Lettre dernière à Arthur

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Lettre dernière à Arthur

 

«Je suis un inventeur bien autrement méritant que tout ceux qui m’ont précédé. »

 

Je revois ce qu’on me dit de ce que je dois être. Je reçois contre moi ce qu’on me dit qu’on voudrait que je sois.

C’était en mai, et la fièvre m’encontonnait de tiédeur exaspérante. Je marchandais sans mot des objets qui n’avaient pas d’intérêt. J’apprenais à parler, j’apprenais à me dire que je ne comprendrais jamais. Et que là n’était pas l’importance.

Si la latérite n’avait pas été rouge, j’aurai pu croire que le fleuve m’entraînait. 

Je t’ai croisé deux fois. Dans les cheveux d’un peau-rouge criard, dans la moustache épaisse d’un gaulois colossal. J’ai vu la pâleur de mes traits, la maigreur de mes mains et cette vie que je débutais là.

Le sable était si chaud, leurs corps si noirs et tout me dévorait, dérobait les derniers illusions.

Je n’ai pas eu peur. J’ai laissé les paradis et entamé ma saison en enfer. J’ai choisi la flétrissure, mes débauches et les portes béantes des libertés entières. Je me suis choisie, sans grimer, mortelle et désespérée, vivante et heureuse.

Poète du désir, poète de révolte.

Je t'escorte ici et là, certaine d’entendre ce que tu dis, ne me faisant pas naine auprès de toi, mais gardant la tête haute pour regarder au fond de tes yeux si bleus.

Aventurier, marchand, trafiquant, encore enfant tu admirais le forçat intraitable sur qui se referme toujours le bagne.

« Un soir, j’ai assis la Beauté sur mes genoux.- Et je l’ai trouvée amère- Et je l’ai injuriée »

Puis, tu l’as réinventée

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