LR 190

Christian Lemoine

Douleur quotidien langues disponible nourrir

Ils avaient perdu sous Coty Dien Bien Phu, mais gagné la bataille d'Alger. Pour rien. Ils se remémoraient les veilles, les insomnies, tapis dans quelque trou inondé, cherchant sans succès à recharger d'amadou leurs briquets humides. Ils repensaient à ces pauses joyeuses, où des corps d'armées étrangères fraternisaient et baragouinaient, emmêlant gaiement l'anglais, le vietnamien et le breton, dans un laborieux et lent galimatias. Ils se revoyaient, féroces fantassins mais gamins amusés du jeu d'une anoure irisée sur le bord d'une mare. Leurs combats, leurs souffrances, leurs exploits ? Tout ça pour rien. Il n'en restait plus rien. Nulle trace, nul indice pô ! nib ! léki ! nada ! que tchi ! que dalle !

Signaler ce texte