plus d'efficacité. Lui aussi commence à retenir son souffle, on ne sait jamais dès fois que son sexe réagisse avant son cerveau, et puis il a d'autres priorités à gérer... Il décide de noyer le poisson, pas celui du bassin, et réattérit sur terre.
- Bien... Je crois que nous allons nous allons en fnit ici, la maison me plaît énormément mais les circonstances font que je préfère en écourter la visite.
- Oui , j'entends bien, ne vous souciez pas de moi pour le retour, mon frère vient me chercher, il ne devrait plus tarder d'ailleurs...
- J'aurais préféré le faire moi-même mais je dois rentrer directement, j'en suis désolé croyez-le bien. En revanche, auriez-vous un peignoir ou équivalent que je puisse recouvrir mon costume afin d'éviter de tâcher la voiture ?
- Oui oui bien sûr, montez à l'étage, il me semble en avoir aperçu un, je vous laisse vous changer.
- Parfait ! j'en ai pour un instant et je vous libère.

Léo une fois dans la salle de bain, se met à verdire en réalisant l'ampleur des dégâts et le licenciement qui va s'en suivre. Il se fait face, certes devant le miroir, mais c'est déjà ça. Il se tire le visage comme s'il voulait en changer, se mord les doigts comme s'il voulait se bouffer pour disparaître, se frotte les yeux avec les paumes pour les empêcher de voir le désastre. Il se demande même s'il ne va pas tout planter et disparaître de la nature, mais réalise qu'on l'accuserait d'encore pire. Enorme soupir à en exploser une mongolfière, reprendre le show... Deux auto-claques et un "Allez mec" propulsent Léo dans l'escalier.

Pendant ce temps Léa ouvre la porte à l'inconnu du bout du fil.
- Salut mon frère ça va ?
- Non pas trop, soucis de boulot, laisse tomber. Tu vas bien ? T'as bientôt fini ? si tu veux je sors dans le jardin.
- Non non ça va ne t'inquiètes pas. Ecoute, c'est incroyable ce qui vient d'arriver à mon client, chuchote-t-elle, je te raconterai après son départ, ajoute-t-elle en commençant à rire. En tout cas tu te marres pas, hein p'tit frère! Il se change pour pas salir sa Corvette rouge, si tu veux la voir elle est derrière.
- Une corvette, ah ? Non mais c'est quoi ton client ? un clown ? Un acariennophobe ?
- Oh arrêtes Mathieu, c'est pas le moment j'te jure...
A cet instant, déboule un Léo tout penaud en peignoir, nouant sa ceinture. C'est au milieu de l'escalier qu'il relève sa tête de noeud dépitée et que tout va partir en couilles.
le frangin débite.
- Mékêsstufoulatoua ? S'adressant à Léo pétrifié.
- Mékêssfifoulalui ? S'adressant à léa dans le même état de congélation, qui enchaîne totalent perdue,
- Hein? Quoi ? Je comprends pas...
Le frère poursuit.
- Kêsstufou en peignoir toi ? t'as baisé ma soeur ? Fustigeant Léo.
- Kêsskifou en peignoir lui , y t'as baisé ma soeur ? Fustigeant Léa.
La soeur reprend ses esprits,
- Hé mais tu vas te calmer oui ! ça va pas de parler à mon client comme ça !
- Ton client ?!! Mon cul oui ! C'est mon assistant déco! J'comprends le coup de la corvette maintenant. Non j'y crois pas Léa tu t'es tapé un de mes décos... Et toi p'tit... p'tit... Chais pas ce que tu fous là, mais toi tu vas morfler. Déjà t'es viré ! Et j'vais...
Coup de théâtre, le peignoir joue les traîtres et dévoile le méfait de Léo tel un lever de rideau.


