LR 175

Christian Lemoine

La quête. Gentil - murmure - sèches - soin – danse

Le Chevalier devant ses juges, pour quelque geste peu courtois dans un tournoi où s'affrontaient preux et gentilshommes en toute grâce et savoir-vivre. « Vous voilà en procès Chevalier, et votre parole sera votre sauf-conduit ou votre perte. » Du haut de la tribune, les juges en hermine le considéraient sans bienveillance ni animosité. « Voici, nobles seigneurs, et vous Messires et gentes dames. Ainsi veux-je tenter d'expliquer ma déraison passagère et mon mouvement brutal : Je vins à vous l'esprit tout retourné d'une rencontre étrange sur mon chemin vers la lice. Un indigent timide me tendit sa sébile au détour d'un bosquet. Mais son regard profond me troubla et je pensai par moi avoir rencontré là un prince ou un sage. Il ne dit mot mais resta immobile, ses yeux fouillant les miens, et je sentis que son âme cherchait à sonder la mienne. J'étais devant lui aussi nu qu'un enfant nouveau-né, et fragile, et bien que mon armure m'eut redonné confiance au moment où je la sentais peser sur moi, mon âme de nouveau fut happée par la muette interrogation du vénérable vieillard dissimulé sous ses atours de pauvre hère. J'eus soudain comme en une révélation, la conviction que l'homme qui me faisait face gardait un ardent secret, et que bien au contraire que de me demander l'obole, il m'avait choisi pour devenir à mon tour le gardien de ce secret. » La foule muette hocha de la tête et les juges se retirèrent. Debout seul sur l'estrade des accusés, le Chevalier déjà connaissait la sentence, et s'apprêtait à revêtir les oripeaux de la misère pour aller sur les chemins en quête d'un prochain gardien à qui confier l'indicible secret.

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