L'ombre dans le Couloir

Eyleen Ryden

Marion dix-sept ans viens de déménager avec sa famille dans la maison de leurs rêves. Mais, peu de temps après être installé, des choses étrange font leur apparition... Tous droits réservés.
« Nous craignons ce que nous ne voyons pas pourtant nous vénérons l'invisible. »
 Proverbe chinois.

 

Chapitre 1 : Nouvelle vie

     

14/02/2015 – 15h35 – Voiture

 

         Maman a perdu mon journal…  En gros, Lucas me l'a sûrement pris.  Cet espèce de … voleur mal léché !

« On le retrouvera après le déménagement, ma chérie. » Qu'elle me dit, je doute que Lucas consente à me le rendre si facilement, du moins, sans chantage.  De toute façon, il n'y a rien de nuisible dedans.  Maman m'a donné un carnet en faux cuir, avec de belles pages brunies à la place. C'est vrai qu'à côté de mon journal chatons que j'ai depuis six ans …  (Je prends toujours le même chaque année) Ce carnet a la classe, parfait pour une future adulte, même si l'adulte en question demande toujours à sa mère de lui faire son lit…

         Ça peut paraître débile d'écrire un journal à mon âge, mais j'aime mes petites habitudes, faire le point, avoir mes rappels…

         Bref. Aujourd'hui, on déménage.  À deux cents mètres. Maman et Papa ont fait construire une maison, j'aurais enfin ma chambre à moi, sans Cindy, et deux salles de bains. 

         Notre maison n'est pas encore crépie, et l'herbe n'a pas encore repoussé de partout (les constructeurs : maçons, plaquistes et autres que je ne saurais nommer,  on limite rasé le terrain pour le rendre bien plat…), mais c'est la nôtre.  On l'a fait construit en haut d'une colline, près de la forêt, mais pas loin du centre du village.  Mistigri et Brocoli, nos chats seront ravis de l'espace et de la forêt et Darling, notre malinois de quatre mois  – qui tente, actuellement, de manger mes cheveux, aussi.  Darling est une chienne super calme, joueuse, je l'aime beaucoup, je la promenais souvent autour de notre ancienne maison, enfin… elle dirigeait plus moi … mais bon.

         Mistigri miaule … elle n'aime pas trop la cage de transport, alors que Brocoli, dort, on dirait une masse informe, orange, sans tête !  Maman et Papa chargent le denier cartons, Cindy et Lucas se battent, sur leurs sièges…  Histoire de changer.

J'ai demandé à maman si elle n'avait pas retrouvé mon carnet en chargeant les derniers cartons, et non. Je l‘ai peut-être rangé par inadvertance dans l'un des miens … ?

         Enfin, notre maison est vraiment cool, et grande surtout !  Bon, comparé à notre ancien taudis de deux chambres et demie pour cinq, mal agencé et vieux, il n'y a pas photo !  Quatre chambres, deux salles de bain, une salle de jeux et même une piscine : le rêve.

         Bon, après on n'est pas riche, mais maman a dit que le terrain n'était vraiment pas cher et qu'ils ont pu se permettre des extras.  Le vieux qui nous a vendu le terrain ne voulait pas que ses gosses en héritent. Vive l'esprit de famille !

Ah ! Oui, j'ai failli oublier.  Nouveau journal, nouvelle présentation. Je suis Marion, dix-sept ans et des bananes.  Je vis avec mon père et ma mère, ainsi que Lucas, voleur de journal intime récidiviste, menteur et hyperactif.  Et Cindy, six ans, aux belles boucles blondes de star (comparez ça avec ma crinière informe). Douce, mais taquine et elle n'hésite pas à minauder pour obtenir ce qu'elle veut (en même temps, elle est trop mignonne !).

Maman et Papa arrivent, en route pour l'aventure ! (Ou pas.)

 

17h37 – Chambre

         Comment dire ?  Youhou !!!  Ma chambre est juste énorme, avec une déco asiatique, un bureau énorme (j'écris actuellement dessus) et un nouveau PC ! 

Point négatif : ma mère a mis la statuette de clown, que ma grand-mère m'avait offerte sur une étagère.  En face de mon lit.  Et je HAIS les clowns. Littéralement.  Je pensais m'en être débarrassée, je l'enlèverais dans quelques jours, quand ma mère n'y pensera plus, et la jetterait au fond d'un placard.

         Ah, oui la maison, elle est juste … Mwa–wha–oouuh !  Ma mère l'a trop bien décoré, j'avais un doute sur ses talents de décoratrice, mais elle assure ! La salle de jeux a été peinte avec des personnages de jeux vidéo, et le coin bibliothèque est parfait ! Sans oublie le baby-foot, la télé et les deux canapés (des clic-clacs, mais tout de même, c'est cool pour une salle de jeu !).

         Ce soir : Pizza à la lueur des bougies ! D'ailleurs pour écrire ce n'est pas pratique, je plains l'époque où il n'avait que ça et que ça coutait la peau des fesses !

 

P. S. :

Pour échapper aux griffes de notre voleur de journal certifié, j'ai trouvé une cachette parfaite : sous ma housse de matelas, et mon oreiller par-dessus pour masquer toutes empreintes possibles du carnet. Ni vu, ni connu !


