Lieux communs

Hervé Lénervé

Je vivais une petite vie tranquille entre ma femme, mes enfants, mes maîtresses et mes petites combines qui me rapportaient un max de blé quand un grain de sable vint enrayer la belle ordonnance.

Une balle perdue qui m'était destinée, me tua par ricochet.

Mon esprit s'en est parti au loin. Je ne crois pas au forces de l'esprit, là d'où je suis, nul ne peut plus me toucher, me blesser, me contrarier, me vexer, plus rien ne m'affectera. Suis-je attristé de ne plus être ? Pas tant que cela. Je n'avais aucune œuvre inachevée qui eut mérité d'être accomplie pour laisser une trace. Bon, juste une fuite à réparer sur le robinet de la chasse d'eau, mais qu'importe, n'importe quel plombier, le fera mieux que moi.

Mes chairs se décomposent, aidées par les vers, ces auxiliaires de mort. Mes os se minéralisent, je reviens à la pierre sans prière. Objet sans conscience à l'instar de ce que j'ai vécu par nycthémère, chaque nuit, en dormant sans rêve, déconnecté de la pensée qui devait tourner à vide sans public, l'égo étant parti faire un tour ailleurs voir si je n'y étais pas.

L'état de mort ne nous est donc pas inconnu et au matin, quand la raison reprend sa place dans ma caboche, en suis-je effrayé ? Que nenni, je suis satisfait de renaître une fois de plus à la vie pour encore une journée entière.

Bon, étant mort, cette étape n'existe plus, certes ! Plus de nouveau réveil, la nuit a gagné. Quant à la résurrection d'un être, il parait qu'elle est advenue une fois, mais si on commence à écouter toutes ces légendes, on n'a pas fini de croire à des conneries, dans l'espoir désespéré de se raccrocher aux branches. De ne pas vouloir accepter la perte de son Moi pensant, même mal, mais pensant quand même. Allez, les gars, un peu de bon sens, d'humilité, même, est-ce si difficile d'admettre que l'on ne soit que néant ? En étions-nous si loin, si on relativise, en mesurant notre dérisoire existence, à l'aulne de l'immensité de l'Univers.

Pas très marrant, le Hervé, today.

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