Réaction atomique de mathieu,


- Oh putain, oh purée, oh le con! Non mais le con ! J'y crois paaaaaaas... Le costard du premier rôle. Soudain Mathieu se sent empli d'un grand calme et c'est dans une plénitude totale la voix zen qu' il s'adresse à Léo.
- Maintenant... Je vais... T'ato... Miser... La face.... Espèce... De... Petite... Merde.
Pouf ! Fini le zen, mathieu bondit sur Léo pendant que Léa s'interpose histoire de pas casser la baraque, et que non elle n'avait pas couché avec !
Le réalisateur relâche sa presque victime la mort dans l'âme, pendant que Léa balance un " Mais c'est quoi ce bordel ? Dans une voix stridente à faire s'écrouler les murs de jéricho.
Léo fait son mea culpa sur un ton à filer une dépression à un troupeau de mouton.
- Je suis désolé mademoiselle, c'est vrai je suis imposteur. Je me suis joué de vous, de moi, de Mathieu, sincèrement je le regrette amèrement. Je ne sais pas ce qui m'a pris, un coup de folie, un ras lebol de la médiocrité, une envie de légèreté d'insouciance. J'en avais tellement marre de jouer à la pêche aux thunes, de pas pouvoir acheter un cadeau d'anniversaire à ma môme, de gruger dans les transports, avec la trouille de chopper une amende comme compagnon de route, de bouffer des pâtes, d'avoir le phone coupé, le banquier qui me scalpe à chaque découvert, mon ex qui me traite de bon à rien et de mauvais en tout... Chais pas, me suis pas rendu compte, j'pensais que tout irait bien que j'aurais tout remis en place avant le tournage. J'me sens honteux, merdique.... J'vous d'mande pardon...
- Naaaan mais tu rêves là lui répond sèchement le réal, j'vais porter plainte dans tous les sens, même giratoires si nécessaire! J'vais te faire raquer toute ta vie, tu viens de me foutre en l'air une journée de tournage et va falloir recommander un costume. Celui-là c'est à tes frais d'ailleurs !
- Calme toi Mathieu ! Arrêtes... Tu vois pas qu'il pleure, rétorque Léa touchée par les larmes de son faux riche qui commencent leurs rigoles de tritesse.
- Tu parles ! Tu y crois toi, après ce qu'il vient de te faire gober ?!
Léo coupe court à la conversation.
- Si Mathieu, elles sont vraies. Je pense à ma fille, si jamais mon ex apprend cette histoire, fini mes Week end avec la petite... Putain j'suis trop con...
Long silence de mort, de quoi laisser trois anges passer.
- Putain y manquait plus que ça, peste le réal', quelle galère ce film... Et l'autre andouille de qui se fracture la cheville, plus de second rôle, plus de costard fait chiiiiiiiier !!!
Léa s'illumine d'un coup,
- Mais ?!! Pourquoi tu prends pas Léo ? Tu sais que je l'ai mauvaise aussi sur ce coup là, mais force est de reconnaître que je n'y ai vu que du feu. Il était parfait dans son rôle, attitude, répartie, capacité d'improvisation, élocution... Tu devrais lui faire passer des essais.
- Non mais tu déconnes là ! Jamais alors là ça jamais nom de dieu, et pourtant j'y crois pas à c'lui-là ! vocifère Mathieu.
- Bon écoute moi , tu as confiance en mon jugement non ? Je te le dis ce type est doué, le laisse pas passer.
Léo est stupéfait par les propos de Léa. C'est vrai qu'il s'en est super bien sorti, à sa plus grande surprise d'ailleurs. Du coup il balance naîvement un " Moi je veux bien, hein..."
Mathieu fixe Léo comme un tigre avant de bouffer sa proie, silencieux comme un caïd de polars américains. En pleine réflexion, il se dit que sa soeur est chiante mais qu'elle a toujours raison, qu'effectivement il a une bonne gueule et qu'il irait bien au rôle y compris aux costumes.
- Bon, ok, demain Six du mat' sur le plateau pour des essais, si ça convient je t'engage mais je déduis tous les frais de cette histoire de ton cachet, dans le cas contraire c'est pareil mais sans cachet. Ducon !
Léo accepte l'insulte et la proposition sur un " Oui oui d'accord" à peine audible, comme un môme en plein conseil de discipline.
- Bon tu prends ma caisse Léo sans trop la pourrir, moi je prends la corvette et je raccompagne Léa.
Léo voudrait esquisser un remerciement mais à peine ouvre-t-il la bouche que le réalisateur fait mouche.
- Non tu te tais ducon, tu la fermes ducon, tu dis rien mais rien du tout ducon et ramènes ta fraise demain, duuuuucon và !
Léo regarde partir Léa qui juste avant de monter dans la Corvette lui envoie un sourire de satisfaction, et d'autre chose aussi...
Un an plus tard...
César du meilleur second rôle.
César de la meilleure réalisation.
Garde alternée pour La petite de Léo
Arrivée de Léon et léonie d'ici peu
Et un nouveau surnom pour Léo...



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  • Une vraie histoire avec des changements de rythme ! et en plus j'ai adoré l'incipit ! Bravo !

