Leurs chants

Christian Lemoine

Vous vous souvenez qu’il y avait des appels. Parfois des chants, des cris. De loin dans la ville, ou au plus près des fenêtres. Dans l’obscurité parfois et non sans provoquer quelques crainte remontée de passés immémoriaux. Des appels bondissant au-dessus de vos têtes, ces langages incompris qui vous parlaient pourtant, qui touchaient votre cœur au point parfois d’en rechercher les échos au plus profond de vos mutismes contraints. Des chants rudes ou harmonieux, mais toujours à même de construire les espaces dans vos mondes à plat. Des cris aussi, autrement plus troublants que tous les hurlements mécaniques des cités. Vous ne vous rappelez pas quand ils ont disparu, vous n’y avez pas prêté attention. Aujourd’hui, les silences terribles étreignent vos poitrines, vous en prenez conscience et comprenez combien leur présence sonore vous était nécessaire. Votre vie s’en repend et meurt, emportée peu à peu dans le tourbillon duveteux des syrinx égorgés.
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