Nouvelles de Mars : je vais vous révéler la froide vérité

Alain Balussou

pièce 33 de Nouvelles de Mars


       Nouvelles de Mars



Je vais vous révéler la froide vérité.
Ceux qui savent interdisaient qu'on vous la dise,
la voici : je la veux dérangeante et précise,
IL Y A TRÈS LONGTEMPS MARS ÉTAIT HABITÉE !
Sous un climat plus chaud, partout la forêt dense,
sauf aux pôles, moussait, et partout le progrès
l'ensemençait de champs et de cités malgré
bien trop de voix trop investies par la prudence.
Le blé croissait grâce aux basaltes d'Elysium.
Sur son horizon proche un animal sauvage,
ou le troupeau, surprenait parfois de l'herbage
un croissant de Terre, comme en aluminium.
Des architectes vénaux, tout autour d'Olympe,
dessinaient pour les riches des jardins "anglais",
impuissants à dompter ce mont où se déplaît
la nuit quand le soir vient sur Mars et lorsque y grimpe
la frontière au soleil, dessinaient les canaux
communicants de mers petites et tranquilles
si bleues, si tièdes, si poissonneuses et qui le
demeurèrent encore et souvent des bateaux
que les poètes, fort nombreux, prenaient pour cible.
Un jour, l'un d'eux, peut-être, un jour aurait écrit
ou pensé : "Les avisos glissaient dans la nuit
coloniale" (de Mars)... ce n'est pas impossible.
Les Martiens possédaient deux yeux et deux genoux.
En ville, de belles filles, de leurs chevilles
frappaient le sol des avenues, l'écrivain pille
l'inconscient et ne dit pas "priez pour nous".


... Ceci existait avant l'ère d'étrange et
grand vieillissement, le temps des ciels orangés.

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