    · Il y a environ 8 ans ·
    Default user

    Christian Pluche

    • Oh merci christian de ce passage et de ce très gentil com après ces 9 pages ! Et puis tu vois incipit c'est beaucoup plus joli que punchline par exemple, j'ignorais son existence et je le trouve trop beau, merci pour ce com érudit !

      · Il y a environ 8 ans ·
      P 20140419 154141 1 smalllll2

      Christophe Paris

  • Je pense que tout a été dit : super, le fond, la forme, style d'écriture top bref j'aime beaucoup !

    · Il y a environ 8 ans ·
    Ade wlw  7x7

    ade

  • 9 pages, dis tu ! ben je sais pas ! prise par l'histoire, ça ne m'a pas paru long du tout ....! et puis trouver une fin heureuse en fin de lecture, c'est le bonus de ton excellent texte, la cerise sur le gâteau (de mariage) lol

    · Il y a environ 8 ans ·
    12804620 457105317821526 4543995067844604319 n chantal

    Maud Garnier

    • Oh merci maud c trop cool de lire un com pareil gentil et tout et tout, merci bôcou d'aimer ce texte, c dingue je pensais pas avoir de tels retour, you are trop cool maud !

      · Il y a environ 8 ans ·
      P 20140419 154141 1 smalllll2

      Christophe Paris

    • ben quant j'aime, je le dis ! et ton texte est extra !... ;-))

      · Il y a environ 8 ans ·
      12804620 457105317821526 4543995067844604319 n chantal

      Maud Garnier

  • :)!!

    · Il y a environ 8 ans ·
    W

    marielesmots

  • Ah j'adore ... le ton, le style ... comme quoi, la vie réserve parfois de bien belles surprises... un très joli texte, émouvant de surcroît, une réussite !!

    · Il y a environ 8 ans ·
    W

    marielesmots

    • Marie tu es trop choute c génial de voir que toi aussi tu l,as lu till the endbises ainoumes

      · Il y a environ 8 ans ·
      P 20140419 154141 1 smalllll2

      Christophe Paris

  • Jolie histoire qui en plus finit bien.

    · Il y a environ 8 ans ·
    Avatar

    nyckie-alause

    • Merci nyckie du passage du com et d'avoir passé les 9 pages, ça fait plaisir vraiment je pensais qu'il était trop long, texte léger ki m'fait du bien, merci !

      · Il y a environ 8 ans ·
      P 20140419 154141 1 smalllll2

      Christophe Paris

  • On se met à l aise dans ses s'est-on d emprunt.... Le pauvre qu'elle heureuse mésaventure.

    · Il y a environ 8 ans ·
    1385039 10202424689364391 539870953 n

    Barbara Sniggel

    • Oui un peu de positivisme ça fait du bien ! Merci du passage barbara aux 55 jambes !

      · Il y a environ 8 ans ·
      P 20140419 154141 1 smalllll2

      Christophe Paris

  • J'ai tout lu jusqu'au bout parce-que j'aime ton écriture d'jeuns et rigolote. Quelle histoire dit-dont. La vie, maniée par des amoureux des êtres est parfois bien foutue hein? Nos marionnettes parfois, trouvent le bonheur tout au bout du récit. Bravo.

    · Il y a environ 8 ans ·
    D9c7802e0eae80da795440eabd05ae17

    lyselotte

    • T gentille merci pour ton courage 9 pages ! et ce gentil com, t un amour lyselotte et oui j'avais besoin d'une histoire positive, c rigolo elle est venue tte seule et elle a grandit tte seule cette histoire pis elle m'a forcé à faire gaffe à des trucs, c étrange l'écriture, marci bôcou lyse :)

      · Il y a environ 8 ans ·
      P 20140419 154141 1 smalllll2

      Christophe Paris

    • L'écriture est miracle je ne le dirai jamais assez ! magie...

      · Il y a environ 8 ans ·
      D9c7802e0eae80da795440eabd05ae17

      lyselotte

    • J'aime tes coms et tu vois le fait de le relire me fait prendre conscience de l'existence de nos persos de leurs prises de vie sous le stylo, comme un metteur en scène avec ses comédiens dont les personnages prennent vie sous ses yeux, en fait c chouette d'être dieu, de décider du jour de la nuit de la vie ou de mort d'un perso du comment et du pourquoi, nous sommes des petits dieux faits de papier et d'encre tt nous est possible et tt ça sans coûter une blinde, quoique mon cahier il est cher qd même...

      · Il y a environ 8 ans ·
      P 20140419 154141 1 smalllll2

      Christophe Paris

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