Chapitre 2 : Première Nuit


La jeune fille releva la tête, chassant ses mèches châtain, elle avait l'étrange impression d'être observée. Elle fixa la fenêtre un moment, la nuit tombait vite, bientôt, même avec ses bougies, elle ne pourrait plus écrire. Elle la ferma rapidement, et se sentit un peu rassurée. Elle ferma son carnet et le glissa sous sa housse, sans cesser de vérifier que la porte était bien fermée. Ne parvenant pas à se débarrasser de cette drôle impression, elle vérifia sous son lit, dans ses placards. Personne.

Elle poussa un soupir et éteignit les bougies qui éclairaient la chambre. Alors qu'il ne lui en restait que deux à éteindre, elle crut voir une ombre se glisser derrière elle. Elle se retourna et ne vit rien d'autre que l'obscurité opaque de sa nouvelle chambre.

« OK… Si je flippe maintenant, qu'est ce ça vas être ce soir…

Elle inspira profondément, souffla une bougie, prit la deuxième et pénétra dans le couloir obscur, éclairé par d'autres lampions au mur. Marion avait l'impression de se balader au milieu de feux follets légèrement inquiétants.

 Le couloir était très long, si long qu'à un instant la jeune fille se demanda si elle ne  rêvait pas. Une bougie s'éteignit à son passage. Elle poussa un cri de surprise et accéléra. Mais elle se prit les pieds dans quelque chose de mou et tiède.

—   Miaou

—   Mistigri !

Elle s'accroupit à son niveau.

—   Hey, Gros matou, c'est l'heure de manger, viens.

Le chat au pelage coloré ne bougeait pas. Il semblait fixer quelque chose derrière elle. Marion frissonna, n'osant pas se retourner. Elle sentait quelqu'un derrière elle, quelque chose. Tremblante, elle se releva et pivota lentement. La face hilare de Lucas lui faisait face.

—   Avoue, t'a flippé.

Marion fixa le préadolescent et haussa les épaules.

—   Allez, viens. Toi aussi Misti'.

Le chat ne bougea pas, continuant à fixer un point imaginaire, mi-intrigué, mi-inquiet.

—   Il doit sentir l'odeur des chats qui sont venus pendant qu'on construisait la maison. Il y en a plein autour a dit maman, expliqua Lucas, avant d'enchainer. Premier arrivé, premier servi.

Le garçon s'évapora dans le couloir au pas de course, sans bougie. Marion se demanda comment il faisait pour avoir cette assurance : elle aurait eu trop peur de se cogner ou de tomber.

Marion finit par trouver le salon, où sa famille l'attendait. Son père lui sourit et l'invita à s'asseoir.

—   Alors, qu'est-ce que vous en pensez ? demanda-t-il, impatient.

—   J'adore !

—   Ma chambre est géniale, papa, je l'aime beaucoup, la maison aussi.

—   Eh, bah moi, eh, bah moi, commença la benjamine, j'ai une chambre toute jaune et blanche, avec des peluches !

—   Je suis content que ça vous plaise.

Il se pencha vers sa femme et ils échangèrent un court, mais tendre baisé.

—   Bouh ! fit Cindy en se cachant les yeux.

Marion sourit, ses parents s'engueulaient beaucoup par rapport à leur ancienne maison : trop petite, trop vielle, trop délabré, depuis qu'ils avaient ce projet ils paraissent sereins, heureux et plus complices que jamais. Elle mordit dans une part de pizza en leur jetant des petits regards amusés.

Soudain, Darling sauta sur ses pattes et se mit à aboyer frénétiquement en direction du couloir, sans raison apparente. Puis elle gémit, et se réfugia sous la table.

—   Bah, qu'est-ce qu'elle a ?

—   J'ai peur, sanglota Cindy.

—   Mais non ma chérie, la rassura sa mère, Darling doit sentir les chats du voisinage, ils ont dû venir pendant les travaux.

—   M–mais, cria son père, je rêve, elle a pissé sous la table !

—   Quoi ?

Hélène était mi- rire, mi-cri, la situation l'amusait autant qu'elle l'exaspérait. Elle s'était attendue à ce que les animaux aient besoin d'un temps d'adaptation, il n'avait connu que leur ancienne maison, mais Darling battait tous les records, Brocoli lui s'était contenté de renifler les murs puis de dormir dans un coin, lui…

—   Lucas, tu nettoie, je vais laver Cindy et la mettre au lit, pendant que ton père va sortir les poubelles. Marion, occupe-toi de Darling.

Lucas grogna et s'exécuta, Marion prit Darling sur le canapé, dans l'obscurité, le malinois paraissait tout petit. La chienne tremblait, et se pelotonnait contre sa maitresse. Marion la dorlota un moment, puis elle finit par s'endormir, calmement.

Quand elle regagna sa chambre, Mistigri était toujours au même endroit. « ‘Sont fous ces animaux, aujourd'hui… » murmura-t-elle en bâillant. Elle vérifia que son carnet n'avait pas bougé, et que Lucas n'était pas venu en son absence, mais rien. Elle se retourna et se retrouva nez à nez avec une face blanche et souriante.

—   AH !

Elle recula et trébucha.

—   Merde !

Elle fixa le clown, qui la fixa de ses deux yeux vides. Il avait bougé. On l'avait déplacé. Elle pesta contre Lucas, elle serait bien allée l'engueuler, mais ses parents étaient allés se coucher et elle ne voulait pas les réveiller. Le clown la fixait avec son sourire figé, gêné elle le renfonça aux fonds de l'étagère, mais où qu'elle soit, elle ne pouvait échapper à son regard vide et à son sourire figé.

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