LES PINSONS DE STRADIVARIUS

L'antidote contre les hommes en noir était située à Ořech, banlieue de Prague éloignée d'une quinzaine de kilomètres. Le verre de Babicka, une vodka tchèque élaborée à partir d'une recette de sorcières vieille de cinq siècles, avait été avalée d'un trait. Le trio avait repris haleine, exprimé ses inquiétudes. Racine avait fait connaissance avec la famille de Johanna Masaryková.

Les présentations participaient plus aux surprises qu'aux déplaisirs. Juliette, Johanna et Boris étaient frères et sœurs de Zora Kralová, père inconnu pourtant dénomi-nateur commun patronimique.

Zora était la fille de Matylda Bradvislav dont la mère était une certaine Magdalena Cermáková, née en 1894. Deux violons Dvořák en épicéa pour la table, érable pour le fond, éclisses et manches étaient exposés dans une vitrine. La parité des cordes revenait à des Dominant Thomastik et Larsen. Une irrésistible envie de caresser les violons complaisait l'ossature de Racine, au coeur d'une intrigue proche de Mission Impossible. Racine Phelps, cette éventualité le séduisait.

La stupéfaction allait éclore dans la soirée par une confession de Johanna. Bibliothécaire au Clementinum, elle avait découverte, dissimulée à l'intérieur dans une ouverture de couverture fendue d'Antonin Dvořák, une partition intitulée "Les Fougères". Cette œuvre était dédiée à une certaine Magdalena Cermáková. L'histoire racontait qu'Antonin Dvořák était tombé amoureux d'une Josefina Cermáková dont il avait écrit un cycle de chansons "Les Cyprès" afin d'en conquérir son coeur. Cependant, il avait épousé Anna, sa sœur dont neuf enfants en étaient issus.

Magdalena était la troisième sœurs Cermáková et il en était amoureux aussi et avait composé l'oeuvre des "Fougères".

Ainsi, au fur et à mesure que le mystère sortait du pandé-monium, Racine emboîtait les pièces du puzzle. Juliette était donc une descendante de Dvořák, ce qui expliquait son talent pour le violon. Mais pourquoi avait-elle demeurée en Angleterre? La réponse était parvenue de Boris. Afin qu'elle soit en sécurité et sa famille, leur père avait éparpillé ses enfants et Juliette avait été abandonnée dans un orphelinat de Londres. Racine avait quémandé un autre verre de Babicka et réclamé à voir l'oeuvre des "Fougères".

Johanna était revenue avec deux partitions, conseillant Racine à une analyse minutieuse des noms et autres inscriptions présentes. La première était très célèbre: symphonie n°9 en Mi Mineur, op.95 du nouveau monde. Racine reconnaissait cette œuvre. Cependant, la photocopie de l'originale détenait l'inscription énoncée par Juliette: Hiawatha. Puis, Johanna avait tendue la deuxième partition, originale retrouvée dans le livre celle-ci. Sur "Les Fougères", on y identifiait Hiawatha également ainsi que "Devil's Kitchen". Racine éprouvait une sensation Holmessienne quand à se demander si Juliette ne jouait pas le rôle du docteur Watson, tant le grenouillage y était ahurissant.

Le World Wild Web et sa toile d'araignée allaient se dé-vêtir en affichant la nudité des "Fougères d'Hiawatha dans une Devil's Kitchen". La trinité dans son simple appareil. Hiawatha était un jeune indien amoureux de Minnehaha, l'eau qui rit, de la tribu des Dokota. Gardien des champs de maïs, il enseignait l'art des pictogrammes avant qu'un destin tragique ne le conduise à la vengeance et à l'exil après avoir tué le magicien Megssogwann avec une plume ornée de perles. D'après la légende, Hiawatha avait été enterré sous une montagne "The Sleeping Giant", à l'est de Thunder Bay sur le lac Supérieur entre l'Ontario, le Minnesota, le Wisconsin et le Michigan.

Quand à Devil's Kitchen, la cuisine du diable êtait une petite grotte située au sud-ouest de l'île Mackinac, dans l'état du Michigan. Selon les amérindiens, le lieu était hanté par des mauvais esprits qui capturaient les visiteurs afin de les dévorer. Selon la compréhensibilité de Racine, Hiawatha aurait habité cette Devil's Kitchen pour se protéger durant son exil. D'un point de vue logique, c'était cohérent pour Juliette, Johanna et Boris. Mais comment relier Antonin Dvořák, Hiawatha, Devil's Kitchen et "Les Fougères" de la famille Masaryková? Évidemment, Dvořák avait composé la symphonie n°9 du nouveau monde lors de son séjour aux États-Unis, ainsi que "Les Fougères" et "Les Cyprès". Une question restait en suspension: pourquoi le trouble par ses hommes en noir? Pourquoi avait-on voulu tuer Juliette, Johanna et Racine?

La complexité engageait un mécanisme à l'international et cette société Freepharma avait-elle payée ces hommes en noir?

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