Me rendre à l'évidence

marivaudelle

Je détestais vos doutes et vos inquiétudes, et j'aimais tant votre sollicitude et votre distance.
Ils exhalaient un doux parfum de mimosa,
celui qui se mêlerait avec bonheur aux senteurs de votre intimité brûlante.
Je l'aurais dégustée très lentement, comme pour savourer d'avance la lenteur de vos baisers.
 
La pluie se tait, le soleil brille haut dans le ciel bleu et mauve, les nuages s'amoncellent au-dessus les montagnes ;
des nuages lourds et gris, prêts à éclater comme des mots qu'on garderait au bord du cœur et qui resteraient en suspens sur les lèvres.
 
Ces mots que j'aurais aimé vous dire mais qu'une force aussi maligne qu'une tumeur avait tué dans l'œuf avant qu'ils n'éclosent.
La rage collée aux neurones, la colère vissée autour de la volonté désespérément scellée, vous m'auriez écouté,
J'étais otage de ma timidité et captive de mes renoncements.
Intimidée, je l'étais, plus que vous ne pouvez l'imaginer et je crains que vous n'ayez interprété mes silences comme une indifférence polie ou futile.
 
Les minutes défilent au fur et à mesure que les grains de café moulu réveillent ma tête endolorie.
Je vois ces petits grains de folie que vous aimez tant drainer dans leur sillage, des petits grains d'espoir qui peu à peu s'agglutinent sur l'hypoténuse de nos douleurs.
Peut-être saurez-vous, en suivant ces petits grains, retrouver le chemin qui vous conduira vers moi.
Peut-être, et par quelque hasard tout ouï à vos doutes et aux miens, nos routes se croiseront-elles un jour nouveau.
 
La lumière se fracture en deux sur les maisons hautes, les vagues se cassent sur la grève endolorie, mon cœur se scinde en deux, j'ai l'impression qu'il s'échappe.
 
La pluie tombe droite et drue sur mon jardin désert.
Je peine à garder les yeux ouverts, pourtant mon corps est témoin que je vous suis toute ouverte.
Mes paupières tombent, lourdes de sommeil ou avides de ne plus voir.
Ne plus voir les désirs que vous m'avez inspirés.
Je voudrais tomber vers vous comme un papillon pris au piège, me rendre, 
capituler, dans un port de bras plus léger qu'un battement d'ailes,
me soumettre à mes envies folles, revendiquer mes pulsions érotiques envers vous,
et m'abandonner à vous une heure, un jour, une nuit, ivre de tendresse. 
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