Nous et les ennemis du songe

Loxias

Au commencement, il n'y avait rien. Puis Dieu insuffla la vie. Mais ce ne fut pas un souffle, ce fut un cri. Dieu cria le monde, et sa voix nous poli.


Sans les ennemis du songe nous serions déjà lisses et abolis. Les ennemis du songe soufflent au contraire. Et voilà que nous existons, dans une tension altière anoblie par nos sens.


Dernière société secrète, car les autres disparaîtront avant, les ennemis du songe ont bien une antenne incarnée chez les humains. Un petit groupe d'hommes et de femmes chargés de maintenir un certain équilibre, et qui en ce nom, bien malgré eux, représente le mal dans sa source même.


Pour les combattre, et le terme est équivoque, trois humains ont choisi de se nommer Les archers aveugles (en référence à une nouvelle littéraire fantastique qu'ils adoraient tous les trois), puis La fronde, puis La nuit première et encore Le sang du graal, mais finalement ils abandonnèrent l'idée même de porter un nom. Et d'ailleurs pendant ce temps, ils n'agissaient pas vraiment. D'un commun accord, ils s'arrêtèrent donc sur le seul Nous. Par malice, pragmatisme et défi. Car alors ils ne pourraient plus prononcer ce mot redondant innocemment.

Ils s'étaient de toute manière, en quelque sorte vaccinés contre l'innocence en s'attaquant aux ennemis du songe et même bien avant cela, en en comprenant l'existence. Par géniale déduction pour M. , par vision directe chez S. et parce que R. trouva un jour une authentique porte aux secrets. Ils n'en étaient d'abord pas revenus de se rencontrer tous les trois et de parler des ennemis. Puis l'évidence. Le combat.


Les ennemis du songe incarnés eux, n'avaient pas connaissance de Nous. Il faut dire que s'ils étaient incarnés, ils l'étaient à peine. Passant leur temps à souffler, chanter quand ils s'égaraient.


Et qu'avaient-ils à craindre ? Leur tâche était juste et permettait le monde.


En vérité, le projet de Nous est tellement fou et irréalisable (tissé de ce même écho au désespoir qui fit que les ennemis du songe furent) qu'ils partent gagnants. Mais si vainement...


Tant pis, la beauté est trop proche. Il faut qu'ils se rencontrent, Nous et les ennemis du songe, qu'ils s'unissent et nous fasse un nouveau monde. Après tout c'est ce qui se passe, à tout jamais, à peu de chose près, tout le temps, partout.


Qui pour permettre cela ?


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